Green Plum island - Chapitre 36 – Trop stimulant

 

Je posai instinctivement une main sur la poitrine de Yan Kongshan, ce qui sembla lui faire croire que j’essayais de le repousser. Sa large main attrapa le bout de mes doigts et, alors que notre baiser s’approfondissait, sa prise se resserra.

Considérant que je venais de lui dire ce matin que je trouvais ses baisers satisfaisants et qu’il pouvait m’embrasser comme il le voulait, avec autant de force qu’il le désirait, si je le repoussais après tout cela, cela me ferait paraître stupide et sans parole.

Sans oublier que, même si manquer d’oxygène vers la fin d’un baiser n’était pas des plus agréables, j’aimais toujours quand il m’embrassait. La sensation d’adrénaline déferlant dans mon corps, le réchauffant, l’engourdissant, me donnant l’impression de flotter dans les nuages ; c’était une sensation extraordinaire.

Au début, je crus que la journée allait ressembler à hier, que le baiser finirait quand je ne pourrais plus respirer et que je ne serais plus qu’une bouillie cérébrale. Mais Yan Kongshan changea la donne contre toutes mes attentes. Il lâcha mes lèvres et déposa des baisers sur mon cou.

Les baisers dérivèrent de mon lobe d’oreille jusqu’aux creux de mes clavicules, pétillant d’électricité. Chacun de ses baisers me fit frissonner. Il poursuivit vers le bas, puis devint rapidement gêné par l’encolure de mon t-shirt. Insatisfait, il me pinça l’épaule. Cette action inattendue me fit frissonner et je laissai échapper un cri surpris. Je ne savais pas qu’il était possible de ressentir des sensations aussi vertigineuses et saisissantes sans que quelque chose me couvre la bouche.

Avant que je ne m’en rendisse compte, j’étais allongé à plat sur le tapis moelleux. Ces instants magnifiaient le corps sublime de Yan Kongshan ; dès qu’il s’appuya sur moi, il se dressa au-dessus de moi tel une montagne bloquant le soleil et le ciel, emprisonnant tout mon corps sous le sien.

Je devins alors un peu comme une antilope agonisante. Le prédateur me retenait, mais ne me tuait pas. Au lieu de cela, il prenait une bouchée ici, un peu là, comme s’il savourait le tremblement incontrôlable de mon corps, ma dernière lutte avant la mort inévitable.

C’était bien plus effrayant qu’hier…

Alors que je songeais à cela, Yan Kongshan mordilla ma pomme d’Adam, comme s’il avait décidé de me dévorer à partir de là. Je remarquai cependant que son indice d’humeur était effectivement introuvable. Si demain il réapparaissait à peu près à la même heure, alors je pourrais conclure qu’un baiser le faisait disparaître temporairement. Ce qui me fit me demander, si embrasser le faisait disparaître pendant vingt-quatre heures, est-ce qu’une action plus intime le ferait disparaître plus longtemps ? Existerait-il un moyen de le faire disparaître à jamais ?

Je sentis soudain un doigt rude caresser ma lèvre inférieure. Yan Kongshan s’était redressé et me regardait, sans paraître très amusé. « Qu’est-ce que tu regardes ? »

J’eus l’impression d’être réprimandé par le délégué de classe à l’école, surpris en train d’utiliser mon téléphone. Un tremblement me parcourut et je répondis avec appréhension, « P-Pas grand-chose… »

L’humidité de ma bouche entra en contact avec son doigt quand je parlai. Il fit une grimace, semblant ne pas aimer cette sensation. Ses yeux s’assombrirent et il bougea sa main pour la poser sur le sol. « As-tu peur maintenant ? »

Je secouai la tête en silence.

Il leva sa main et effleura le dos de mon cou jusqu’à l’endroit où il rencontrait mon épaule. Lorsque ses ongles grattèrent cette zone, un picotement de douleur me traversa. Je ne me souvenais plus s’il m’avait mordu là ou non. Si oui, cela avait probablement laissé une marque.

« Tu trembles », observa Yan Kongshan tel un détective, ne négligeant aucun détail, comme si son seul but était de me dénoncer pour avoir menti. « Si tu n’as pas peur, pourquoi trembles-tu ? »

« Ce n’est pas de la peur. » Je tins sa main immobile, mon pouce effleurant légèrement le dos de sa main. « Ça chatouille. »

Ou peut-être qu’il y avait un peu de peur là-dedans. J’avais vraiment peur qu’il me dévore. Rien que ses yeux me donnaient l’impression qu’il voulait m’arracher les os un par un et me savourer entièrement. S’il n’avait pas été Yan Kongshan, j’aurais été suffisamment terrifié pour fuir, mais il était Yan Kongshan, alors je ne le fis pas.

Il me fixa longuement, puis se redressa brusquement et se détacha entièrement de mon corps. « Il est tard, tu devrais retourner dormir. »

C’était fini ?

Je poussai un soupir à mi-chemin entre la déception et le soulagement, puis me relevai du sol, seulement pour découvrir qu’une certaine zone de mon corps était impatiente et prête à partir, perçant presque à travers mon pantalon. Elle n’avait réussi à rester cachée tout ce temps qu’à cause du t-shirt surdimensionné que je portais.

Tout à coup, une rougeur se répandit sur toute la moitié supérieure de mon corps. S’en était-il rendu compte ?

Je lui jetai un coup d’œil furtif. Apparemment, il ne faisait pas mieux que moi.
En ce qui concernait les hommes, parfois le radar de Sun Rui n’était pas aussi précis. Mais quand il s’agissait de leurs régions inférieures, c’était sûr qu’il ne se trompait pas.
C’était certainement une grosse taille...

« Attention où tu regardes. »

Je sursautai et levai les yeux vers Yan Kongshan. Il ne semblait nullement vouloir cacher sa réaction biologique et s’assit calmement, jambes croisées, comme s’il attendait que cette réaction disparaisse naturellement, ce qui me fit me sentir inférieur en revanche.

Je me grattai le nez. « Euh, je voulais te dire, à propos du carillon éolien, je l’ai cassé. Je suis désolé, je vais t’en acheter un en remplacement. »

« Ce n’est pas nécessaire. »

Surpris, je le regardai. « Hein ? »

Il ramassa la télécommande du téléviseur au sol et appuya sur les boutons avec assurance, comme s’il n’y avait personne d’autre autour de lui. Un programme de variétés s’afficha sur l’écran.

« J’ai dit, ce n’est pas nécessaire. » Toute son attention était tournée vers la télévision ; la manière nonchalante dont il répondit donnait l’impression qu’il ne se souciait pas du tout de ce qui était arrivé au carillon éolien.

Je l’observai attentivement, m’assurant qu’il s’en fichait vraiment, refusant de partir tant que je n’en étais pas absolument certain.

Je fredonnai une mélodie en rentrant chez moi, et une fois là-bas, j’aperçus grand-père montant les escaliers avec sa tasse de thé à la main, se préparant à aller se coucher après avoir terminé son épisode télévisé.

Il m’appela en me voyant, puis soudain, ses yeux se posèrent sur le suçon sur mon cou et il laissa échapper un « aiyou » tranquille.

« Mian Mian, qu’est-il arrivé à ton cou ? As-tu été mordu par quelque chose ? Pourquoi est-il si rouge ? »

Immédiatement, je plaquai une main sur mon cou, si nerveux que tous mes cheveux se dressèrent d’alarme. « Je ne sais pas, mm-peut-être que c’était un moustique maléfique. »

« C’est un moustique toxique », répondit grand-père, ne doutant pas du tout de mes paroles. « Il y a du baume du tigre sur la table basse, assures-toi d’en mettre. »

Je répondis, « J’ai compris », hochant rapidement la tête tout en couvrant toujours mon cou. « Grand-père, tu devrais aller te coucher. »

Il marmonna quelque chose à propos de pulvériser de l’anti-moustique dans la cour demain et monta les escaliers. Je ne baissai pas la main tant que je ne le vis plus, puis je fonçai directement dans la salle de bain pour m’inspecter.

Un suçon rouge foncé meurtrissait la peau où mon cou et mon épaule se rencontraient, des marques de dents indistinctes légèrement visibles. Il ne semblait pas que cela pût disparaître en quelques jours.

Heureusement que grand-père était âgé, qu’il n’avait pas une si bonne vue et qu’il était assez simple d’esprit. Sinon, ce drame romantique séduisant se serait vite transformé en drame familial.

Le lendemain matin, quand je sortis du lit, je vérifiai à nouveau le suçon. Les marques de dents n’étaient plus visibles, mais la rougeur persistait. Je trouvai un pansement et le recouvris. Tant que je ne baissais pas le col de ma chemise, cela ne devrait pas être trop perceptible.

Dans la voiture, Yan Kongshan ne remarqua pas — ou fit semblant de ne pas remarquer — le bandage sur mon cou. Il semblait y avoir deux côtés en lui ; brûlant de passion la nuit, et cool et poli le jour. Même la conversation informelle qu’il avait l’habitude d’engager diminua.

Merde, si je l’embrassais, je ne voyais pas son indice d’humeur, mais si je ne l’embrassais pas, je voulais l’embrasser. Pourquoi la vie était-elle si dure ?

*

Lors de la cérémonie d'arrêt de la pluie, des documentaristes étrangers étaient présents pour filmer le tout, et lorsqu'ils partirent, l'un des photographes conversa longuement avec Yan Kongshan ; il lui avait dit qu'il enverrait bientôt un petit cadeau par la poste.
Ce n'était qu'une conversation, mais un jour, le colis arriva. De celui-ci, Yan Kongshan sortit une photo montée dans un cadre en bois, le regard ébahi. Le cadre, en bois de noyer, était garni de lignes simples et dorées, lui conférant une belle impression de texture. Je me penchai curieusement, voulant voir de quoi il s’agissait, et je me figeai lorsque je baissai les yeux.

C’était une photo de Yan Kongshan et moi, le jour de la cérémonie d'arrêt de la pluie ; nous deux perchés sur la chaise à porteurs, moi tenant un éventail circulaire qui me cachait le visage, lui portant un masque et tenant le parapluie droit. La caméra focalisait sur nous, tandis que la foule autour était complètement floue. Nous étions assis au centre même du cadre — un plan idéal que seul un cinéaste aurait sans doute pu capturer.

« Ça ressemble beaucoup à une photo de mariage. »

Je sursautai, me demandant si j'avais accidentellement dit ce que je pensais à haute voix. Mais je repris vite mes esprits et réalisai que le commentaire venait de Xiao Tian.

« C'est le patron ? » Il reconnut immédiatement Yan Kongshan, puis me montra du doigt sur la photo. « Qui est-ce ? Quelle fille de famille est si jolie ? Patron, a-t-elle ému votre cœur ? »

N'ayant jamais vécu la cérémonie lui-même, Xiao Tian ne savait pas que la « fille » n'était pas forcément une fille.

« C'est moi, » dis-je en me montrant du doigt.

Xiao Tian fut si choqué qu’il sembla remettre en question sa foi dans les êtres humains.

« Professeur Xiao, permets-moi de te renseigner sur ce morceau d'histoire. » Je lui parlai de la cérémonie d'arrêt de la pluie, et aussi je ne pus m'empêcher de bavarder un peu sur ce qui était arrivé à la dernière fille du ciel.

Finalement, Yan Kongshan accrocha la photo sur un mur de la librairie — pas un mur particulièrement en vue, mais un mur adjacent à l’étagère « Folklore ». Les clients intéressés par le folklore pouvaient la trouver attrayante ; ils étaient invités à scruter la photo autant qu’ils voulaient.

Habituellement, lorsqu'il n'y avait pas beaucoup de visiteurs dans le magasin, nous déjeunions ensemble, mais s’il y avait du monde, nous mangions à tour de rôle. Ce jour-là se trouva être un peu plus chargé, alors pendant que Xiao Tian gérait l’étage, Yan Kongshan et moi nous dirigeâmes vers la salle de pause pour manger un morceau.

Alors que nous étions sur le point de terminer notre repas, mon téléphone sonna soudainement. L'écran n'indiquait aucun nom d'appelant.

« Bonjour ? »

« Yu Mian, c’est moi. »

C'était Luo Feilang, qui m’appelait au hasard après une longue période de silence. Je jetai un coup d’œil à Yan Kongshan, puis pivotai pour que mon dos lui fasse face. Je chuchotai dans le récepteur : « Qu’est-ce que c’est ? »

« Dimanche, il y a un festival de musique sur la plage, tu veux venir ? » demanda-t-il de sa voix joyeuse.

Je n’eus même pas besoin d’y réfléchir avant de répondre : « Je ne suis pas fan de musique, donc probablement pas. »

« Tu ne me laisses aucune once d’espoir, hein ? » Il baissa considérablement la voix, puis continua : « En fait, je t’aime vraiment beaucoup. »

« Non merci. Dimanche prochain, mon père vient en visite, donc je ne serai pas libre. »

Il sembla penser que je cherchais une excuse. « Ton père ? Peu importe alors, une autre fois. » Juste avant que je ne raccroche, il ajouta soudain d’un ton cajoleur : « Au fait, as-tu le numéro de Yan Kongshan… »

Je le coupai en appuyant sur le bouton « raccrocher », puis ajoutai son numéro à ma liste de blocage.

« Était-ce Luo Feilang ? » demanda Yan Kongshan derrière moi, sa voix me donnant la chair de poule. « Tu lui parles encore ? »

Je ne savais pas pourquoi je me sentais coupable, mais c’était le cas. Je me sentais un peu comme un mari dont la femme aurait été surprise en train de parler à sa maîtresse. C’était une sensation effrayante et ébouriffante, bien trop stimulante.

« Non, c’était Sun Rui. »

Yan Kongshan se leva, rangeant sa nourriture finie. « Cela ressemblait à un homme pour moi, » commenta-t-il avec indifférence.

« Elle… » réfléchis-je pour trouver les mots justes. « Elle avait un rhume. »

Il leva un sourcil en me regardant avec amusement. « Un rhume ? Par ce temps ? »

« Trop d’air conditionné, je suppose. » Je lui adressai un sourire éclatant.

Son regard se dirigea vers le bas, s’attardant sur ma clavicule. « Es-tu blessé ? »

Je touchai mon cou, sentant la surface du pansement qui dépassait. Un peu gêné, je répondis : « Non, mais… »

« Alors pourquoi ce pansement ? » Il leva la main et l’amena délibérément vers moi, effleurant le côté de mon visage, jusqu’à atteindre son objectif : arracher le pansement.

«Oh, je vois. » Il sembla seulement réaliser à cet instant que sous le bandage se trouvait la marque qu’il avait laissée sur moi la nuit précédente. « Je suis désolé, je suis allé un peu trop loin hier soir. Essaies-tu de le cacher ? Je peux voir si j’ai plus de pansements dans le magasin. »

Pour une raison quelconque, je pensai que si j’acquiesçais, quelque chose de sinistre se produirait… non pas que je puisse lire l’indice d’humeur de Yan Kongshan, mais j’avais toujours mes propres instincts et sens. Ou, pourrait-on dire, un « sixième sens ».

« C’est bon, » dis-je avec un sourire mitigé. « Je vais juste le laisser comme ça, exposé. »

 

Traducteur: Darkia1030