HSAV - Chapitre 87 - A-Yan se sentait extrêmement lésé.
On ne savait combien de temps s’écoula, mais après un moment, l’homme sur le lit bougea enfin.
Xiao YuAn endura la douleur, se rhabilla lentement et réajusta ses vêtements. Il soutint son corps, puis se rallongea sur le lit. Le tissu blanc enroulé autour de son bras était à présent imbibé de sang, et la blessure le lançait douloureusement. Dès que le sang sécha, le tissu se colla à la plaie, et Xiao YuAn hésita à l’enlever. Finalement, il l’ignora simplement, ne s’en souciant plus. Il demeurait dans un état second.
Tout lui faisait mal. Sa tête, ses mains, son foie, sa rate, ses poumons, ses reins, son estomac, son cœur. C’était une douleur généralisée.
Xiao YuAn se recroquevilla et serra sa tête entre ses mains, du moins avec celle qui n’était pas blessée. Il voulut réfléchir à l’avenir, mais il ne put s’empêcher de jurer intérieurement.
Avant de transmigrer, il était encore un jeune président d’entreprise magnifique, prometteur. Et voilà qu’il n’avait même pas eu le temps de voir naître une société modérément prospère sous tous rapports, ni de regarder la finale du journal télévisé. Il n’avait pas non plus eu l’occasion de voir l’équipe nationale de football remporter la Coupe du monde, ni d’assister à un effondrement quantique avant de contracter une maladie en phase terminale.
Eh bien, ce n’était pas tous les jours qu’on se retrouvait projeté dans un roman qu’on venait à peine de finir. En tout cas, il ne s’était pas contenté de rouler des yeux en ignorant ce qui se passait autour de lui.
Puis, pour survivre, il avait désespérément tenté de nouer de bonnes relations.
Et à présent, le protagoniste masculin ne voulait plus le voir vivant.
Le protagoniste voulait le castrer !!!
Xiao YuAn pensait, à l’origine, que se faire découper vivant par le protagoniste constituait la pire fin imaginable dans ce livre. C’est pourquoi il avait décidé de briser un pot déjà fêlé, et de forcer l’intrigue à évoluer en sa faveur.
Il ne s’attendait pas à ce que les choses puissent empirer encore davantage !!!
Xiao YuAn avait lu le roman original. Il savait à quel point Yan HeQing pouvait faire preuve de tolérance, mais aussi combien il haïssait le Royaume du Nord. Il n’aurait jamais cru que Yan HeQing puisse dissimuler une haine aussi profonde alors même qu’il se tenait à ses côtés.
En vérité, lorsque Xiao YuAn lui avait proposé de l’emmener au palais Jing Yang, Yan HeQing avait déjà enfoui sa rancune au plus profond de son cœur, n’est-ce pas ? Croyait-il réellement que Xiao YuAn cherchait à l’humilier en le transformant en concubin mâle ?
On pouvait se dire qu’après avoir été castré, il pourrait malgré tout rester en vie, réduit à un humble serviteur sous l’autorité du protagoniste, quelque part dans l’enceinte du palais impérial. Exactement comme lui avait jadis fait de Yan HeQing son garde du corps impérial.
Quoi qu’il en soit, Xiao YuAn ne savait même plus ce qu’il voulait vraiment.
Jamais il n’aurait imaginé que toutes ses bonnes intentions seraient, au final, rejetées par Yan HeQing. Ce rejet, cette frustration profonde, hantait Xiao YuAn. Il réprima l’amertume qui montait dans sa poitrine et se redressa pour se verser un peu d’eau. Alors qu’il venait de remplir une tasse en porcelaine, la porte de la chambre s’ouvrit brusquement. Xiao YuAn leva les yeux, sa main trembla, et la tasse tomba au sol, se brisant en morceaux.
Eh bien, il semblait qu’il ne boirait pas d’eau aujourd’hui.
Xiao YuAn détourna le regard et s’appuya sur la table, tentant de ramasser les éclats de porcelaine. Mais l’un des fragments lui entailla la main. Le sang écarlate vint tacher la porcelaine brisée, et l’un des éclats resta fiché au bout de son doigt, lui arrachant un sursaut.
Les pas de l’homme résonnèrent soudain en se rapprochant précipitamment, mais Xiao YuAn ne sembla pas entendre. Il se releva lentement, observa le bout de son doigt, les yeux vides. La seule chose qu’il ressentait, c’était la mer sombre et houleuse qui grondait en lui, le submergeant, l’empêchant de respirer.
Quand il considérait sa situation, c’était réellement humiliant. Il n’avait pas été capable de protéger sa propre mère, ni de guérir son jeune frère, ni de défendre le Royaume du Nord. Hong Xiu était morte à cause de lui. Li Wuding avait perdu la vie à cause de lui. Malgré tous ses efforts, il demeurait impuissant, incapable d’accomplir quoi que ce soit. Il ne pouvait sauver personne.
Il n’arrivait même plus à penser.
Xiao YuAn tendit la main et retira le fragment de porcelaine du bout de son doigt, puis dit à Yan HeQing : « Yan HeQing, tue-moi maintenant. C'est vraiment fastidieux. »
Yan HeQing s’arrêta devant lui, l’amertume lui montant aux lèvres, saturant sa langue. Il plongea son regard dans celui de Xiao YuAn. Ces yeux qui, autrefois, brillaient de chaleur et de sourire, paraissaient désormais éteints, tels un feu consumé, froid et solitaire.
Il n’avait pas vu le sourire de Xiao YuAn depuis si longtemps. Ce sourire lui manquait à en devenir fou ; pourtant, il ne se sentait plus digne de s’agenouiller devant lui pour le supplier de sourire à nouveau.
« Tu n’as pas à faire ça… » dit Yan HeQing d’une voix rauque, les yeux baissés. « Tu peux rester en vie, rester avec moi, je… »
Xiao YuAn éclata soudainement de rire. Ce rire coupa court aux paroles de Yan HeQing, chargé d’un sarcasme amer.
Comme il s’y attendait, il ne s’était pas trompé. Yan HeQing désirait rendre au centuple l’humiliation d’avoir été réduit à un concubin masculin et un garde du corps impérial.
Xiao YuAn insista : « Il vaudrait mieux me tuer maintenant. »
Yan HeQing ferma les yeux, accablé par un chagrin profond. Xiao YuAn préférait donc mourir plutôt que de rester à ses côtés ?
Mais… ne s’y attendait-il pas déjà ? La dernière chose que Xiao YuAn voulait voir à cet instant, c’était lui-même. Il pouvait déjà prédire que Xiao YuAn le haïrait, le mépriserait, et ne l’aimerait plus.
Mais ne méritait-il pas tout cela ?
Le silence les enveloppa tous deux pendant un long moment. Une pensée semblait résonner dans l’esprit de chacun :
Comment en était-on arrivé là ?
Yan HeQing inspira profondément, ouvrit lentement les yeux et déclara : « L’eunuque Zhao est mort. »
Les épaules de Xiao YuAn frémirent.
« La princesse Yongning est saine et sauve, ne t’inquiète pas. Je m’en vais maintenant… Tu… repose-toi bien. »
Les yeux de Yan HeQing s’attardèrent un instant sur la blessure au bras de Xiao YuAn. Il se retint de tendre la main, puis se détourna.
Voyant Yan HeQing partir, Xiao YuAn serra les poings, puis alla à nouveau se verser de l’eau.
Il s’avérait que, tout comme dans le livre original, l’eunuque Zhao mourut finalement. Yan HeQing ne manifesta aucune pitié, même face à ses blessures auto-infligées.
Cette fois, Xiao YuAn but enfin dans la tasse en porcelaine qu’il venait de remplir.
Cependant, l’eau avait un goût salé.
Traducteur: Darkia1030
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