HSAV - Chapitre77 - Alors que le vent souffle, tout le pays est brisé.

 

Le grenier du royaume du Sud de Yan fut complètement incendié, offrant aux soldats exténués du Royaume du Nord une brève occasion de reprendre leur souffle.
Durant les trois jours suivants, tous les soldats du Royaume du Nord défendant la ville frontalière portèrent le deuil, comme s’ils s’apprêtaient à se fondre dans la neige.

Trois autres jours s’écoulèrent avant que la nouvelle de la guerre n’atteignît le Palais Impérial.

Le ministre, tremblant, présenta le rapport : « Votre Majesté, le général Xie a réussi à envoyer les rations militaires à la frontière, mais le général Li, il… Il… »

Avant même que les paroles du ministre ne soient achevées, une douleur aiguë transperça soudain la poitrine de Xiao YuAn, le faisant froncer les sourcils tandis qu’il peinait à respirer. Il serra sa poitrine au niveau du cœur, tandis que résonnait en lui cette voix froide, énumérant tous ses efforts vains pour changer le destin du Royaume du Nord. C’était aussi la voix annonçant sa chute.

« Votre, Votre Majesté… Général Li, il… »

Xiao YuAn ferma les yeux avec lassitude. Le ministre n’eut pas besoin de terminer : il avait déjà compris ce qu’il allait dire.

Li Wuding s’était rebellé.

« Le général Li… conduisit trois mille soldats d’élite pour s’infiltrer dans la caserne ennemie, tentant de voler leur grenier, mais… Mais… ils tombèrent dans une embuscade. Toute l’armée fut anéantie… Aucun, aucun d’entre eux ne survécut. »

Xiao YuAn rouvrit brusquement les yeux et se redressa d’un bond. Sa respiration devint haletante, ses lèvres pâlirent et tremblèrent : « Vous… Qu’avez-vous dit… Qu… »

Mais avant qu’il ne pût terminer sa phrase, il se mit soudain à cracher violemment du sang, un flot rouge s’écoulant de sa bouche et se répandant sur le sol. Cette scène glaça les cœurs et choqua les regards.

« Votre Majesté !!! » s’écrièrent plusieurs personnes autour de lui, affolées.

Xiao YuAn porta la main à sa bouche en sang, ses oreilles bourdonnaient, sa tête semblait prête à exploser. Il ne parvint plus à entendre quoi que ce soit, comme si une immense pesanteur s’était abattue sur son cœur, paralysant son corps tout entier.

Comment cela avait-il pu arriver ?

Li Wuding n’était-il pas le second rôle masculin ?

Comment avait-il pu mourir ainsi ?

Pourquoi n’y avait-il pas eu de trahison ? Pourquoi avaient-ils tous péri sur le champ de bataille, sans retour ?

Soudain, les yeux de Xiao YuAn se remplirent de l’image de Hong Xiu.
Elle se tenait devant la fenêtre, les fleurs de poirier tombant silencieusement comme de la neige. Elle tourna la tête vers lui et sourit doucement : « Votre Majesté. »

Xiao YuAn fit un pas en arrière et leva les yeux à nouveau, emplis d’impuissance et de désespoir.

Avait-il vraiment changé quelque chose ? Comme la mort de Hong Xiu ?
Pourquoi ? Pourquoi tout se déroulait-il ainsi ? Il ne cherchait qu’à protéger le Royaume du Nord, alors pourquoi d’autres devaient-ils mourir à chaque fois ?

Un sifflement aigu explosa dans son esprit, semblable à un rire maléfique qui se moquait de son impuissance et lui rappelait qu’il portait encore trois mille vies sur ses épaules.

Après plusieurs jours d’épuisement et de chocs successifs, Xiao YuAn ne parvint plus à tenir. Une obscurité pesante l’envahit tandis qu’il s’effondrait lentement au sol.

*

Lorsque Xiao YuAn reprit connaissance, il aperçut immédiatement la princesse Yongning assise au bord du lit, les yeux rouges d’avoir pleuré. Lorsqu’elle vit qu’il était enfin réveillé, elle s’écria en sanglotant, affolée : « Frère Impérial, comment te sens-tu ? Est-ce que tu vas bien ? »

Xiao YuAn tendit la main et caressa doucement ses cheveux : « Je vais bien, ne t’inquiète pas. »

La princesse Yongning baissa la tête, frotta les coins de ses yeux et manqua de fondre en larmes une fois de plus.

« Ning'er, peux-tu me promettre quelque chose ? » Xiao YuAn se redressa pour s’asseoir sur le lit.
La princesse Yongning leva la tête : « Yongning promet, tant que frère Impérial ira bien, Yongning acceptera tout. »
Xiao YuAn sourit, les yeux soudain embués de larmes : « Peu importe ce qui arrivera après aujourd’hui, tu dois vivre. Ne cherche jamais la mort, tu m’entends ? »
La princesse Yongning parut troublée, mais elle hocha la tête avec gravité, l’expression solennelle.

Xiao YuAn pressa sa main contre sa poitrine, où battait encore une vive douleur, et demanda : « Comment est la ligne de front ? »
« En réponse à Sa Majesté », répondit aussitôt un ministre à son chevet. « Le général adjoint Xie reprit la position du général Li, il réorganisa les troupes et transfère actuellement des unités pour se venger. »
Xiao YuAn poussa un léger "hmmm", s’adossa au lit, les épaules affaissées, les lèvres à peine entrouvertes, le regard vidé. Il semblait plongé dans ses pensées. Après un long silence, il reprit la parole : « Je veux… aller à l’autel des sacrifices, au Temple du Ciel. »

Le sacrifice du Royaume du Nord exigeait normalement des moutons et des porcs vivants.
En entendant cela, le ministre répondit : « Cet humble serviteur ira tout préparer. »
Xiao YuAn déclara : « Non, nul besoin de préparer quoi que ce soit. Trois bâtons d’encens suffiront. Je n’offre pas ce sacrifice au Ciel. »

Le ministre resta un instant figé, surpris. Puis, revenu à lui, il partit organiser le déplacement.

Plus tard, au crépuscule, malgré son inconfort persistant, Xiao YuAn se rendit à l’autel du Temple du Ciel, à l’extérieur de la Cité Impériale.

Ironiquement, la dernière fois qu’il était venu ici, Yan HeQing l’accompagnait. C’étaient ces mêmes quatre-vingt-dix-neuf marches, et le coucher du soleil baignait à nouveau le monde dans une lueur rouge sang.
C’était il y a quelques mois à peine, mais pour lui, une vie entière semblait s’être écoulée depuis.

Xiao YuAn s’agenouilla devant l’autel du Temple du Ciel. Le vent et la neige hurlaient, et le froid le transperçait jusqu’aux os. Tenant trois bâtons d’encens, il inspira profondément l’air glacial en se prosternant.

Après avoir accompli les rites un moment, il leva les yeux. Tout son corps tremblait, et les larmes coulaient sans retenue. De minces flocons de neige tombaient sur lui, et pourtant, même ce poids infime paraissait l’écraser.
Le vent rugissait, semblable aux cris étouffés de trois mille fantômes en colère. Ces voix lugubres tourbillonnaient au-dessus de sa tête, lui demandant pourquoi il avait laissé partir Yan HeQing, sacrifiant ainsi la sécurité du Royaume du Nord.

Il murmura, d’une voix étouffée par la faiblesse : « J’ai vraiment fait de mon mieux… Je suis désolé… Je suis désolé… »

*

En janvier, la neige apporta un grand front froid.
Xie Chungui mena l’armée et se battit désespérément pendant deux mois entiers.
Cependant, à la fin, il fut vaincu malgré tous ses efforts.

Le Royaume du Nord ne parvint pas à restaurer sa puissance.

Et, deux jours plus tard, des dizaines de milliers de chevaux et de soldats firent irruption à travers les murs de la ville.

 

Traducteur: Darkia1030