MISVIL - Chapitre 75 – Déchirer le destin tracé

 

« Ne sois pas effrayé, ce n’est pas le vrai toi. »



Song Qingshi avait vu, dans les fragments de Lumière Dorée du Mérite, un phénix, Yue Wuhuan… et sa propre mort.

Encore et encore, il mourait dans la neige, sous une pluie de flèches, sous les roues d’un char, sur la place d’exécution…

Il avait été confus, mais à mesure que Yue Wuhuan ouvrait peu à peu son cœur, révélant ses émotions et sa vulnérabilité, Song Qingshi comprit enfin la signification de toutes ces morts. À chaque fois, elles étaient une torture atroce pour Yue Wuhuan, une souffrance qui lui arrachait le cœur, le poussait à perdre tout espoir, à sombrer dans la folie, jusqu’à l’autodestruction. Un véritable enfer de désespoir.

Il ne souffrait pas. Il n’avait pas peur de la douleur.

Il ne permettrait jamais qu’un tel destin se répète.

Song Qingshi tenta d’analyser chacune des morts montrées dans les fragments célestes et découvrit qu’elles portaient toutes les marques d’un destin altéré par le Dao céleste : maladies soudaines, accidents, catastrophes… Il y avait même une vie où, s’étant rendu compte d’un danger, il s’était enfermé dans une pièce, pour finalement être tué par une météorite tombée du ciel.

Chaque accident n’était qu’une coïncidence, et chaque coïncidence ne frappait que lui, pour lui ôter la vie.

Dans cette vie, il était un cultivateur de niveau Âme naissante, d’un haut niveau de cultivation. Il n’était plus si facile à tuer par un poison égaré ou une explosion d’alambic. En observant la tribulation de Yue Wuhuan, il comprit que le Dao céleste ne pouvait sans doute plus le tuer directement, mais seulement distordre les règles pour créer des coïncidences.

Alors, comment allait-il mourir cette fois-ci ?

Song Qingshi se souvint soudain qu’il avait déjà été tué une fois…

À ce moment-là, il ne connaissait pas encore Yue Wuhuan, donc le destin ne l’avait pas encore pris pour cible. En s’appuyant sur la puissance du système, il avait survécu. Même s’il ne comprenait pas pourquoi le système l’avait aidé.

Mais si le cœur-démon d’An Long pouvait perdre le contrôle une fois, il pouvait bien le faire une seconde. Il était le plus puissant des cultivateurs Âme naissante, avec du sang semi-démoniaque, avide de sang et de guerre – le pion parfait pour être manipulé par le Dao céleste.

Depuis longtemps, ses soupçons s’étaient portés sur An Long.

Huit cents ans de camaraderie, cinq cents ans d’amitié, des combats côte à côte…

Song Qingshi connaissait bien le tempérament d’An Long. Il détestait se cacher, préférait l’affrontement direct. Face à une traque dangereuse, il ne faisait que devenir plus fort, jusqu’à tuer tous ses ennemis. Puisque la secte des 10000 insectes l’avait trahi, An Long retournerait sûrement à Xilin pour massacrer les traîtres…

Si des nouvelles sanglantes arrivaient de Xilin à propos d’An Long, ce ne serait pas inquiétant.

Mais si plus rien ne venait de Xilin… c’était là que les choses devenaient vraiment dangereuses.

An Long avait sans doute perdu le contrôle, son cœur-démon s’étant libéré dans une rage meurtrière.

Il n'y aurait pas de nouvelles si tout le monde était mort.

Quand la lettre de l’Immortel Ye Lin arriva, porteuse d’un avertissement à peine voilé, Song Qingshi comprit immédiatement : c’était un défi lancé par An Long, mais aussi la date que le destin avait choisie pour le tuer, et plonger Yue Wuhuan dans un nouvel enfer.

Il ne se laisserait pas faire.

Il allait défier son destin.

Il mettrait tout en œuvre pour changer l’avenir de Yue Wuhuan.

*

Song Qingshi tendit la main, et une fleur de lotus de flammes noires et rouges apparut dans les airs, illuminant les environs.

An Long couvrit ses yeux injectés de sang, aveuglé par cette lumière. Son esprit oscillait entre lucidité et démence, jusqu’à ce qu’il éclate soudain de rire.

Il réalisait qu’il n’avait jamais vu la véritable puissance de Song Qingshi. Maintenant qu’ils allaient se battre à pleine puissance, cela ferait au moins honneur à leurs années d’amitié.

Profitant d’un moment de lucidité, Song Qingshi lui demanda : « Au manoir du Phénix doré… étais-tu déjà tombé dans la démence ? »

« Oui, » répondit An Long, son corps se transformant peu à peu, son sourire empreint de douleur. « À ce moment-là, mon cœur-démon m’a contrôlé, j’ai perdu la raison… Je souffrais énormément. Je t’ai supplié de me mentir, de me dire au moins une fois "je t’aime", même si ce n’était qu’une illusion. Cela aurait suffi à faire fuir mon cœur-démon, à abandonner l’envie de tuer. Mais tu as refusé. Tu me détestes tant, au point de préférer mourir plutôt que de mentir pour me libérer de la douleur ? »

Song Qingshi réfléchit un instant : « Je ne peux pas. Aimer, c’est aimer. Ne pas aimer, c’est ne pas aimer. Je ne peux pas te mentir. »

La respiration d’An Long s’accéléra. Son esprit était peu à peu envahi par la démence démoniaque : « Qingshi, je te hais… »

Le verrou émotionnel gu de Yue Wuhuan refoulait l’amour ; le sien refoulait la haine et l’envie de tuer.

Avec son sang semi-démoniaque, il était né incapable de ressentir les émotions humaines, seulement la violence et la convoitise.

Il avait tout fait pour apprendre, pour comprendre, pour respecter.

Il voulait vraiment devenir un véritable humain, mais il avait échoué.

Song Qingshi l’avait autrefois envoyé chez le Maître Cibei pour apprendre l’humanité, mais il n’y avait vu chez ces enfants aucun signe d’humanité : ils ne comprenaient ni le bien ni le mal, devenaient juste des marionnettes obéissantes, suivant les règles.

Lors de la grande guerre contre les démons, il avait vu le Maître Ci Bei, gravement blessé, céder à sa propre démence et se transformer en un monstre terrifiant, avant d’être tué comme un ennemi. Ensuite, les gens, croyant qu’il avait été tué par une créature démoniaque, l’avaient honoré comme un héros. C’était d’un ridicule…

Après la mort du Maître Ci Bei, les disciples restants révélèrent progressivement leur nature démoniaque, et furent tous exterminés.

Un démon restait un démon. Quelle humanité pouvait-il bien y avoir là-dedans ?

Il ne vivait que pour tuer…

Les pupilles d’An Long s’étaient transformées en fentes effrayantes. Il avait perdu toute trace d’émotion humaine, devenant une véritable créature démoniaque. Il émit un sifflement inaudible, et dans la forêt se fit entendre le bruissement d’innombrables insectes. De plus en plus. De plus en plus proches.

Song Qingshi jeta un coup d’œil aux alentours, puis, d’un claquement de doigts, fit jaillir les flammes du lotus rouge. Elles se propagèrent à travers toute la forêt, une mer de feu intense dont la chaleur extrême repoussa l’assaut des insectes venimeux. Dans l’air flottait l’odeur écœurante de chair calcinée.

Il se tenait sur un lotus de flammes, dominant de haut la créature démoniaque au sol, les doigts formant un sceau magique.

Sous les pieds d’An Long jaillirent des dizaines de mains. C’étaient des marionnettes toxiques dissimulées dans la terre, aux corps cousus de fils noirs, semblables à des poupées sorties des enfers. Elles s’enroulèrent autour de leur proie, injectant par leur contact divers poisons, s’agrippant à lui. Le corps d’An Long se couvrit dépaisses écailles qui bloquèrent les toxines. Il fit claquer une longue queue de scorpion, tranchant une à une les mains pâles, avant de foncer droit vers Song Qingshi.

Il n’avait pas besoin de savoir combien de cartes Song Qingshi avait encore en main. Il lui suffisait de savoir une chose : Song Qingshi n’était pas doué au corps-à-corps.

Des barrières défensives et des formations magiques s’épanouirent dans les airs, interrompant brutalement leur distance.

An Long ricana, tendit ses griffes acérées et éventra la barrière, se jetant sur sa cible. Mais Song Qingshi disparut soudain, remplacé par une nuée de papillons noirs venimeux se déversant sur lui comme une tempête. An Long ferma les yeux à temps, mais les poussières de leurs ailes tombèrent quand même sur son visage, rongeant ses écailles et s’infiltrant dans les plaies ouvertes.

Avec violence, il s’arracha les écailles infectées, stoppant la propagation du poison. De nouvelles écailles repoussèrent aussitôt, recouvrant les blessures. Il fit alors claquer sa queue, frappant un coin de la clairière apparemment vide, brisant la formation d’occultation de Song Qingshi et le forçant à se révéler.

« Je t’ai trouvé », murmura An Long d’un ton sifflant.

Song Qingshi essuya le sang au coin de ses lèvres, esquissa un sourire, et jeta une petite flamme de lotus noir au sol.

Soudain, le sol explosa. Les marionnettes toxiques enfouies dans la terre se déclenchèrent en une attaque-suicide. L’explosion se propagea en chaîne, accompagnée de poisons virulents, dévastant toute la forêt. Les arbres fondirent en liquide noirâtre, la faune fut entièrement anéantie, et un cratère de plusieurs dizaines de mètres de profondeur se creusa, ensevelissant tout. Un brouillard toxique se répandit, s’infiltrant dans l’air, la peau, chaque recoin du corps.

Quand la poussière retomba, elle révéla la silhouette d’An Long. Il s’était recroquevillé sous ses écailles, protégeant ses points vitaux, esquivant l’essentiel des dégâts. Mais les toxines avaient tout de même infiltré son corps, ralentissant ses mouvements, engourdissant ses sens. Son souffle se fit plus lourd, mais son excitation ne faisait que grandir.

C’était un combat qui lui plaisait…

Un adversaire qui méritait d’être tué…

Il se redressa et fonça à nouveau vers sa cible, disparaissant en plein vol pour réapparaître juste devant Song Qingshi, et lui asséna un violent coup de poing à l’abdomen. Song Qingshi fut projeté en arrière. Malgré sa robe magique de haut niveau, plusieurs côtes se fissurèrent, et son dantian ainsi que son Âme naissante se retrouvèrent au bord de l’implosion.

Song Qingshi se redressa avec difficulté. Il savait depuis le début que la plus grande force d’An Long ne résidait pas dans ses insectes, mais dans son esprit de combat. Il possédait un corps d’une puissance extrême et un instinct guerrier inné, capable de percevoir chaque faille, chaque point faible.

Il avait volontairement sacrifié une partie de sa défense pour apposer la marque du papillon de la peste noire sur An Long.

Les papillons noirs se rassemblèrent aussitôt, attaquant leur proie marquée.

An Long jeta un œil aux insectes et, une nouvelle fois, siffla sans émettre de son. D’innombrables mites aux visages de fantômes se déchaînèrent tel un ouragan. Elles foncèrent à travers le feu, se jetant sans peur sur les papillons noirs. Une à une, elles mouraient, formant des montagnes de cadavres. Mais elles emportaient avec elles la poussière venimeuse des papillons noirs, épuisant leur poison, les rendant inoffensifs.

Song Qingshi sentit le danger approcher. Son corps s’enveloppa de flammes sombres, tentant de brûler les ennemis qui s’approchaient.

Mais la queue de scorpion jaillit soudain, transperçant son ventre et le clouant contre la paroi rocheuse.

An Long sortit lentement de la masse grouillante de mites :
« Je t’ai attrapé. »

Song Qingshi serra fermement la queue de scorpion qui le transperçait, haletant. Il savait qu’il ne pouvait pas l’extraire maintenant, au risque d’une hémorragie massive. Heureusement, avant le combat, il avait avalé une puissante pilule analgésique qui lui permettait de garder l’esprit clair malgré la douleur.

An Long s’approcha lentement, tendit la main, et effleura son visage, voulant en essuyer le sang.

Une douleur fulgurante remonta jusqu’à son cerveau : il avait l’impression d’avoir touché un four brûlant. Ses écailles se rôtirent, sa peau se fendit et se carbonisa, dégageant une odeur insupportable. La douleur aiguë lui rendit un instant de lucidité. Des larmes sanglantes coulèrent dans ses yeux écarlates. Il murmura d’une voix rauque :
« Pourquoi ? »

À peine avait-il parlé que sa voix se brisa.

Les sentiments sont la chose la plus douce du monde, mais aussi la plus cruelle.

Il n’y a aucune logique à cela.

« Qingshi, je ne veux pas te tuer », dit-il en regardant l’homme devant lui, suppliant une fois encore dans le désespoir. « Je t’en supplie… dis juste “je t’aime”, même si c’est un mensonge. Fais que le cœur-démon me laisse, qu’il te laisse. »

Dans son esprit, des hallucinations hurlantes lui ordonnaient de tuer. Elles envahissaient sa volonté, le rongeaient de l’intérieur. Il n’y avait qu’en tuant cet homme, ou en obtenant ce qu’il désirait, il pourrait se débarrasser de cet état hideux, s’échapper de cette douleur.

Il ne savait pas combien de temps il pourrait encore tenir.

Song Qingshi leva la tête et dit doucement : « Ça ne servirait à rien. »

La même scène, la même supplique... tout cela lui rappela enfin ce qui s’était passé à la résidence du Phénix Doré.

« F-Le faux restera toujours faux, ça ne pourra jamais devenir vrai, » haleta difficilement Song Qingshi, lui révélant la véritable réponse. « Je ne peux pas te mentir. Tu es un génie des insectes que j’admire, tu as aussi été mon meilleur ami. Tu es quelqu’un de bien, tu m’as beaucoup aidé… alors… je ne peux absolument pas trahir tes sentiments avec un mensonge. Ce serait une humiliation pour ton amour… »

An Long le regarda, stupéfait, comme s’il le voyait pour la première fois.

Des larmes coulèrent des yeux de Song Qingshi. Il sourit et dit : « Je t’ai attrapé moi aussi. »

Depuis le début, il n’attendait que cette occasion. La queue de scorpion les reliait l’un à l’autre ; aucun des deux ne pouvait fuir.

An Long comprit enfin : la mort était sa véritable destinée.

Il baissa la tête en souriant et prit le jeune homme ensanglanté dans ses bras, acceptant que chaque parcelle de sa peau soit brûlée, tout cela pour un bref instant de lucidité. Il déposa doucement un baiser sur son front, ses lèvres brûlées jusqu’à devenir méconnaissables, juste pour une ultime adieu.

L’étreinte la plus douloureuse du monde, le baiser le plus déchirant… et pourtant il l’accepta de tout son cœur.

La fleur de lotus noire et la rouge fusionnèrent de force dans le ciel, devenant une lumière dorée éclatante, portant la saveur de la mort.

An Long baissa doucement la tête, laissant Song Qingshi pousser cette fleur de mort dans sa poitrine.

Le lotus explosa aussitôt, brisant les écailles dures, transperçant la cage thoracique, détruisant tous ses organes internes. Le sang jaillit de toutes parts, impossible à arrêter, imprégnant les graviers de rouge et s’infiltrant lentement dans le sol.

Ainsi, le sang des demi-démons était rouge, lui aussi.

Les hallucinations dans son esprit devinrent des alarmes folles, son esprit plongé dans le chaos. Il sentit que son corps était en train d’être réparé de force, qu’on lui volait le droit de mourir. C’était contraire aux lois du ciel. Son corps était modifié de façon étrange… que se passait-il exactement ?

An Long était anxieux, paniqué.

La queue de scorpion fut arrachée. Song Qingshi s’empressa de traiter sa blessure, utilisant des aiguilles d’or et des médicaments pour arrêter le saignement.

Il se traîna lentement vers An Long, examinant les changements anormaux de son corps. Il confirma alors son intuition : le destin avait choisi An Long comme pion, pour détruire Yue Wuhuan, et ne lui permettrait donc pas de mourir de sa main.

Il n’y aurait pas de miracle. Il fallait tuer de force.

« N’aie pas peur, » murmura Song Qingshi pour le rassurer, « la mort n’est pas une vraie fin, mais un nouveau départ. »

La Lumière Dorée du Mérite dans le rouleau de peinture était douce.

Elle ne voulait pas qu’il voie la douleur des morts encore et encore, mais qu’il voie les opportunités de renaissance, à chaque fois. Si la mort arrangée par le Ciel ne pouvait être évitée, alors il devait profiter du temps qu’il lui restait avant cette mort pour donner à Yue Wuhuan assez d’indices et de promesses, se préparer, et attendre que le nouveau cycle commence.

Tel le phénix renaissant, mourir pour mieux revivre…

C’était cela, la vraie réponse offerte par le rouleau.

An Long, en voyant la sérénité sur son visage, sentit son propre cœur se calmer peu à peu.

Song Qingshi, avec peine, fit sortir de son corps son noyau de cultivation, brisé et déchiré. L’explosion d’un tel noyau pouvait détruire toute forme de vie dans un rayon de cent lieues. Il allait s’anéantir, anéantir An Long, anéantir le royaume secret, tout détruire.

Chaque fissure sur le noyau était la preuve qu’un cœur de cultivateur sans émotion avait été touché par les sentiments.

An Long le fixa longuement, avant de poser la question qu’il gardait en lui depuis si longtemps : « Qingshi, as-tu des regrets ? Tu as sauvé dans un marécage puant un chien ingrat, laid, sans reconnaissance, qui t’a trahi encore et encore… t’a causé du tort à maintes reprises… »

Song Qingshi réfléchit, puis secoua la tête : « Je n’ai jamais regretté. »

An Long demanda, incrédule : « Pourquoi ? »

Song Qingshi sourit : « Si je ne t’avais pas sauvé, comment ce monde aurait-il connu le roi des insectes au talent inégalé ? Le dieu de la guerre indomptable ? Ces jours où nous avons affronté le danger ensemble… étaient vraiment heureux… »

Il s’interrompit, se rappelant soudain qu’il avait vu dans le rouleau un phénix souvent accompagné d’un majestueux dragon noir.

Le dragon noir aimait provoquer le phénix, et ils se battaient dans les nuages, faisant trembler le ciel et la terre, avant de se réconcilier et de voler côte à côte… comme deux très bons amis.

Song Qingshi en avait été profondément envieux.

Les écailles noires sur le visage d’An Long, ses pupilles verticales… se superposaient peu à peu à l’image de ce dragon noir dans sa mémoire. Il avait été dépouillé de ses écailles, ses tendons arrachés, transformé en un monstre hideux, ayant perdu tout éclat, toute fierté… Et pourtant, il continuait de lutter, de résister, prêt à mourir plutôt qu’à devenir un pion entre les mains du destin.

Song Qingshi l’observa de plus en plus attentivement.

An Long se couvrit le visage de la main, terrifié : « Ne me regarde pas, je suis un monstre. »

Song Qingshi répondit : « N’aie pas peur, ce n’est pas le vrai toi. »

An Long demanda : « À quoi ressemble le vrai moi, alors ? »

Song Qingshi pensa à ce dragon noir qui accompagnait le phénix dans les cieux : «Probablement très beau. »

« N’importe quoi, » An Long ne put s’empêcher de rire. Le rire tira sur les blessures de sa poitrine, lui faisant mal, mais il en ressentit une forme de joie. Il s’écria : « Tue-moi, sinon, tant qu’il me restera un souffle de vie, je tuerai Yue Wuhuan… et toi avec. »

Les voix dans son esprit devinrent de plus en plus aiguës, comme un mécanisme sur le point de se briser, émettant un bourdonnement dangereux.

An Long le regarda et dit doucement, en guise d’adieu : « Si jamais on se revoit… il n’y aura pas de troisième fois. »

Song Qingshi hocha la tête en souriant : « Je te crois. »

Le noyau spirituel se désintégrait peu à peu, prêt à briser les plans du destin.

*

Soudain, une alarme stridente retentit.

Un étrange trou noir apparut dans le ciel, l’engloutissant tout entier et interrompant la puissance destructrice de l’explosion du noyau.

Depuis le vide, une voix chaotique et saccadée résonna, semblable à celle d’un système infecté par un virus, surchargé, prêt à s’effondrer :

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : un. »

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : mille trois cent cinquante. »

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : un. »

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : mille trois cent cinquante. »

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : un. »

« Agent de mission Song Qingshi, nombre d’échecs : mille trois cent cinquante. »

« Correction de l’intrigue, envoi d’un agent. »

« Correction de l’intrigue, envoi d’un agent. »

« … »

Song Qingshi disparut dans le trou noir, ne laissant à An Long qu’une dernière phrase : « Ne tue pas Wuhuan, ou tu le regretteras. »

An Long lutta pour se relever et tenter de l’arrêter, mais ses blessures ralentissaient ses mouvements. Il arriva une fraction de seconde trop tard. Il vit Song Qingshi, grièvement blessé, disparaître sans raison sous ses yeux. Son esprit était en plein chaos, incapable de comprendre ce qui venait de se passer.

Il tenta de saisir l’air devant lui, mais ne sentit rien.

Aucune fluctuation magique, aucune trace de sortilège interdit.

Il perçut que le souffle de Song Qingshi avait été effacé du monde, comme s’il n’avait jamais existé.

La démonisation de son corps s’estompait peu à peu, il reprenait son apparence humaine.

Ce n’était pas la première fois que cela arrivait. C’était déjà arrivé, lorsque Song Qingshi était mort.

An Long resta assis là, hébété, même après que la majorité de ses blessures aient été guéries, incapable de reprendre ses esprits.

Les hallucinations dans sa tête s’étaient beaucoup affaiblies, mais continuaient à murmurer:

« Il… il mentait… »

« Ne… ne le crois pas… tu ne le regretteras pas… »

« C’est… c’est moi qui t’ai sauvé… »

« Vite… rends-toi à la Vallée de la Médecine… tue Yue Wuhuan… »

« … »

An Long resta longtemps assis, longtemps à réfléchir.

Finalement, il se leva.

Il marcha, pas après pas, d’un pas lourd, en direction de la Vallée de la Médecine.

 

Traduction: Darkia1030

 

 

 

 

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