Intention malveillante , ver de terre , la deuxième personne .
La nuit tomba, et ce ne fut qu’alors que la pluie commença à tomber dehors, fine et persistante.
La terre, détrempée, exhalait une forte odeur de vase. Les vers de terre étaient nombreux, s’extirpant de la boue par paquets, se tortillant et roulant sur eux-mêmes, tentant de ne pas s’asphyxier.
Chi Xiaochi allait bientôt entrer dans la petite pièce noire. L’ambiance le rendait un peu oppressé, alors il se mit à réciter en sourdine le Sūtra de la Grande Compassion, histoire de se soulager un peu.
Gan Yu appliquait de l’ombre sur ses joues pour lui donner une mine plus pâle, plus conforme au personnage : « Que récites-tu ? »
Chi Xiaochi se mit à chanter à voix haute : « Namo hēlùó dànà, duōluó yèyé… »
Gan Yu, sans hésiter, posa le manche de son pinceau contre ses lèvres.
… Il craignait qu’à continuer ainsi, Bouddha ne l’accuse de blasphème.
Chi Xiaochi ouvrit la bouche et mordit son pinceau.
Gan Yu, impuissant : « Ouvre la bouche. »
Chi Xiaochi haussa un sourcil, visiblement dans l’intention de se distraire autrement.
Gan Yu lui saisit doucement le menton, craignant de lui faire mal s’il serrait trop, alors il le secoua légèrement, sa voix mêlant résignation et douceur : « Ne fais pas l’enfant. Ouvre. »
Chi Xiaochi le regarda, conscient lui-même du caractère puéril de son geste.
Depuis l’enfance, Chi Xiaochi craignait l’obscurité et les fantômes. Son imagination vive et ses peurs d’enfant se manifestaient sans retenue : au moindre effroi, il courait chez Lou Ying, car c’était l’endroit le plus sûr, et là, il ne serait jamais moqué.
Quand il était petit, se lever la nuit figurait pour lui parmi les plus grandes épreuves de l’existence.
La particularité des immeubles-tubes où il vivait tenait à leur caractère communautaire : la cuisine, la salle de bain, les toilettes, tout était partagé.
S’il voulait aller aux toilettes au milieu de la nuit, il lui fallait enfiler ses chaussons et marcher d’un bout à l’autre du couloir, sous une lumière à commande vocale capricieuse, trois ampoules sur cinq allumées. Pour Chi Xiaochi, c’était un exploit comparable à la Longue Marche de vingt-cinq mille lis.
(NT : 12500 km environ. Métaphore pour parler d’un parcours extrêmement difficile et long. Fait référence à la retraite stratégique de l’Armée rouge en 1934 devant les forces nationalistes de Tchang Kaï-chek)
Pour l’aider à surmonter cette peur, Lou Ying avait acheté du papier jaune vendu à la petite boutique de l’école, l’avait découpé et y avait dessiné des talismans à l’encre rouge, lui assurant que, s’il tenait ça en main, aucun fantôme n’oserait s’approcher de lui.
Chi Xiaochi avait dit : « C’est faux. »
Lou Ying, avec douceur : « C’est vrai. »
Chi Xiaochi roula les yeux, puis glissa le talisman triangulaire dans la poche de Lou Ying : «Alors tu le gardes. »
Si Lou Ying tenait le talisman et que lui pouvait tenir Lou Ying par la main, il n’aurait plus peur.
Une stratégie d’évitement, tout simplement ingénieuse.
Plus tard, quand Lou Ying mourut, il cessa peu à peu d’avoir peur. Parfois, il se levait encore au milieu de la nuit, à moitié endormi, pour errer un moment dans le couloir, espérant croiser un fantôme du nom de Lou. Mais ses souhaits restaient toujours vains, au point qu’il commença à douter de l’existence des esprits.
Si Lou ge avait une âme, pourquoi ne revenait-il jamais jeter un œil sur lui ?
Gan Yu ne savait pas à quoi il pensait, mais trouvait cet enfantin Chi Xiaochi attendrissant, au point d’avoir envie de l’embrasser.
Il épousseta doucement l’ombre sur son visage, s’assura que le maquillage était en place, puis laissa Chi Xiaochi réciter son Sūtra de la Grande Compassion pour tourmenter Xi Lou, pendant que lui se tournait et, avec un rouge à lèvres et un mouchoir en papier, dessina un talisman qu’il plia en triangle.
Même si cela ne servirait à rien, c’était parfait pour consoler le petit chiot qui venait de lui mordre le pinceau.
Ses doigts de chirurgien, longs et fins, pliaient le papier avec une élégance presque hypnotique.
Alors qu’il aplatissait un bord du mouchoir avec sa jointure, la fille à queue-de-cheval entra dans la loge pour l’appeler : la scène de nuit allait commencer.
… Elle s’inquiétait pour la santé mentale du garçon à la queue de cochon ; même sans maquillage, son visage hagard portait les traces de la fatigue.
Chi Xiaochi se leva, prêt à sortir, quand Gan Yu lui glissa quelque chose dans la poche de sa chemise.
Chi Xiaochi haussa légèrement un sourcil et lui jeta un regard interrogatif.
Que ce soit Gan Yu ou 061, ils préféraient toujours offrir un soutien tangible.
Un simple « N’aie pas peur » ne suffit pas quand on parle depuis une position confortable.
Gan Yu caressa la poche et dit : « Je serai juste dehors. Si tu es en danger, appelle Gan Yu à haute voix. »
Chi Xiaochi entra dans la pièce et se tint dans un coin, ses doigts suivant du bout des ongles le contour triangulaire du talisman dans sa poche. Il laissa échapper un soupir, un peu dans le vague.
Mais ce n’était qu’un peu : il n’avait pas oublié où il se trouvait.
Le garçon à la queue de cochon avait déjà défait tous ses cheveux mi-longs. Ses lèvres étaient d’un blanc mortel, ses yeux fixaient obstinément le dessus de ses pieds, et dans son regard perçait une agressivité désespérée.
La pluie redoubla à l’extérieur, tambourinant contre la fenêtre. De fins filets d’eau s’écoulaient sur la vitre, rendant le silence de la pièce encore plus oppressant.
Chi Xiaochi chantonna : « Une pluie glacée me fouette le visage… » (NT : de la chanson 冰雨 (Pluie glaciale) » d’Andy Lau)
Xi Lou, qui avait déjà enduré le Sūtra de la Grande Compassion, ne put se contenir : « Tais-toi.» Pourquoi ne meurs-tu pas sous cette pluie.
Chi Xiaochi répondit : « Hi hi. »
… Xi Lou se prit à souhaiter sincèrement que cette fantôme donne toute sa mesure, et parvienne enfin à terrasser ce démon de Chi Xiaochi.
Et cette fois, c’était bien Chi Xiaochi qui devait rencontrer le fantôme.
D’après le scénario obtenu auprès de « Guan Qiaoqiao », celle-ci devait surgir brutalement au cours du jeu. Chi Xiaochi, en voyant sa petite amie défunte, serait d’abord saisi d’effroi, puis de joie, jusqu’à la saisir fermement sans vouloir la lâcher. La pièce serait alors plongée dans le chaos, jusqu’à ce qu’à la lumière, les autres découvrent qu’il ne tenait rien d’autre que le pan de sa propre chemise.
« Guan Qiaoqiao » étant elle-même un fantôme, ses allées et venues étaient imprévisibles, et ne nécessitaient même pas d’effets spéciaux — un soulagement pour l’équipe de postproduction.
Avant qu’on éteigne la lumière, « Guan Qiaoqiao » entra dans la pièce et dit à Chi Xiaochi, désolée : « N’aie pas peur, ce n’est que du théatre. »
Ses paroles, ainsi que son regard empreint de remords, semblaient d’une sincérité authentique. Pourtant, en repensant au regard tranchant comme une lame qu’elle lui avait lancé sur le bateau ce matin-là, Chi Xiaochi sentit un frisson glacé courir le long de sa nuque.
La lumière s’éteignit.
Toute la pièce fut plongée dans un silence noir et total, uniquement troublé par les respirations, tour à tour plus marquées.
Chi Xiaochi se mit à compter les souffles. Bien, ils étaient quatre, en comptant le sien. Il n’y avait pas encore de « cinquième personne ».
Au premier tour, il occupait la position D, là même où s’était tenue « Guan Qiaoqiao ».
Le garçon à la queue de cochon était à la position A. Il s’appuyait d’une main contre le mur et avançait lentement vers la fille à la queue-de-cheval à la position B. Ses pas traînaient au sol, produisant un léger frottement.
La pièce n’était pas complètement obscure : il y avait une source de lumière, les fenêtres n’étaient pas complètement condamnées. De temps à autre, un éclair déchirait le ciel, projetant une lueur blanche et vive, révélant les quatre silhouettes dans la pièce. Isolées, solitaires, elles ressemblaient à des spectres errants.
La main recouverte de pansements du garçon à la queue de cochon se posa sur l’épaule droite de la fille à la queue-de-cheval, glacée et molle. Même à travers les vêtements, elle sursauta, parcourue d’un frisson de froid.
Elle n’osa pas se retourner. Elle fit un pas en avant, puis se mit à trottiner en direction du garçon aux taches de rousseur à la position C.
Celui-ci chancela sous son geste et fit quelques pas en arrière. Il lui lança un regard plein de reproche avant de commencer à avancer à son tour vers Chi Xiaochi.
Une paume chaude et épaisse se posa sur son épaule. Chi Xiaochi s’avança à son tour, le cœur noir et lourd. Il pensa : Et si elle était juste à l’angle suivant ? Les bras ballants, la tête baissée, à m’attendre.
Il glissa instinctivement la main dans sa poche, cherchant la force que lui conférait le talisman en papier toilette, et reprit sa marche.
Mais rien de ce qu’il redoutait ne se produisit.
Le coin suivant, libéré par le départ du garçon à la queue de cochon, était désormais vide.
Conformément aux règles du jeu, il toussota légèrement avant de marcher vers le coin où se trouvait maintenant le garçon à la queue de cochon.
Une fois en place, il tendit la main pour lui tapoter le dos, mais ne rencontra que de la sueur froide.
Le garçon ne bougea pas immédiatement. Il se retourna lentement, lui lançant un regard scrutateur, comme pour vérifier s’il s’agissait bien d’un humain.
À ce moment précis, un éclair fusa, illuminant les visages de chacun d’un éclat livide.
Ce regard, nerveux à l’extrême, n’était plus humain. Il y brillait quelque chose de bestial, une lumière sourde comme un couteau émoussé, éraflant les nerfs de Chi Xiaochi jusqu’à les engourdir.
Mais Chi Xiaochi tint bon.
Il resta stoïque, comme s’il n’avait rien vu, et laissa le garçon à la queue de cochon poursuivre sa route.
« Guan Qiaoqiao » n’était toujours pas apparue. Ils tournaient en rond dans cette maison vide.
Peu à peu, tous commençaient à ressentir une certaine impatience mêlée d’anxiété.
Quand viendrait-elle ?
L’attente de la peur était plus terrible que la peur elle-même.
Chi Xiaochi en devenait presque engourdi. Alors qu’il attendait le garçon aux taches de rousseur dans un coin, il lança à Xi Lou : « On se croirait comme un vieux baudet qui fait tourner la meule. »
Xi Lou répondit : « Salut, le baudet. »
Chi Xiaochi : Tiens donc, il réplique maintenant.
Après un moment, Xi Lou ajouta : « Et le baudet, il ne dit plus rien ? »
Chi Xiaochi s’adossa au mur, dissimulant la faiblesse de ses jambes.
Voyant qu’il ne répondait toujours pas, Xi Lou se tut un instant avant de dire : « Dis-moi quelque chose. »
Il savait bien que, malgré sa grande gueule et ses airs moqueurs, sa peur des fantômes était quelque chose que Xi Lou connaissait.
Lui confier une mission pareille n’était pas une mince affaire.
Chi Xiaochi réfléchit, puis comprit l’intention de Xi Lou, et en fut touché. Il se mit à chanter avec émotion pour se donner du courage :
« Même si j’vois un cafard, j’ai pas peur, pas peur du tout. »
Xi Lou : « … » Putain, pourquoi j’ai soudainement envie de manger de la viande d’âne ?
Chi Xiaochi, posté dans son coin, entendit les pas du garçon aux taches de rousseur qui s’approchait, et se prépara à se diriger vers le coin suivant.
Une main se posa sur son épaule.
Alors qu’il allait faire un pas, un étranglement brutal le saisit à la gorge. L’endroit où cette main froide l’avait touché semblait avoir été mordu par un serpent : sa chair se glaça, engourdie jusqu’à la moelle.
— Ce n’était pas la main du garçon aux taches de rousseur.
C’était celle d’une femme. Fine, douce, mais d’une froideur surnaturelle.
Chi Xiaochi se tourna lentement, raide comme un piquet.
Même le tonnerre semblait vouloir accompagner cette scène. Un fracas retentit, et un éclair d’un blanc éclatant fendit le ciel.
« Guan Qiaoqiao » se tenait juste derrière lui, le regard fixé sur lui, un sourire doux sur les lèvres, comme si elle s’apprêtait à murmurer des mots tendres à un ancien amant. Mais dès qu’elle ouvrit la bouche, elle dévoila une série de dents pointues, pareilles à celles d’une lamproie, s’ouvrant en cercles concentriques jusqu’au fond de sa gorge.
Mais avant que Chi Xiaochi ne puisse ressentir le moindre haut-le-cœur, un autocollant emoji avec une expression de chien lui fut plaqué en plein visage. « Ne touche pas à Laozi !.jpg »
Chi Xiaochi : « … » Un coin de sa bouche se releva malgré lui.
Grâce à cet autocollant venu briser la tension, on ne voyait plus ce visage indescriptible. Chi Xiaochi retrouva aussitôt ses esprits, et fit passer son expression d’effroi à une incrédulité émue avec une fluidité remarquable. « … Qiaoqiao ? C’est toi ? »
La pièce replongea dans l’obscurité. Il saisit un pan du vêtement de « Guan Qiaoqiao », une larme suspendue à ses cils, sur le point de tomber sans y parvenir.
« Qiaoqiao ? » s’écria la fille à la queue-de-cheval. « Qiaoqiao est là ? »
Terrifiée au point de vouloir fuir par la porte, elle tentait de sourire de force, sa voix tremblant sous les sanglots. Quant au garçon aux taches de rousseur, entendant l’agitation devant lui, il lâcha un « Aïe, bordel ! », fit quelques pas de recul précipités et retourna dans le coin précédent — une réaction tout à fait naturelle.
Au même moment, sur la même ligne horizontale de la pièce, le garçon à la queue de cochon afficha un sourire tordu. Dans sa main, une dague brisée étincelait.
La lame, cassée en son milieu, ne conservait qu’un demi-côté, gravé de runes anciennes et ébréchées, d'où s’échappaient des reflets ténus et changeants, mystérieux et indéchiffrables.
… L’occasion était venue.
Son occasion de survivre, enfin là.
Cette dague brisée, il l’avait volée à un exorciste dans son sixième monde de mission.
Elle avait l’effet d’un pieu en bois de pêcher consacré : capable de sceller l’âme d’un esprit malfaisant dans un corps, tout en infligeant des dégâts à sa forme spirituelle.
Si « Guan Qiaoqiao » avait opté pour une possession par force, pouvant à tout moment quitter le corps dès qu’elle sentait le danger, jamais il n’aurait osé utiliser ce talisman de survie.
Mais elle avait justement choisi une méthode plus contraignante, la possession douce : tant qu’elle était enfermée dans ce corps et empêchée de retourner dans la photo, elle ne pourrait plus semer le chaos.
Le garçon à la queue de cochon avait observé. Elle était obsédée par le théâtre. Agir pendant qu’elle jouait une scène, c’était, selon lui, le meilleur moment pour la frapper.
Et dans l’obscurité, ne pas voir son visage était un soulagement inespéré…
La dague bien cachée dans sa manche, il s’avança, plein d’espoir, chancelant d’impatience.
Alors, lorsque la lumière de la pièce se ralluma brusquement, il sursauta, dissimula aussitôt l’éclat glacé de la lame sous sa manche, et une vague de colère haineuse l’envahit aussitôt.
Qui est-ce qui a foutu cette lumière en marche ?!
Mais toute sa rage se figea en un instant, remplacée par une glaçante horreur, lorsqu’il tourna la tête et vit ce qui était apparu.
« Guan Qiaoqiao » avait disparu avec l’extinction des lumières, comme le prévoyait le scénario.
Mais ce qu’il voyait là, c’était cent fois plus terrifiant que tout ce qu’il aurait pu imaginer de sanglant ou de difforme.
Le tableau La Prière d’une jeune fille, on ne savait comment, était désormais accroché au mur près de la porte, juste en face de lui.
La jeune fille sur la photo avait une expression digne, une allure rétro. Ses lèvres étaient d’un rouge profond, comme teintes de sang. Elle fixait le garçon à la queue de cochon d’un regard silencieux, impassible, supérieur.
Et alors qu’il la regardait, sans prévenir, sa tête se détacha de son cou et tomba. L’intérieur était rempli de vers rouges, filiformes, qui s’agitaient et se tordaient.
Le garçon à la queue de cochon resta figé un instant, puis poussa un hurlement perçant avant de briser la vitre derrière lui et de se jeter à travers le rideau de pluie.
Les autres n’avaient vu que la photo soudainement apparue.
Le seul à avoir perçu l’anomalie, c’était Chi Xiaochi, dont la vue fut à cet instant submergée par un autocollant en forme de chat : « Je veux ça ! Achète-moi ça.jpg »
… Pardon, c’est cet autocollant qui m’a aveuglé.
Mais le hurlement du garçon à la queue de cochon et sa chute depuis la fenêtre suffisaient à faire deviner ce que contenait vraiment l’image.
Chi Xiaochi se précipita vers le lit, retira le verrou de la fenêtre et repoussa d’un coup la vitre déjà branlante, presque brisée, pour se pencher au-dehors.
Son visage se décomposa.
La fille à la queue-de-cheval arriva également en courant, le repoussa à moitié de côté pour voir.
Chi Xiaochi cria : « Ne regarde pas ! »
Mais c’était trop tard.
D’un seul regard vers le bas, elle resta bouche bée, puis se détourna aussitôt pour vomir.
… On aurait dit que tous les vers de terre des environs s’étaient donné rendez-vous sous cette fenêtre. Une mer rougeâtre grouillait, agitée de corps gras et annelés, ondulant et se recroquevillant sans fin.
Le garçon à la queue de cochon était tombé dans cette mer d’asticots sans subir la moindre blessure. Mais dès qu’il comprit où il se trouvait, il fut saisi d’une panique instantanée.
Il se releva d’un bond, tenta de fuir cette mer grouillante. Chaque pas déclenchait un bruit mouillé, ploc, et des dizaines de vers se faisaient broyer sous ses pieds.
Il agita les bras comme un fou : « Éloignez-vous de moi ! Éloignez-vous de moi ! »
Il déchirait ses vêtements, tentait de faire tomber les vers qui s’y glissaient.
Mais son esprit avait déjà sombré dans la folie.
Il hurla : « Ils rentrent dans mes oreilles ! Ils rentrent dans mon cerveau ! »
Il parlait des vers de terre.
À ses yeux, ces choses rouges et molles, grouillantes, s’infiltraient lentement par chaque pore de sa peau, pénétraient ses os, sa chair, comme si elles avaient trouvé leur abri pour l’hibernation et s’y enfonçaient en spirale.
Il criait, se battait lui-même, bien que peu de vers restent encore sur lui.
Chi Xiaochi lui cria : « Reviens ! Reviens tout de suite ! »
— Cette scène… cette tournure… pourquoi cela me semble-t-il si familier ?
Un jour de pluie, un homme devenu fou, courant dans la nuit…
Le garçon à la queue de cochon n’écoutait rien. Les cheveux en bataille, il se mit à courir en direction de la piscine.
Chi Xiaochi ouvrit grand les yeux, fit volte-face et se précipita hors de la chambre, dévalant les escaliers.
Entendant les hurlements de l’intérieur, Gan Yu, qui attendait jusque-là près de la porte, l’ouvrit aussitôt. En voyant Chi Xiaochi se précipiter vers la sortie, il réagit immédiatement et lui saisit fermement le poignet.
Chi Xiaochi tenta de se libérer : « Il y a un problème ! »
Mais Gan Yu réagit encore plus vite que lui. L’entendant, il le retint d’un geste, puis descendit les escaliers à grandes enjambées.
« Je viens avec toi. »
En sortant du manoir ancien, Chi Xiaochi fut témoin d’une scène effroyable.
— La caméra poursuivait le garçon à la queue de cochon, courant sous la pluie, les larmes et la morve mêlées, comme si sa folie faisait partie intégrante de la performance.
Objectif glacial, pluie froide, un homme en délire, une équipe de tournage imperturbable.
Tout cela composait un tableau d’un absurde terrifiant.
Le réalisateur semblait ravi de cette tournure aussi soudaine que spectaculaire.
« Très bien, très bien, continuez ! »
« Caméraman ! Suivez-le, ne le perdez pas de vue ! »
… Les PNJ prenaient tout cela pour une mise en scène et applaudissaient avec enthousiasme, tandis que les appels de Chi Xiaochi se perdaient dans le bruit de la pluie, à peine audibles.
La scène se conclut ainsi : pris de panique, le garçon à la queue de cochon grimpa sans réfléchir sur le plongeoir de dix mètres et sauta sans hésitation.
Le réalisateur leva le bras et s’écria : « Coupez! »
… C’était un véritable coupez.
La tête la première, le garçon à la queue de cochon s’écrasa dans la piscine. Sur la flaque peu profonde d'eau de pluie qui recouvrait le fond de la piscine, s’étala peu à peu une traînée de liquides rouges et blanchâtres. Seul son corps tressaillait encore de temps à autre.
Quand Chi Xiaochi arriva au bord du bassin, le garçon avait déjà été flouté par 061.
Même ainsi, Gan Yu, inquiet, s’interposa devant Chi Xiaochi, cherchant à lui éviter la vision de cette masse floutée : « Ne regarde pas. »
La fille à la queue-de-cheval, accourue à son tour, vit le cadavre du garçon à la queue de cochon. Elle se saisit les cheveux et poussa un hurlement silencieux, déchirant. Sa bouche était grande ouverte, révélant le rouge écarlate de sa gorge.
Elle s’affaissa au bord de la piscine, la folie de ses traits laissant peu à peu place à une froide lucidité.
Personne ne lui demanda quel lien elle avait avec le garçon à la queue de cochon. Ceux qu’on appelait alliés ici, sauf exceptions, étaient plus que des proches, même s’ils n’étaient pas de la même famille.
Elle murmura pour elle-même : « Il est mort. Il est mort selon le scénario. »
Puis ajouta : « C’est cette salo... ce monstre qui l’a tué. »
En observant sa réaction, en une étincelle, le regard de Chi Xiaochi changea : il venait de comprendre pleinement le mécanisme de ce monde.
Voyant la lueur rouge s’étendre dans les yeux de la fille à la queue-de-cheval, une intention meurtrière naissante, Chi Xiaochi lui envoya un grand coup de pied et la projeta directement dans la piscine.
Elle ne perdit même pas connaissance. Vacillante, elle tenta de se relever. Gan Tang, qui avait suivi, soupira légèrement, sauta dans l’eau et lui asséna d’un geste net le tranchant de la main sur la nuque, l’assommant proprement.
Une fois la fille à la queue-de-cheval sortie de l’eau, ruisselante, Chi Xiaochi s’excusa pour son geste : « Ce n’était pas moi, c’était mon pied. »
Xi Lou : « … » Est-ce vraiment le moment pour faire de l’humour ?
En voyant le visage de Chi Xiaochi, Gan Yu devina qu’il venait probablement d’avoir une révélation. En lui tendant sa veste pour le protéger de la pluie, il demanda : « Qu’est-ce qu’il se passe? »
« Il n’y a qu’un seul fantôme dans la villa : ‘Guan Qiaoqiao’. » Chi Xiaochi résuma sa déduction. « Son critère de sélection pour tuer, c’est la ‘malveillance’ que les autres nourrissent en eux. »
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L'auteur a quelque chose à dire :
Président Chi : Ce n'était pas moi, c'était mon pied~
Lou-ge : Ce que dit Xiaochi est vrai.
Traduction: Darkia1030
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