Chenghua -Chapitre 117 - Des acteurs talentueux - Règlement de comptes entre voleurs

 

À l'extérieur, un homme de grande taille portant l'uniforme d’officier de septième rang des gardes impériaux (NT : la garde Brocart) se tenait debout.

S'il fallait souligner une caractéristique notable, c'était que presque la moitié de son visage était recouverte d'une épaisse barbe.

Cependant, ses yeux étaient extrêmement brillants, et sa simple présence dégageait une aura imposante et majestueuse, dénotant un caractère hors du commun.

Malheureusement, Tang Fan ne connaissait rien aux arts martiaux. Si Lu Lingxi avait été là, il aurait immédiatement su que cet homme était certainement un expert.

L'homme s'inclina devant Tang Fan, qui tenait toujours la belle femme dans ses bras, et dit: "Je suis Di Han, sous-drapeau de l'office des gardes de Wuxian, à la solde des gardes impériaux. Je salue le Maître Tang !"

Tang Fan fronça les sourcils : "Qui t'a envoyé ?"

Di Han répondit : "Je suis ici sur l'ordre de Jiang, capitaine des gardes de Suzhou, spécialement pour protéger le Maître."

Le visage de Tang Fan se rembrunit : "Le capitaine Jiang t'a envoyé pour me protéger, mais tu as pénétré ici sans permission. Quelle est l'explication de ce comportement ?"

Di Han baissa la tête : "C'est ma faute, Maître. Je ne vous ai pas entendu répondre, et je me suis inquiété, craignant qu'il ne vous soit arrivé quelque chose."

Tang Fan répondit froidement : "Serait-ce que le sous-drapeau Di pense qu'il est au-dessus de sa mission de me protéger ? Si c'est le cas, je peux en informer le capitaine Jiang et demander un remplaçant."

À ces mots, Di Han se mit immédiatement à genoux à moitié : "C'est ma faute ! Je vous en supplie, Maître, ne me renvoyez pas ! Le capitaine Jiang m'a strictement ordonné d'obéir à chacun de vos ordres. C'est ma négligence, je vous implore de me pardonner !"

Tang Fan l'observa pendant un moment avant de demander : "Je n'ai pas demandé à Jiang de m'envoyer deux hommes ? Pourquoi es-tu seul ?"

Di Han répondit : "Peut-être que le capitaine Jiang, voyant que mes compétences sont acceptables, a pensé qu'un seul homme suffirait."

Tang Fan, amusé, répondit : "Eh bien, tu n'es pas modeste !"

Di Han répliqua sérieusement : "Merci pour le compliment, Maître, mais je ne le mérite pas."

Assis à côté, la belle Xiao Wu, rayonnante et éblouissante, ne capta pas son attention, sauf un bref regard lorsqu'il entra. Après cela, son regard ne s'attarda plus du tout sur elle.

Tang Fan dit alors : "Puisque le capitaine Jiang t'a ordonné d'obéir à tous mes ordres, j'ai maintenant quelque chose à te demander."

Di Han répondit : "Je suis à vos ordres, Maître !"

Tang Fan dit : "Sors."

Di Han parut légèrement déconcerté.

Tang Fan répéta : "Je te dis de sortir maintenant, ferme la porte derrière toi et ne nous dérange pas. Tu m'as entendu ?"

Di Han répondit : "… Oui."

Il se retira en silence.

Tang Fan relâcha son étreinte autour de la taille de Xiao Wu.

Cependant, la porte s'ouvrit à nouveau, et le visage tenace de Di Han réapparut : "Maître, je resterai juste à l'extérieur. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, il vous suffit de m'appeler."

Tang Fan était tellement furieux qu'il faillit tomber à la renverse : "Dehors !!"

Finalement, la pièce retrouva son calme.

Tang Fan relâcha Xiao Wu : "Pardonne-moi de t’avoir embarrassée, Mademoiselle Xiao."

Xiao Wu baissa la tête, tellement embarrassée qu'elle ne trouvait pas les mots, et finit par murmurer : "Maître, les plats sont froids. Si tu le souhaites, je peux en préparer une nouvelle portion."

Tang Fan répondit avec douceur : "Les repas peuvent attendre. J'ai quelques mots à te dire, Mademoiselle Xiao."

Le visage de Xiao Wu devint encore plus rouge. Elle baissa encore plus la tête et tortilla le bord de sa robe sans dire un mot.

Après l'intimité de leur contact précédent, l'atmosphère entre eux était encore plus chargée de tension. Un homme comme Tang Fan n'aurait jamais pris de libertés avec une femme sans en avoir véritablement l'intention.

Bien qu'elle essayât de dissimuler ses émotions, ses mains tremblaient légèrement, trahissant son trouble.

Un jeune homme aussi élégant et séduisant que Tang Fan, exprimant à plusieurs reprises son intérêt, quel cœur de femme ne serait pas ému ?

Comme on pouvait s'y attendre, Tang Fan demanda : "Je me demande si Mademoiselle Xiao a un engagement de mariage ?"

Cette question implicite était trop forte, et le visage de Xiao Wu devint encore plus rouge, ne sachant comment répondre.

Soudain, elle se rappela quelque chose et leva la tête : "Maître, pourquoi as-tu pensé tout à l'heure que j'avais empoisonné ton repas ? »

Tang Fan lui adressa un sourire désolé : « Nos deux rencontres précédentes étaient trop fortuites, j'ai pensé que tu avais été envoyée par quelqu'un d'autre, alors j'ai voulu te tester. »

Xiao Wu mordilla sa lèvre inférieure : « Et maintenant ? »

Tang Fan avoua : « Maintenant, je pense toujours qu'il y a beaucoup de choses suspectes à ton sujet, mais... je n'arrive plus vraiment à contrôler mon cœur. »

La première partie de sa phrase fit pâlir Xiao Wu, mais la seconde la fit rougir vivement, passant d'une grande inquiétude à une immense joie en un instant. Une telle intensité d'émotions pourrait être trop forte pour une personne au cœur fragile.

Après avoir hésité un moment, Xiao Wu rassembla son courage et dit : « En réalité... je sais ce que tu soupçonnes. »

Tang Fan : « Oh ? »

Xiao Wu baissa la tête : « Pour être honnête, je ne suis pas la fille d'une bonne famille, et ce que j'ai dit auparavant à propos de rendre visite à des parents, c'était faux. Une fille bien élevée ne viendrait certainement pas dans la chambre d'un homme en pleine nuit, n'est-ce pas ? »

Tang Fan répondit doucement : « Si tu veux parler, tu peux, mais si tu ne veux pas, je ne te forcerai pas. »

Xiao Wu releva soudainement la tête : « Vraiment ? »

Tang Fan : « Vraiment. »

Les larmes commencèrent à briller dans ses yeux étincelants avant de finalement couler.

Toutes les belles femmes ne pleurent pas forcément de manière élégante, mais le terme "rosée sur des fleurs de poirier" semblait fait sur mesure pour Xiao Wu.

(NT : métaphore poétique qui évoque une image de beauté mélancolique. Dans la culture chinoise, les fleurs de poirier sont souvent associées à la beauté, à la fragilité et à la pureté)

Elle demanda à Tang Fan : « As-tu déjà entendu parler des Yangzhou Shouma ? »

(NT : litt. Cheval maigre de la ville de Yangzhou.)

Tang Fan hocha la tête. Bien sûr qu'il en avait entendu parler.

Les Yangzhou Shouma étaient des jeunes filles pauvres, vendues à bas prix, qui étaient formées dès l'enfance, aussi bien en arts raffinés comme la musique et la calligraphie qu'en techniques de séduction. Une fois bien formées, elles étaient revendues à un prix élevé, soit pour devenir les favorites des maisons closes, soit pour être prises comme concubines par des familles riches. Ce commerce prospérait particulièrement dans le sud de la Chine, où il existait même des marchands spécialisés dans cette activité.

Voyant que Tang Fan acquiesçait, Xiao Wu continua : « En réalité, j'étais moi aussi une Shouma. À quatorze ans, j'ai été achetée pour devenir la concubine d'un riche marchand. Après sa mort, sa femme légitime ne pouvait plus me supporter et m'a expulsée. C'est pour cela que tu m'as trouvée aux portes de Yangzhou. Depuis mon plus jeune âge, j'ai appris à servir les hommes, et une fois abandonnée, j'ai réalisé combien il était difficile de survivre seule. Si tu ne m'avais pas sauvée ce jour-là, je ne sais pas ce qu'il serait advenu de moi... »

Essuyant ses larmes, Xiao Wu esquissa un léger sourire triste : « Maintenant tu sais tout. Je n'aurais jamais dû, après notre première rencontre, nourrir de faux espoirs et me déguiser en fille vertueuse. Je ne suis en rien une femme respectable... »

Ses larmes coulèrent de plus en plus abondamment, jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus parler. Brusquement, elle se leva pour quitter la pièce.

Mais Tang Fan attrapa sa main et l'attira à nouveau dans ses bras, la serrant fermement.

« Ah Wu ! » l'appela-t-il.

À l'entente de ce nom affectueux, Xiao Wu tressaillit légèrement et se relâcha complètement dans ses bras.

La voix de Tang Fan résonna doucement au-dessus de sa tête : « Je t'aime vraiment beaucoup. Depuis le premier instant où je t'ai vue, je t'ai appréciée... Je ne me soucie pas de ton passé. Si tu me dis que tu veux être avec moi, je te ramènerai à la capitale et je t'épouserai. »

À peine ces mots prononcés, un coup à la porte se fit entendre.

De l'autre côté, Di Han appela : « Monsieur, il se fait tard, vous devriez vous reposer. »

Tang Fan, furieux, répliqua : « Tu continues à créer des ennuis ! Je t'ai dit d'attendre dehors, tu n'as pas entendu ?! »

Il se tourna à nouveau vers Xiao Wu avec douceur : « Ça ne t'a pas effrayée, n'est-ce pas ? »

Xiao Wu secoua doucement la tête.

Enfin, le silence revint.

Les deux restèrent enlacés. Tang Fan ne montrait aucun signe de vouloir la relâcher, et Xiao Wu ne faisait aucun effort pour se libérer.

Elle dit simplement d'une voix douce : « Mon cœur est le même que le tien. »

Ravi, Tang Fan s'exclama : « Ah Wu ! »

Xiao Wu couvrit ses lèvres avant qu'il ne puisse dire autre chose, souriant tristement : «Mais je n'oserais jamais espérer que tu me prennes officiellement pour épouse. Avec mon passé, je serais déjà comblée de bonheur de rester à tes côtés. »

Tang Fan lui répondit avec tendresse : « Ne t'inquiète pas. Mes parents sont décédés et ma sœur est très compréhensive. Elle n'entravera pas notre union. »

Xiao Wu secoua la tête : « Mais mon passé pourrait te rendre la risée des autres à la cour. Il n'est pas nécessaire d'en dire plus. Rien que de connaître tes sentiments pour moi, cela me comble de joie... Depuis mon enfance, personne ne m'a jamais témoigné un amour sincère, et aucun homme ne m'a jamais proposé de m'épouser... »

Tang Fan soupira, caressant doucement ses cheveux. Après un moment, il ajouta doucement : « Ne disons plus de choses tristes. J'ai encore des affaires importantes à régler. Chen Luan a trahi l'empereur en détournant les céréales de secours pour les vendre et faire des profits. Je dois trouver des preuves et dénoncer ses crimes à la cour. Quand cela sera fait, je pourrai te ramener à la capitale. Pendant ce temps, reste ici à l'auberge et évite de sortir autant que possible. Si Chen Luan se retrouve acculé, il pourrait tenter de t'utiliser pour m'atteindre. »

Xiao Wu, inquiète, demanda : « Est-ce que tu risques d’être en danger ? »

Tang Fan prit sa main et la rassura : « Je ne pense pas. J'ai quelques relations avec les gardes Brocart, donc j'ai demandé à ce qu'ils m’envoient quelqu'un pour me protéger. D'ailleurs, il y en a un qui est dehors en ce moment. »

Xiao Wu ne put s’empêcher de rire à travers ses larmes : « J'ai plutôt l'impression qu'il est là pour te surveiller ! »

Tang Fan afficha un air résigné : « Les gardes Brocart sont toujours un peu arrogants. Je suis ami avec leur chef, mais je n’ai aucun contrôle sur eux. Tant qu'ils me protègent, ce n’est pas grave si je dois supporter quelques désagréments pendant quelques jours, non ?»

Xiao Wu éclata de rire.

Tang Fan ajouta : « Je n'ai pas dormi de la nuit dernière, et je n'ai fait qu'un petit somme tout à l'heure. Maintenant, je commence à me sentir un peu fatigué. »

Xiao Wu se précipita : « Alors... je vais m’en aller, et je reviendrai demain matin pour t’apporter ton petit-déjeuner ! »

Tang Fan sourit : « Si tu veux rester pour me tenir compagnie, ça ne me dérange pas non plus. »

Rougissant, Xiao Wu baissa la tête, incapable de répondre. Elle saisit l’occasion pour ramasser les plats, et se hâta de sortir de la pièce en gardant les yeux baissés.

Tang Fan ne la suivit pas, mais ses yeux débordant de tendresse la regardèrent s'éloigner. Son regard était si doux qu’il semblait presque dégouliner. Même en lui tournant le dos, Xiao Wu pouvait sentir la chaleur de son regard peser sur elle.

Au départ, même si, techniquement, c’était Lu Lingxi qui l'avait sauvée aux portes de Yangzhou, une femme comme Xiao Wu ne pouvait s'empêcher d'être attirée par Tang Fan.

Elle avait déjà secrètement donné son cœur, mais n'osait pas l'avouer. Elle l'avait donc suivi en silence jusqu'à Suzhou, où, par chance, il l'avait sauvée une nouvelle fois.

Était-ce le destin qui les liait ainsi ?

Si elle pouvait le suivre jusqu’à la capitale...

À cette pensée, le visage de Xiao Wu s'empourpra encore plus, et même ses pas devinrent incertains.

*

Lorsque Xiao Wu ferma la porte derrière elle, Tang Fan s'étira avec un sourire qui ne quittait pas son visage.

« Di Han, tu es toujours là dehors ? »

Dehors, une voix répondit : « Oui, monsieur. »

Tang Fan l’appela : « Entre donc. »

Di Han ouvrit la porte et entra. Tang Fan lui dit alors : « Je suis un peu fatigué, va me préparer une bassine d'eau pour que je puisse me laver les pieds. »

Di Han ne répondit pas immédiatement, et Tang Fan leva légèrement les yeux vers lui : «Quoi ? Tu ne veux pas ? Je peux toujours demander à Xue Qianhu de te remplacer. »

Di Han soupira : « J'y vais tout de suite. »

Il sortit et revint rapidement avec une bassine d'eau, qu'il posa aux pieds de Tang Fan. Puis, il s'approcha pour retrousser les pantalons de Tang Fan.

Tang Fan toussota : « Ce n'est pas nécessaire, je peux le faire moi-même. Assieds-toi, j’ai des questions à te poser. »

Di Han ignora son refus et, à travers sa barbe fournie, son visage était difficile à lire, mais sa voix trahissait une sincérité : « Puisque je suis à votre service, je dois m’occuper de tout. Sinon, si vous allez vous plaindre à Xue Qianhu, je n’aurai plus qu’à en subir les conséquences. Alors, s’il vous plaît, laissez-moi vous rendre service. »

Avant que Tang Fan n’ait pu l’en empêcher, Di Han avait déjà retroussé son pantalon. Il ramassa un peu d’eau dans ses mains et la laissa doucement couler sur le dessus du pied de Tang Fan pour s’assurer que l'eau était à une température agréable, puis plongea délicatement le pied dans l’eau.

Tang Fan, bien que fonctionnaire, avait des pieds étonnamment gracieux : bien proportionnés, ni trop maigres, ni trop larges, avec une peau claire et des os bien formés. Di Han remarqua aussi une fine couche de callosités sur la plante de ses pieds.

Curieux, Di Han demanda : « Comment un érudit comme vous, toujours en carrosse ou en palanquin, peut-il avoir des pieds aussi calleux ? »

Tang Fan, ayant deviné sa question, répondit doucement : « Aurais-tu oublié que, avant de passer l’examen impérial, j'ai passé plusieurs années à voyager à travers le pays, de sorte que mes pieds ont foulé d'innombrables chemins. Il est normal qu’ils aient des callosités. »

Di Han, tout en lui lavant les pieds, rétorqua : « Vous devez faire erreur, monsieur. Vous ne m'avez jamais parlé de cela, donc je n’aurais pas pu l’oublier. »

Tang Fan répondit d’un ton pensif : « J’ai dû te confondre avec quelqu'un d'autre. Mais d'ailleurs, en parlant de ça, tout à l'heure tu es entré sans te faire annoncer à plusieurs reprises. Que devrais-je en conclure ? »

Di Han se justifia : « Je craignais simplement que vous ne soyez en danger, monsieur. »

Tang Fan rit doucement : « Je crois plutôt que tu as été distrait par la beauté de cette femme et que tu voulais en profiter pour la regarder un peu plus, non ? »

Di Han garda le silence un instant, puis répondit gravement : « Monsieur, cette femme n’est pas quelqu’un de simple. Elle a des intentions cachées. »

Tang Fan secoua la tête : « Je vais te dire la vérité. J'ai déjà jeté mon dévolu sur elle, et je compte la prendre pour concubine bientôt. Alors, il vaudrait mieux pour toi de ne pas tenter ta chance, car je ne suis pas du genre à céder ce que j’ai décidé de garder... Eh, doucement ! Tu es en train de me broyer la cheville ! »

Di Han relâcha sa prise, laissant une trace rouge sur la peau de Tang Fan.

Il commença à masser doucement la cheville endolorie : « ...Ce n'était pas intentionnel. »

Tang Fan retira son pied, saisit un linge pour le sécher, et fit un geste de la main comme pour chasser une mouche : « Allez, c’est bon, tu peux sortir maintenant. Ne viens pas déranger mon sommeil ! »

Avant même qu'il ne termine sa phrase, il fut soudainement projeté en arrière, atterrissant sur le lit !

Tang Fan s'exclama, furieux : « Mais qu'est-ce que tu fais ?! »

Leurs yeux se croisèrent, leurs visages si proches que leurs nez étaient presque collés, et ils pouvaient sentir la chaleur de la respiration de l'autre.

Di Han murmura lentement : « Pardonnez mon audace. »

Malgré ces mots, il ne montra aucun signe de vouloir se relever.

Fixant Tang Fan, il articula lentement : « Cette femme a de mauvaises intentions. Je vous en prie, monsieur, ne vous laissez pas duper. »

Tang Fan éclata de rire : « N'est-ce pas juste la concubine préférée de Chen Luan ? Je m’en fiche bien ! Quelle tromperie peut-il y avoir là-dedans ? »

Di Han, surpris, demanda : « Vous saviez ? »

Tang Fan répondit nonchalamment : « Tu pensais vraiment que je ne pouvais compter que sur les informations des gardes Brocart? Tu crois que je serais venu à Yangzhou sans rien savoir ? Tu me sous-estimes beaucoup trop ! »

Di Han : « Comment l'avez-vous su ? »

Tang Fan : « Combien de temps comptes-tu rester sur moi ? »

Di Han, après un moment de silence : « … Désolé. »

Il regarda Tang Fan intensément une dernière fois avant de se lever et de le libérer.

Tang Fan émit un léger grognement et hocha le menton : « Emporte cette bassine d'eau, je vais me reposer. »

Di Han, hésitant : « ...Je vous prie, monsieur, éclairez-moi. »

Tang Fan, intrigué : « Es-tu en train de me supplier ? »

Di Han, humblement : « Oui, je supplie monsieur de bien vouloir m’éclairer. »

Tang Fan, de bonne humeur, sourit : « Puisque tu es si sincère, je vais faire preuve de clémence et te le dire. Dès la deuxième fois que je l’ai croisée dans les rues de Suzhou, j'ai commencé à me méfier d'elle. »

Voyant l'air légèrement perplexe de Di Han, Tang Fan poursuivit : « Connaître son ennemi et se préparer à l'avance permet de remporter chaque bataille. Avant de quitter la capitale, j'avais demandé à Wang Zhi d’enquêter sur Hu Wenzao et Chen Luan. En ce qui concerne Chen Luan, Wang Zhi m'a spécifiquement mentionné une chose : il a une concubine d'une beauté exceptionnelle, que peu de gens ont vue. Mais tous ceux qui l’ont aperçue ont été fascinés par sa beauté. Cette concubine était d'ailleurs autrefois une courtisane de Yangzhou. »

Tang Fan continua : « Il y a de nombreuses femmes belles dans ce monde, mais des beautés aussi renversantes que Xiao Wu, capables de troubler le cœur des hommes, sont rares. Même si elle n'est pas unique, elle est certainement exceptionnelle. Je ne suis pas un homme impatient ou désespéré, incapable de me méfier. Quand une telle beauté surgit soudainement aux portes de Yangzhou, comment ne pas avoir des soupçons ? De plus, comme tu l’as dit, son passé est loin d’être simple. Chen Luan m’a offert de l’argent et une belle femme, ce qui montre à quel point il tient à elle. Si elle n'était pas si précieuse à ses yeux, il ne l’aurait probablement pas envoyée si facilement ! Donc, il est fort probable que Xiao Wu soit bien cette concubine aimée de Chen Luan, non ? »

Di Han acquiesça : « Alors, monsieur, vous avez décidé de jouer son propre jeu, en espérant que, par votre charme, elle se laisserait séduire pour de bon ? »

Tang Fan éclata de rire : « Moi, charmant ? Je n’ai aucun charme particulier, et ce n’est pas elle que j’essaie de séduire ! »

Di Han resta perplexe.

Tang Fan soupira : « On dit que cette concubine de Chen Luan, en plus de sa beauté extraordinaire, est intelligente, elle maîtrise la littérature et possède un esprit vif et ingénieux. Chen Luan la chérit tellement qu'il a même construit une résidence séparée juste pour elle. Un tel joyau, et il est prêt à la sacrifier pour me piéger dans un jeu de séduction. Cela montre qu’il me prend vraiment au sérieux ! Si je couchais vraiment avec Xiao Wu, je serais piégé dans ses filets, et même si je me lavais dans le fleuve Jaune, je ne pourrais plus me justifier ! Il se pourrait qu'après cela, je perde toute ambition, et que je finisse par serrer la main de Chen Luan, devenant un de ses complices. »

En disant cela, Tang Fan trouva la situation drôle : « Mais imagine, si Chen Luan et moi finissions par partager la même femme, je me demande s’il en serait gêné, ou s’il serait tout simplement soulagé de me la céder ? »

Voyant que Tang Fan commençait à divaguer, Di Han ne put s'empêcher de l’interrompre : « Ce que vous voulez, c'est que Chen Luan pense que vous êtes tombé dans son piège, n'est-ce pas ? »

Tang Fan secoua la tête et esquissa un sourire rusé : « Non, je veux que Chen Luan pense que Xiao Wu, après avoir passé du temps avec moi, commence à m'apprécier au point de vouloir le trahir ! »

Les yeux de Di Han s’illuminèrent.

Tang Fan, tout sourire, continua : « Ils peuvent bien utiliser un piège de séduction, mais je peux tout aussi bien retourner la situation contre eux. Xiao Wu est très précieuse aux yeux de Chen Luan, et si elle a été envoyée pour une telle mission, cela signifie qu'elle connaît probablement de nombreux secrets, peut-être même où se trouve le véritable registre des provisions. Si Chen Luan croit qu'elle l’a trahi pour moi, que penses-tu qu'il fera ? »

Di Han prononça lentement quelques mots : « Un chien acculé saute par-dessus un mur, il la tuerait pour la réduire au silence. »

Tang Fan hocha la tête : « Exactement. Et même si Xiao Wu n’avait aucune intention de trahir Chen Luan, il la pousserait de son propre chef à venir vers moi ! »

Un plan de contre-espionnage brillant !

Di Han haussa les sourcils, son visage difficile à lire derrière sa barbe, mais ses yeux brillaient, montrant qu’il approuvait pleinement le plan de Tang Fan.

Tang Fan, pieds nus, poussa la bassine vers lui : « Tu as entendu l’histoire, maintenant va-t’en. Je vais dormir. Tu n’as pas entendu ? »

Di Han, sans mot dire, se baissa pour ramasser la bassine : « Je vous souhaite une bonne nuit, monsieur. Je vais monter la garde dehors. »

Juste avant qu'il ne referme la porte, une voix taquine se fit entendre derrière lui : « La prochaine fois que tu veux changer d’identité, pense à t'entraîner auprès de Maître Li d'abord, Guangchuan. »

Di Han : « ………………… »

*

Le lendemain matin, Tang Fan sortit de sa chambre, l'air frais et reposé. Xiao Wu l'attendait dehors, un sourire radieux sur le visage.

Sur la table à côté, de petites pâtisseries de Suzhou étaient disposées, délicates et charmantes.

Cependant, Di Han, qui aurait dû être en poste à l'extérieur, était introuvable.

Tang Fan sourit : « Ah Wu, tu t'es levée si tôt ? »

Xiao Wu cacha son sourire derrière sa main : « Ce n'est pas si tôt que ça, le soleil est déjà bien haut. J’étais déjà venue apporter le petit-déjeuner une première fois, mais comme tu ne t’étais pas encore levé, j'ai tout refait. »

Tang Fan, touché, répondit : « Ah Wu, il n'était pas nécessaire de te donner tant de mal. Il y a des cuisiniers ici, tu n’as pas à tout faire toi-même. »

Rougissant, Xiao Wu murmura : « Monsieur est tellement sincère avec moi... Je veux simplement rendre la pareille avec tout mon cœur. »

Tang Fan ne put s’empêcher de penser que cette femme jouait merveilleusement bien la comédie. Avec une telle beauté et une telle intelligence, il n’était pas surprenant que Chen Luan la chérisse et la protège si jalousement.

Même les pièges de séduction ont leurs niveaux. Pour qu'une telle femme soit utilisée dans un tel stratagème, cela montrait à quel point Chen Luan prenait Tang Fan au sérieux.

Tang Fan se sentit presque honoré.

Quel dommage que tant de bonnes intentions de la part de l'autre camp soient vouées à l'échec.

Xiao Wu, voyant Tang Fan la fixer intensément, sentit ses joues rougir légèrement. Elle le gronda doucement, mi-fâchée, mi-gênée : « Monsieur… »

Tang Fan, réalisant qu'il la regardait depuis un moment, se ressaisit et s’assit en souriant. Il prit un petit morceau de pain doré et le porta à sa bouche.

La nuit dernière, il n'avait pas touché au repas que Xiao Wu avait préparé, de peur qu’elle ne profite de l’occasion pour glisser un somnifère ou quelque poison dans la nourriture, créant ainsi une situation irrévocable pour salir sa réputation.

Mais maintenant, en plein jour, même si Xiao Wu avait des intentions malveillantes, elle savait que ce n'était pas le bon moment.

« Il y a de la garniture dedans ? » demanda Tang Fan, surpris.

« C'est de la cerise, » répondit Xiao Wu avec un sourire. « C’est bon ? »

Tang Fan hocha la tête : « C’est délicieux, vraiment excellent. Ta technique est encore meilleure que celle de ma sœur. Si tu viens avec moi à la capitale, j’aurai de quoi me régaler tous les jours ! »

Xiao Wu sourit et baissa la tête, semblant un peu embarrassée.

Tang Fan saisit doucement sa main : « Ah Wu, tes cheveux sont bien simples aujourd’hui. Que dirais-tu de sortir en ville pour acheter quelques bijoux ? »

Xiao Wu, perplexe, demanda : « Ne devrais tu pas enquêter sur Chen Luan ? »

Tang Fan lui fit un sourire énigmatique : « Pour être honnête, j’ai déjà trouvé les preuves essentielles pour le faire tomber. »

Xiao Wu s'exclama de surprise : « Quelles preuves ? »

Mais Tang Fan changea de sujet : « Inutile de parler de ces choses ennuyeuses, tu ne trouverais pas cela intéressant. Finissons notre petit-déjeuner, je t’emmène ensuite te promener. Chen Luan m’a donné dix mille taels la dernière fois, et je n’en ai pas encore dépensé un seul. Je pourrais t'acheter plusieurs beaux ensembles de bijoux avec ça ! »

Xiao Wu, étonnée, demanda : « Tu as accepté l’argent de Chen Luan, et vous comptez quand même l’accuser ? »

Tang Fan, avec nonchalance, répliqua : « Tu ne comprends pas, c'est ce qu'on appelle un voleur qui vole un autre voleur. »

Xiao Wu resta silencieuse : « ... »

 

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Note du traducteur :

Ah Ah Qui s’attendait à un tel retour sur scène de Sui Zhou la jarre de vinaigre ?

 

Traducteur: Darkia1030