En fait, tout est parti d'une triste histoire.
À cette époque, le Zhuo Fan d’autrefois semblait souffrir d’un défaut étrange, une imagination débordante et incontrôlable. Sa capacité à fantasmer était sans limite, et le pauvre petit Zhuo Fan était affligé d’une maladie incurable, connue sous le nom de chuunibyou. Avec le temps, cette maladie s’aggrava de manière dramatique, et son chuunibyou évolua en une condition terminale : la maladie du prince.
(NT : chuunibyou : litt. "maladie de la deuxième année du collège" en japonais .Terme qui désigne de manière péjorative une personne adoptant un comportement fantasque, notamment en croyant posséder des pouvoirs spéciaux.)
La première fois que Zhuo Fan rencontra Xiao Han, ce fut au lycée. Comme il vivait dans un dortoir, il quittait rarement l’enceinte de l’école et commandait presque tout en ligne.
Un jour, Zhuo Fan commença à trouver un beau bouquet de fleurs, soigneusement emballé, posé devant la porte de son dortoir chaque samedi matin. Bien qu’il affichât une indifférence de façade et jetât ostensiblement le bouquet à la poubelle, il en était secrètement ravi. Après tout, cela faisait plaisir d’avoir un admirateur secret. Peu à peu, il en vint à attendre ces samedis avec impatience.
Un samedi, il se réveilla très tôt. Ignorant les plaintes de ses camarades de dortoir dont il avait perturbé le sommeil, il fit semblant de prendre un panier de linge sale – qui aurait dû être lavé la veille – et se dirigea vers la salle de bain. Il laissa volontairement la porte du dortoir entrouverte, prétextant laver ses vêtements, tout en observant furtivement le couloir à travers l’entrebâillement.
Vers huit heures, une silhouette grande et élancée apparut, avançant rapidement jusqu’à la porte. La personne s’arrêta, se baissa, puis déposa délicatement le bouquet qu’elle tenait dans ses bras. Juste au moment où elle s’apprêtait à partir, la porte s’ouvrit brusquement.
Appuyé contre le chambranle, Zhuo Fan tenta d’afficher une expression froide et arrogante. Il leva les yeux vers le bel homme, qui faisait une tête de plus que lui, mais son assurance s’effondra. Nerveux, il en oublia tout ce qu’il avait prévu de dire.
Xiao Han, un peu surpris, ouvrit la bouche pour parler, mais avant qu’il ne puisse prononcer un mot, Zhuo Fan referma la porte avec fracas. Déconcerté, Xiao Han se gratta la tête, haussa les épaules et s’éloigna.
Cette scène se répéta pendant plus d’un mois.
Chaque samedi, Zhuo Fan déployait toutes sortes de stratagèmes pour « croiser par hasard » Xiao Han lors de la livraison des fleurs. Il se surprenait à spéculer sur le moment où Xiao Han finirait par lui faire officiellement sa déclaration. Dans son imagination débordante, il était convaincu que cela se passerait un matin ensoleillé, juste après une averse. Un arc-en-ciel illuminerait les nuages, et Xiao Han frapperait à sa porte, tenant un gigantesque bouquet de roses. Avec un sourire tendre, il lui dirait doucement : « Zhuo Xiao Fan, je t’aime. »
Zhuo Fan rêvait de ce moment tous les jours, l’attendant avec une impatience croissante. Hélas, Xiao Han semblait complètement ignorer ce qu’il était censé faire. Il se contentait de déposer les fleurs et repartait rapidement, comme si de rien n’était.
Finalement, un samedi, Zhuo Fan ne put plus se contenir. Il arrêta Xiao Han juste avant qu’il ne parte. Avec une voix glaciale, il lui demanda : « Hé, qu’est-ce que ça veut dire, ces fleurs que tu laisses chaque semaine ? Tu te rends compte que ça me cause beaucoup de problèmes ? »
Xiao Han le regarda, un sourcil levé, manifestement perplexe. « … Quoi ? »
Voyant qu’il continuait à faire semblant, Zhuo Fan sentit la frustration monter en lui. Il désigna les fleurs d’un geste irrité : « Reprends-les, je n’en veux pas ! »
Ramassant les fleurs, il les jeta avec force dans les bras de Xiao Han, puis tourna les talons et s’élança vers un coin du couloir.
En réalité, il ne s’éloigna pas beaucoup, de peur que Xiao Han ne le trouve pas s’il décidait de le poursuivre. Caché dans un recoin, il tendit l’oreille, espérant entendre des bruits de pas. Comme un véritable tsundere, pensa-t-il, si tu me poursuis tout de suite et que tu t’excuses en me faisant des aveux, je te pardonnerai à contrecœur.
Cependant, après une longue attente, personne ne vint. Déçu et maussade, il risqua un coup d’œil furtif hors de sa cachette.
Xiao Han se tenait toujours là. Mais à cet instant, la porte du dortoir s’ouvrit à nouveau. Wu Gu, l’un des camarades de Zhuo Fan, bâilla et lui jeta un regard perplexe.
« Qu’est-ce que c’est ? » demanda-t-il, l’air endormi.
Xiao Han se tourna vers lui, visiblement indifférent. « Puis-je vous demander, êtes-vous Wu Gu ? »
« Oui, pourquoi ? » répondit Wu Gu.
Sans un mot de plus, Xiao Han tendit le bouquet, son expression toujours impassible. « Je fais des livraisons express. Vos fleurs ont été endommagées par un idiot, je vous prie de m’excuser pour l’incident. »
Wu Gu resta sans voix.
Zhuo Fan, lui, sentit son cerveau se déconnecter.
Il regarda, stupéfait, Xiao Han tourner les talons et quitter le dortoir d’un pas rapide. Quelques secondes plus tard, Xiao Han enfourchait un petit vélo électrique, filant à toute vitesse pour livrer ses autres colis. Il n’eut même pas un regard en arrière. C’était juste un travail à temps partiel pour lui, et il devait encore retourner à son université pour assister aux cours l’après-midi. Il était manifestement un gars très occupé.
Et ainsi, plus rien ne se passa.
Zhuo Fan, lui, sombra dans un tourbillon de pensées chaotiques. Il était tombé amoureux avant même que ce premier amour ne commence réellement. La honte et la colère le submergeaient. Il se sentait ridiculisé, trompé, humilié. Le monde entier semblait conspirer pour se moquer de lui. Et ce salaud qui avait envoyé les fleurs ! Pourquoi diable les fleurs étaient-elles pour Wu Gu ?! Elles étaient clairement destinées à lui !
Il sentit une vague de malice émaner de l’univers tout entier.
Zhuo Fan avait besoin d’un exutoire. Il devait se venger. Il voulait que Xiao Han et cet idiot qui avait envoyé les fleurs regrettent amèrement leurs actions.
Ricanant d’un air mauvais, il retourna dans sa chambre. Prenant un ton désinvolte, il demanda à son compagnon de dortoir : « Qui t’a envoyé ces fleurs, au fait ? »
« Oh, c’est mon petit ami, Wen Muyan, » marmonna Wu Gu avant de se retourner pour se rendormir, totalement indifférent.
Le visage de Zhuo Fan se déforma sous l’effet d’une rage silencieuse. Il alluma son ordinateur, un plan sournois déjà en tête. En ouvrant un dossier intitulé « Synopsis de l’intrigue », il tapa frénétiquement les noms du « top salaud » et du « top chair à canon ». Cependant, dans sa hâte et son excitation, il ne remarqua pas qu’il avait mal orthographié « Wen Muyan » dans l’interface de saisie Sougou…
(NT : le 1er s’écrit 温暮言 et veut dire douces paroles du crépuscule et le 2è 温慕言, et veut dire les paroles d'amour douces. Le Mù se prononce pareil mais s’écrit différemment)
On dit qu'à chaque fleur correspond un monde, et chaque fois qu'un script complet voit le jour, un monde parallèle naît également.
Xiao Han et Wen Muyan se retrouvèrent aspirés dans ces univers créés par l’étrange imagination de Zhuo Fan. Ils ne comprirent probablement jamais comment ils avaient transmigré. Mais cela n’empêcha en rien leur bonheur éternel.
La seule chose inhabituelle était qu’à chaque fois qu’ils en reparlaient, Wen Muyan ressentait une légère douleur inexplicable au genou.
Ainsi, tout avait commencé par une histoire triste. Surtout pour Wen Muyan, qui nourrissait une haine inexplicable pour l’interface Sougou.
Lorsque Zhuo Fan « ascensionna » ce jour-là, personne ne sembla surpris. Le monde entier trouva une explication rationnelle à cet événement étrange et agit comme si cette personne n’avait jamais existé.
Le prêtre resta sur scène pour célébrer le mariage, les amis et la famille continuèrent à applaudir ; seul le marié... avait changé.
Grâce à cet incident, Wen Muyan et Xiao Han sortirent ouvertement du placard de manière éclatante.
Bien sûr, des voix critiques s’ élevèrent de divers horizons de la société . Mais, du point de vue de ces deux-là, pourquoi s’embarrasser de préoccupations aussi insignifiantes ?
Après le mariage, Xiao Han reprit ses fonctions de président de sa société de divertissement. Bien qu’il fût accaparé par son travail, il saisit l’occasion offerte par le scénario et s’appuya sur le talentueux et fidèle Xian Fu. Grâce à eux, son entreprise prospéra.
Quant à Wen Muyan, il s’imposa dans l’industrie du divertissement. Mis à part la controverse déclenchée par son coming-out, ses talents d’acteur étaient indéniable et conquirent tous les critiques, et personne ne trouva rien à redire. Cependant, chaque fois qu’on le complimentait, Wen Muyan se sentait légèrement désemparé. Après tout, il avait été un homme qui avait toujours joué un rôle dans sa vie.
Un soir, en rentrant du travail, Xiao Han trouva la célèbre star de cinéma, prétendument débordée, en train de jouer sur son ordinateur portable, affalée sur le canapé.
« Tu es en grève ? » lança Xiao Han en retirant son manteau qu’il jeta sur le canapé. Il observa son compagnon, absorbé dans son jeu.
« Mon contrat arrive à expiration, je ne veux pas le renouveler. » Wen Muyan leva les yeux, retira ses écouteurs et posa sa souris. Puis, avec un sourire, il passa ses bras autour du cou de Xiao Han et l’embrassa.
À cet instant précis, un cri désespéré retentit dans les écouteurs. « Infirmière ! Soignez-moi ! Pourquoi vous ne me guérissez plus ?! Je vais mourir ! Dépêchez-vous ! Hé, vous êtes encore en vie ?!»
Xiao Han regarda l’écran d’un air amusé et lui rappela doucement : « Ton coéquipier a l’air d’être sur le point de mourir. »
« Ce type m’a volé mon équipement, je ne vais pas le soigner. En plus, je suis médecin, pas infirmière. » Wen Muyan accrocha ses écouteurs autour de son cou en reniflant, prenant son temps pour soigner les autres joueurs et lui-même, tout en ignorant délibérément l’énergumène râleur.
« Tu ne vas rien dire ? » demanda Xiao Han en le regardant avec curiosité.
L’équipe de Wen Muyan termina l’instance. À peine sorti du donjon, il remarqua que le joueur grande gueule avait quitté l’équipe et s’était même mis à l’insulter. Sans un mot, il changea d’équipement et se précipita pour l’attaquer.
Serrant Wen Muyan dans ses bras, Xiao Han s’assit à ses côtés sur le canapé. Il déclara calmement :
« Si tu ne veux pas renouveler ton contrat, alors ne le fais pas. Je prendrai soin de toi. »
« Qui te demande de faire ça ? » rétorqua Wen Muyan en le fusillant du regard. « Ne me dis pas que tu veux me recruter dans ton entreprise ? »
« Comment pourrais-je faire ça ? » répondit Xiao Han avec sérieux. « Comme on dit, ne chiez pas là où vous mangez. Je suis un homme de principes. »
Cependant, lorsque Xiao Han constata qu’ils mangeaient des épinards pour le dîner, il ressentit un vif sentiment de frustration.
Après avoir rejoint la société M, Xiao Han établit un emploi du temps très détendu pour Wen Muyan, trouvant toutes sortes de prétextes pour justifier cette décision. Ils passèrent leurs journées dans une tranquillité apparente, mais durant cette période, Wen Muyan développa une passion dévorante pour League of Legends. Chaque soir, quand Xiao Han rentrait et ouvrait la porte du bureau, il voyait Wen Muyan absorbé par le jeu.
Xiao Han esquissa un sourire énigmatique et, le lendemain, ramena un Samoyède à la maison. Il le nomma Lulu. Chaque jour, il le portait et déambulait devant Wen Muyan, le câlinant et l’embrassant ostensiblement, tout en ignorant délibérément ce dernier.
Face à cette provocation, Wen Muyan se mit en colère. Profitant de l’absence de Xiao Han, parti travailler, il rasa le corps de Lulu, avant de lui donner un petit coup de pied pour l’éloigner. Puis, il sortit une paire d’oreilles et une queue moelleuses qu’il avait achetées en secret, les enfila, et ignora le pauvre Lulu qui gémissait dans un coin.
Lorsque Xiao Han rentra ce soir-là, la première chose qu’il vit fut Wen Muyan, allongé sur le canapé, affublé d’une paire d’oreilles et d’une queue duveteuses. Voyant Xiao Han arriver, Wen Muyan s’écria joyeusement, d’une voix à la fois innocente et timide : « Ouah ! »
Xiao Han faillit se faire pipi dessus, effrayé par la scène.
Après l’arrivée du Samoyède, Wen Muyan perdit tout intérêt pour League of Legends. Malheureusement, Xiao Han, qui se retrouvait désormais en congé et désœuvré, devint à son tour accro aux jeux en ligne.
Encore plus tragique, malgré son génie dans la gestion d’entreprises, la direction d’un pays, ou même le commandement de la mafia, Xiao Han se révéla être un parfait imbécile dans l’univers des jeux vidéo. Son talent dans ce domaine était aussi limité que son intégrité morale.
Un jour, Xiao Han demanda à Wen Muyan de l’entraîner pour améliorer ses compétences.
« Hé, pourquoi mon DPS (NT: dégâts par seconde) est-il toujours le plus bas ? » se plaignit-il en fixant les statistiques affichées à l’écran avec une profonde désapprobation.
Wen Muyan leva les yeux au ciel et entreprit de lui expliquer patiemment les mécanismes du jeu. Armé de ces précieuses informations, Xiao Han tapa fièrement sur sa poitrine et déclara :
« J’ai compris ! »
Quelques minutes plus tard, Xiao Han éclata de rire :
« Hahahaha ! Je suis au-dessus de lui maintenant ! » Il lança un regard satisfait à Wen Muyan avant d’écrire dans le chat de groupe : « Ton DPS est plus bas que le mien ! »
Surpris, Wen Muyan se pencha pour vérifier. Puis, avec un soupir d’impuissance, il répondit :
« Frère, c’est le tank principal… » (NT : un champion spécialisé dans l’absorption de dégâts).
Xiao Han, incrédule, insista : « Redis-moi comment améliorer mon DPS, je dois avoir raté quelque chose. »
À bout de patience, Wen Muyan explosa : « Si je dois encore t’expliquer, espèce d’idiot, je vais manger de la merde ! »
Xiao Han le fixa sans expression pendant quelques secondes avant de murmurer faiblement :
« Docteur, je crois que mon QI peut encore être sauvé… »
Au moment où ils terminèrent enfin l’instance, Wen Muyan avait avalé un véritable tas de merde.
La vie, pourtant, suivait son cours, et le script continuait d’être écrit. Cependant, les récits de Xiao Han et de Wen Muyan étaient désormais entièrement sous leur contrôle.
Quant à Zhuo Fan, franchement, qui s’en souciait ?
Tapi dans un avion, il rumina encore sa vengeance. Qui serait sa prochaine cible ? Avec ses yeux vides et son cœur réduit en cendres, il fixait son entourage. Puis, soudain, il dévoila un sourire tordu.
Fin
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Note de l’auteur :
Ne doutez de rien, le chapitre précédent était bel et bien la fin. Cet extra n’est qu’un supplément, et, puisque ce roman est écrit comme une parodie, il est évident qu’il ne pouvait pas se terminer de manière conventionnelle ╮(╯▽╰)╭. Vous voulez une fin correcte ? Demandez à Zhuo Fanfan, il saura vous satisfaire !
Quant à Xiao Han (Top) et Wen Muyan (Bottom), ils n’ont pas retransmigré. Et pour leurs identités antérieures, eh bien, ce n’est pas vraiment important.
Ah, quelqu’un a demandé ce qu’était exactement le « script ». En réalité, le scénariste, c’était Zhuo Fanfan lui-même. Tout le monde, soyez indulgent ! Il n’y a plus rien d’autre à raconter après cela. Le couple vivra simplement une vie heureuse ensemble.
Traducteur: Darkia1030
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