MISVIL - Chapitre 25 - Un démon dans le cœur

 

Ce ne sont que des déchirures, rien d’insurmontable !

Song Qingshi et An Long discutèrent de divers sujets médicaux, tels que la structure du corps humain, l’hygiène, la proctologie (NT : branche de la médecine spécialisée dans le rectum et l’anus) et les déchirures, engageant un débat académique animé. Ce qui commença comme une dispute devint rapidement sérieux. Bien que ni l’un ni l’autre n’ait eu d’expérience pratique avec un homme, Song Qingshi s’appuyait sur des cas cliniques qu’il avait traités. Ses arguments étaient cohérents et basés sur des preuves, tandis qu’An Long, incapable de prouver ses théories, fut graduellement débouté.

An Long tenta une ultime défense : « Dans le monde immortel, de nombreux compagnons du même sexe vivent une relation harmonieuse. Par exemple, les Immortels Wangyue et Wuling sont inséparables et très amoureux. Si cela était aussi douloureux que tu le dis, pourquoi Wangyue accepterait-il cette situation ? »

Song Qingshi répliqua : « Parce que l’Immortel Wangyue aime l’Immortel Wuling et ne supporte pas de voir l’autre souffrir. »

Pris de court, An Long demanda : « Pourquoi penses-tu cela ? »

« C’est simplement ce que je crois, » répondit Song Qingshi sérieusement. « Ce ne sont que des déchirures, rien d’insurmontable. Un homme digne de ce nom devrait être fort pour la personne qu’il aime. Il ne peut tout de même pas laisser l’autre souffrir, n’est-ce pas ? »

An Long, sur le point d’éclater de rire, dut se contenir pour garder un visage sérieux. Il trouva l’innocence de Song Qingshi adorable, bien qu’un peu risquée. Cependant, les deux feux spirituels de Song Qingshi, le Feu de Lotus Rouge et le Feu Fantôme du Monde Souterrain, rendaient sa situation complexe. Si son énergie spirituelle était scellée, le Feu Fantôme s’échapperait violemment, détruisant tout autour de lui. Mais si ses énergies spirituelles n’étaient pas scellées, les deux feux jailliraient ensemble, impossibles à contrôler. Ainsi, aucune technique de confinement ou d’immobilisation ne fonctionnait sur lui. Dans un duel, la seule option était de le tuer, car il était impossible de le capturer ou de le menacer...

Quel dommage, pensa An Long. Sinon, il l’aurait déjà ramené à la secte des Dix Mille insectes et l’aurait caché pour le choyer tranquillement.

Se retenant de rire, An Long reprit avec sérieux : « Discuter ne sert à rien, il faudrait tester pour savoir. »

Song Qingshi trouva l’idée raisonnable.

« N’espère rien de moi, » répondit An Long en montrant sa carrure imposante et ses tatouages effrayants. « Celui qui oserait me toucher n’est pas encore né. Même si je voulais aider un ami, je ne pourrais pas. »

Song Qingshi admit que c’était logique. Avec son apparence et sa personnalité intimidantes, personne n’oserait jamais s’approcher de lui, et encore moins tenter quoi que ce soit de ce genre.

An Long proposa alors : « Pourquoi ne pas essayer toi-même ? »

Song Qingshi hésita.

« Je ne te conseille pas de choisir quelqu’un au hasard, » poursuivit An Long en toute sincérité. « Si cela fait aussi mal que tu le penses, tu risques de perdre le contrôle de tes feux spirituels, ce qui serait très dangereux. L’idéal serait quelqu’un qui connaît bien ta personnalité et qui a suffisamment de puissance pour gérer la situation. »

Song Qingshi répondit : « J’ai confiance en ma maîtrise du Feu Fantôme. Tant que j’ai mon énergie spirituelle, je peux le contrôler, même si je perds connaissance. »

Agitant une queue de loup imaginaire, An Long continua sérieusement : « Toi, le Seigneur de la Vallée de la Médecine, avec ta réputation légendaire, qui oserait te toucher ? As-tu des amis dans le monde immortel capables de faire cela ? À moins que je ne me sacrifie pour t’aider à faire des recherches médicales sur ce ressenti... »

Bien que Song Qingshi trouve son approche étrange, l’analyse et la théorie étaient correctes. Il réfléchit un long moment avant de décliner l’offre : « Non. »

Pour lui, en tant que médecin, il n’y avait rien de honteux à discuter de ces sujets. Ces comportements relevaient des instincts humains fondamentaux, essentiels pour la reproduction. De plus, il ne voyait aucune honte dans les relations entre personnes du même sexe, car même dans la nature, des comportements similaires existaient chez presque toutes les espèces. Même parmi ses souris de laboratoire, certains mâles montraient un intérêt pour d’autres mâles. Par conséquent, il abordait ces sujets avec sérénité, comme lorsqu’il discutait avec ses collègues des maladies vénériennes historiques, des problèmes gynécologiques complexes ou de la prévention du SIDA. Il ne trouvait pas cela gênant.

S’il refusait la proposition d’An Long, c’était pour une raison simple : An Long était hétérosexuel, et il n’avait pas à forcer quelqu’un qui aimait les femmes à s’impliquer dans ce genre d’expérience. En outre, Song Qingshi avait été élevé dans un environnement strict et n’acceptait pas qu’on joue avec les sentiments. Il croyait qu’un homme devait assumer ses actes, que ce soit envers un homme ou une femme, et viser une relation durable, voire un mariage ou un partenariat spirituel.

En résumé, il n’avait aucune envie de se sentir responsable de ce Malamute !

Rester bons amis était suffisant. S’il ramenait An Long chez lui, il était sûr que la Vallée de la médecine serait réduite en cendres.

Voyant son hésitation, An Long pensa qu’il y avait une chance et essaya de le convaincre en vantant ses qualités physiques et ses capacités, mais il était si pressé qu’il laissa transparaître un enthousiasme suspect.

Song Qingshi, méfiant, demanda : « Tu ne serais pas en train de me jouer un tour, encore une fois ? »

An Long avait tellement de mauvais tours à son actif que la confiance de Song Qingshi envers lui était proche de zéro.

An Long tenta de répliquer : « Pas du tout ! »

Song Qingshi réfléchit un instant, puis souleva un nouveau doute : « Ton comportement ressemblait beaucoup à celui que tu adoptes quand tu as quelque chose à cacher ou quand tu veux te moquer de moi. »

An Long se remémora ses nombreuses "mauvais coups" passés et resta sans voix, incapable de répondre.

Song Qingshi réalisa qu’il s’égarait peut-être dans des détails inutiles. Le problème n’était pas tant que ce genre de chose soit douloureux, mais que ce soit infiniment plus insupportable si on le faisait avec quelqu’un qu’on n’aimait pas. Il décida d’abandonner le sujet : « Laisse tomber, ça n’a pas l’air d’être une bonne idée. C’est moi qui ai été imprudent et pressé. N’en parlons plus. »

An Long, voyant la viande presque entrée dans sa gueule lui échapper, alla bouder dans un coin, frustré.

À ce moment-là, Hao Long, le serpent spirituel, surgit de nulle part. Ignorant totalement la déception de son maître, il grimpa jusqu'à la taille de Song Qingshi pour réclamer des câlins.

Song Qingshi voulait bien le caresser, mais il sentit soudain, grâce à son esprit, que Yue Wuhuan venait de se réveiller. Il arracha le serpent de sa taille et le jeta sur An Long avant de s’enfuir précipitamment.

Hao Long, essuyant un échec total dans sa tentative de chercher de l’attention, resta figé, hébété.

An Long lui tapota la tête pour le consoler : « Ne sois pas triste. »

*

Yue Wuhuan s’était réveillé. Il resta assis au bord du lit, hébété pendant un moment. Sa respiration était plus stable, mais son esprit était toujours dans le chaos. Des fragments de souvenirs tourbillonnaient sans ordre dans son esprit : la réalité hideuse et écœurante, le bonheur et la douceur illusoires de son rêve. Il désirait cet homme, au point d’en devenir fou.

Tremblant, il se leva lentement et marcha vers le miroir. Il fixa la tache de naissance en forme de grain de beauté sous son œil gauche et une pensée étrange lui vint à l’esprit.

Si cette tache disparaissait, redeviendrait-il celui qu’il était dans son illusion, celui que cet homme aimait?

Il balaya la pièce du regard. Toutes les armes ou objets dangereux avaient été soigneusement retirés. Alors, il brisa une boîte en porcelaine posée sur la table, ramassa un éclat et commença à gratter la tache sous son œil. Sa main tremblait, et la porcelaine n’était pas assez tranchante. Mais peu importait, il ne ressentait ni douleur ni la chaleur du sang coulant le long de ses doigts. Devant le miroir, il grattait encore et encore, jusqu’à ce qu’il parvienne finalement à retirer le grain de beauté. Triomphant, il le tint dans sa paume, ravi.

La porte s’ouvrit alors. Sous une lumière éclatante, son jeune maître apparut devant lui.

Avec un sourire plein d’espoir, Yue Wuhuan dit docilement : « Qingshi, tu es revenu ? »

Song Qingshi, en entrant, vit un Yue Wuhuan couvert de sang, un éclat de porcelaine à la main et son visage mutilé. Il fut tellement choqué qu’il faillit s’écrouler.

Il avait juste touché cette tache une fois par curiosité ! Fallait-il aller jusqu’à la gratter pour autant ?!

Song Qingshi se précipita, arracha l’arme improvisée et le morceau de chair sanglante de sa main, et se mit à soigner la blessure sur son visage.

Yue Wuhuan avait tracé des coupures irrégulières et chaotiques qui avaient presque détruit la moitié de son visage parfait. Pourtant, il continuait de sourire à Song Qingshi, parlant doucement pour le rassurer : « Ne t’inquiète pas, je vais bien. »

D’une voix tremblante, Song Qingshi le réconforta sans cesse : « Oui, tu vas bien, tout va bien. Tu es d’affinité bois, il n’y aura pas de cicatrices. »

Il ne savait pas si ses paroles étaient destinées à calmer Yue Wuhuan ou à se calmer lui-même.

Les cicatrices n’étaient pas le véritable problème. Ce qui le terrifiait, c’était que son esprit semblait déjà brisé. Que faire dans ce cas ?

Song Qingshi sentait qu’il était lui-même au bord de l’effondrement.

« Complètement fou ? » An Long, accompagné de Hao Long, passa furtivement la tête pour observer la situation. Il comprit que, s’il ne sortait pas quelques trésors précieux de son coffre pour se faire pardonner, il risquait de ne plus jamais être autorisé à franchir les portes de la Vallée de la Médecine.

« Un type avec un esprit dérangé, malade à ce point, qu’est-ce qu’il peut bien accomplir ? Qu’est-ce que je suis en train de faire, à agir aussi bêtement ? Pourquoi je vais chercher des ennuis avec lui ? »

An Long s’enfonça dans un profond doute existentiel…

 

Traduction: Darkia1030