Little mushroom - Chapitre 75 – C’est parce que vous êtes d’un caractère noble et irréprochable.
L'avertissement de la base nord était concis.
Pauli déclara: "Ils l'ont constaté aussi."
An Zhe regarda dehors.
L’Institut de recherche des Highlands se trouvait sur la plus haute montagne. En regardant vers le bas, ils pouvaient voir les Abysses. L'énorme zone de faille ressemblait à une plaie féroce sur la peau gris pâle de la terre. La forêt dense et les marais étaient le plasma et le pus de cette blessure. Au loin, vers l'est lointain il y avait la mer ou un immense lac. Bref, on n’en voyait pas la fin. Pendant les périodes de silence total, les murmures se mêlaient au bruit du vent, et le vaste rugissement des vagues était à peine audible dans le brouillard.
Bref, c'était comme un monstre se tenant tranquillement au sol.
Ce n'était pas les Abysses qu'An Zhe connaissait. Il en avait déjà fait l'expérience. Les Abysses du passé était un lieu plein de sang et de pillage. Il n'avait jamais été aussi calme. Une ombre noire apparut dans le ciel lointain. L'ombre s'agrandit à mesure qu'elle se rapprochait et s'arrêta finalement au-dessus du bâtiment blanc.
Tang Lan rassembla ses ailes avec un cri et atterrit directement dans le couloir à l'extérieur. Puis il poussa la porte du laboratoire.
"Monsieur, je suis de retour." Il termina et se tourna vers Run. « Y a-t-il eu des attaques récemment ? »
Rum répondit: "Non."
Pauli Jones leva la tête et examina Tang Lan de la tête aux pieds, comme pour confirmer son état. Si celui qui faisait cela avait été Lu Feng, alors An Zhe aurait eu l'impression qu'il essayait de décider si cette personne devait être abattue ou non. Pendant ce temps, les yeux gris-bleu de Pauli examinaient Tang Lan avec la gentillesse d'un ancien, comme s'il craignait que Tang Lan ne soit blessé à l'extérieur.
Effectivement, Pauli l’interrogea: "Y avait-il un danger dehors?"
« C'était dangereux mais je n'ai pas été blessé. Je suis plus expérimenté. »
Pauli déclara: "Tu m'as toujours permis d'être rassuré."
Tang Lan sourit. Ses yeux étaient perçants et beaux, cachant un esprit meurtrier vicieux et froid. An Zhe se souvint que Hubbard était le meilleur chef mercenaire et que son vice-capitaine ne devait pas non plus être en reste.
Pauli Jones demanda: "Comment c'est dehors?"
Tang Lan répondit: «C'est à peu près ce à quoi vous vous attendiez. Ils ont atteint l'équilibre. »
Puis il sortit un câble de données d'un tiroir et connecta une caméra miniature à l'ordinateur. Des centaines d'images ont été chargées sur le grand écran.
À première vue, ces images étaient vides. Elles ne montraient que le paysage indescriptiblement étrange propre aux Abysses, comme s'il s'agissait d'une photo de paysage prise par des touristes curieux. Cependant, en y regardant de plus près, on ne pouvait s'empêcher de retenir son souffle.
L'une des photos les plus frappantes était un immense lac vu d'en haut. Le lac avait gelé et la glace avait recouvert les algues brunes, les branches flottantes et les feuilles mortes. Cependant, sous la couche de glace vacante, une énorme ombre de forme irrégulière était visible : c'était le dos d'un organisme aquatique, et il restait tranquillement dans l'eau, son ombre comme une peinture abstraite.
Juste au bord de ce lac, des lianes grises s'enchevêtraient autour des branches mortes de la forêt dense. La photo suivante était un gros plan des lianes. L'apparence en était aussi lisse qu'un ver de terre et il y avait des motifs radiaux en forme d'étoile sous l’écorce. Les vaisseaux sanguins noirs semblaient s'agiter encore et encore. An Zhe s'est immédiatement rendu compte que ce n'était pas une plante ordinaire. Les lianes à travers la forêt étaient toutes des monstres avec les mêmes tentacules.
"Je n'ai pris qu'une seule photo ici. Elle m'a remarqué", déclara Tang Lan.
Pauli prit la télécommande pour parcourir les photos.
Tang Lan continua. «Ils ont traversé trois mois de tueries et maintenant ce sont tous de grands monstres. Les petits monstres sont complètement invisibles. Je me suis battu avec eux quelques fois. Monsieur, je suis sûr que de tout l'institut, je suis le seul à avoir la force de leur échapper mais je ne peux pas tous les combattre. De plus, tous les monstres des Abysses sont polymorphes. Je ne sais pas à quel point ils sont dangereux maintenant. »
"Je vois." Pauli hocha lentement la tête, ses yeux gris-bleu montrant une expression solennelle. « Si les gènes sont une ressource, alors ils ont achevé l'intégration au sein de les Abysses. Maintenant, les monstres ont également atteint un équilibre des pouvoirs et leur intelligence a pu être grandement améliorée au cours du processus d'intégration. Ils comprennent qu'une bataille peut entraîner des pertes pour les deux côtés. Si cette supposition est correcte, certains monstres devraient maintenant quitter les Abysses et chasser vers l'extérieur. Les humains sont certainement également l'une des cibles de leurs chasses, mais c'est juste qu'ils ne l'ont pas remarqué pour le moment. Nous devrons nous préparer à nous défendre contre l'attaque collective des monstres à tout moment. »
"C'est effectivement le cas", déclara Tang Lan. "Mais il y a une chose qui diffère de votre conjecture."
"Qu'as-tu trouvé?"
Tang Lan contrôla l'ordinateur et afficha une image. Il était difficile d'imaginer à quel point cette photo était hideuse. An Zhe n'avait aucun sens de l'esthétique, mais il était sûr que cette photo pouvait être qualifiée de laide, car elle avait le plus grand impact sur les sens humains. À la surface de deux mollusques denses se trouvaient des organes qui ne pouvaient être décrits avec le langage humain. Ils avaient tendu leurs tentacules recouverts de mucus pour interagir l'un avec l'autre. Sur la photo suivante, leurs tentacules s’étaient séparés. Sur la photo d'après, l'un d'eux se dirigeait dans une autre direction.
"J'ai observé six cas de situations similaires. Les monstres n'ont pas occupé leurs territoires individuels en restant immobiles comme vous l'aviez initialement prédit. Ils ont parcouru les Abysses, se testant mutuellement puis se séparant. » La voix de Tang Lan est devenue solennelle et basse. «Je soupçonne que le pire est en train de se produire. Monsieur, ils semblent communiquer. Je ne sais pas ce qu'ils communiquent, mais chaque fois qu'ils entrent en contact les uns avec les autres, je peux sentir les fluctuations en eux devenir plus fortes. »
Il poursuivit: "Je soupçonne qu'ils se perçoivent et testent si l'autre a les gènes dont ils ont besoin."
"Probablement," répondit Pauli. "Dans l'institut, tu es l'une des personnes les plus sensibles à cette volatilité."
"Je suis devenu encore plus sensible à cela récemment." Le visage de Tang Lan pâlit. "C’est partout dans l'air et chaque monstre l'a. Parfois, j'ai l'impression que même les pierres au sol vibrent. Il devient de plus en plus difficile de continuer à penser. Je n'aurais pas dû revenir si tôt mais je sens que mes propres fluctuations s'y intègrent. Monsieur, je… je suis un peu anormal. »
Pauli lui tint la main, la voix calme. "N'aie pas peur."
« Il y a 100 ans, lorsque la séquence génétique d'un organisme était le plus stable, certaines espèces étaient extrêmement sensibles aux changements du champ magnétique. Il se trouve que tu as fusionné avec une de ces créatures. » (NT : il est en effet démontré que certains animaux sont sensibles aux ondes électro-magnétiques ; c’est le cas des oiseaux migrateurs, des dauphins et des salamandres entre autres)
« Cependant, ce n'est pas le champ magnétique. Je peux sentir que le champ magnétique est un autre type de fluctuation. » Tang Lan ferma les yeux. Il s'agenouilla à moitié, son front contre le dos de la main de Pauli alors qu'il parlait d'une voix rauque : « Monsieur, comprenez-vous déjà ce qui se passe ? Vous n'avez pas semblé vous étonner quand j'ai dit cela. »
Il poursuivit : « Pourtant, vous ne nous le direz pas parce que la vérité est quelque chose que nous ne pouvons pas nous permettre. Cependant, j'ai vraiment..."
Plus il parlait, plus ses paroles devenaient intermittentes et à la fin, il ne put plus continuer.
"N'aie pas peur, n'aie pas peur... Mon enfant." La main droite de Pauli saisit l'épaule de Tang Lan, sa voix comme un doux océan. "Je te protégerai jusqu'au dernier moment de ma vie."
Tang Lan leva la tête et regarda directement Pauli Jones alors qu'il jurait solennellement: "Nous vous protégerons également, vous et cet institut, jusqu'au dernier moment."
« Je ne te l'ai jamais demandé mais si le jour vient où l'institut n'existe plus… » Pauli parla lentement. « Je te demande de ne pas plonger dans le flot de monstres et d'espèces exogènes. Au lieu de cela, va au nord pour protéger la base humaine. »
« Les juges tueront toutes les espèces xénogènes. La base ne nous acceptera jamais. »
Pauli regarda dans le crépuscule sauvage.
"Même ainsi, au dernier moment, je veux toujours croire en la bonté et la tolérance de la race humaine."
Les lèvres de Tang Lan se courbèrent légèrement alors qu'il regardait Pauli Jones. "C'est à cause de votre caractère noble, et irréprochable."
Pauli sourit et secoua la tête.
*
Après le départ de Tang Lan, le niveau d'énergie de la Cage Simpson a atteint une valeur critique. Une lumière écarlate éblouissante brillait sur la plate-forme sous le bâtiment blanc et une vague de chaleur s'éleva. S'il n'était pas clair qu'il s'agissait d'un champ de haute énergie créé par la machine pour capturer la fréquence de vibration des particules de base et suivre l'interaction de ces particules de base, An Zhe pensait qu'il y avait presque une mer de feu déchaînée en bas.
Le grand écran du laboratoire était le terminal et la table d'opération de la Cage Simpson. Cependant, en raison de défauts de conception, il était parfois nécessaire d'ajuster manuellement les leviers de certains appareils de précision lors de la descente s'ils voulaient ajuster les paramètres de la Cage Simpson.
Sur grand écran, les lignes étaient toujours confuses mais elles n'étaient pas statiques. Chaque fois que Pauli ajustait les paramètres, ces lignes passaient d'un type de désordre à un autre type de désordre, finissant par s’enchevêtrer.
Pourtant, Pauli a analysé les lignes, calculé les fonctions, ajusté les paramètres et changé la fréquence de réception encore et encore. Les lignes en constante évolution dansaient sur l'écran.
La musique interrompit les pensées d'An Zhe. Le vieux magnétophone dans le couloir jouait la tumultueuse Symphonie n° 5, la Symphonie du destin (1). Rum se tenait près de la fenêtre avec une partition devant lui. Il jouait de l'harmonica sur la partition, imitant la mélodie de la symphonie. On ne sait pas combien de temps il lui a fallu pour s'arrêter.
Il demanda : « Comprends-tu la musique ? »
An Zhe secoua la tête.
Run montra le magnétophone. "Après avoir écouté un morceau, es-tu capable de savoir comment le jouer ?".
An Zhe secoua la tête un peu plus rapidement. Il ne pouvait apprécier qu'un dix millième de la complexité de cette symphonie, et il était encore moins capable de la reproduire.
"Il faut avoir une partition", Rum tourna la partition et murmura.
Il avait prononcé partition mais ses yeux étaient sur l'écran au milieu du laboratoire.
C'était comme si une corde virtuelle dans le ciel se déplaçait doucement. Le chaos et les pensées complexes devinrent instantanément clairs. An Zhe ouvrit soudain de grands yeux. «La volatilité est une symphonie. Pauli veut trouver la partition. Alors… alors il pourra faire beaucoup de choses. »
Rum regarda An Zhe avec des yeux noirs. "Tu es plus intelligent que moi."
An Zhe regarda également l'écran. Le secret du désastre de la distorsion pouvait-il être analysé à partir de ces lignes ? Ses yeux étaient perdus.
Ou peut-être que ce chaos sans fin était déjà une vérité dans un autre sens.
Un silence indescriptible enveloppa le laboratoire et An Zhe baissa la tête. Le destin de l'humanité était aussi insaisissable que cette ligne. Tout cela n'avait peut-être rien à voir avec un champignon mais il avait parfois l'impression qu'il avait du mal à respirer.
Il était difficile d'expliquer pourquoi, mais ses doigts se posèrent sur le clavier alors qu'il faisait face au canal de communication avec la base nord.
Les mouvements de ses doigts n'étaient plus souples, tout comme son mycélium ne pouvait plus s'étirer. Ses doigts tremblaient de manière incontrôlable lorsqu'il appuyait sur les touches. Sans fibre optique ni station de base, le coût de la communication était très élevé. Tout comme la communication télégraphique du siècle dernier, il devait économiser des mots.
Il envoya :’ Comment va la base ?’
Cela semblait une coïncidence absurde. À peu près au même moment, le canal de communication s'est allumé et un message similaire a été envoyé depuis la base nord.
«’Comment va l'institut de recherche ? ‘
La base nord pourrait payer n'importe quoi pour la pureté des gènes humains. Ils détestaient les monstres et le tribunal ne tolérerait jamais les espèces xénogènes. Il semblait que seul le Dr Ji, un scientifique au bon cœur, tolérait l'existence de la faction de la fusion et se souciait de son état.
‘Tout va bien’, répondit An Zhe.
Prétendre que tout allait bien était une compétence humaine unique qu'il avait apprise. Quelques secondes plus tard, l'autre côté a également répondu. ‘La base aussi.’
An Zhe réfléchit longuement devant le canal de communication avant de tapoter lentement la phrase suivante : ‘Le juge va-t-il bien ?’
Il y réfléchit et appuya sur la touche de retour arrière, supprimant les mots.
Juste après qu'il l'ait supprimé, la base nord a envoyé un message.
‘L'institut a-t-il récemment découvert un nouveau type d'individu variant ?’
An Zhe réfléchit un peu avant de répondre : ‘Pas encore.’
Il a répondu avant d'envoyer la phrase révisée.
‘Le tribunal va-t-il bien ?’
L'autre côté répondit: ‘Le tribunal fonctionne.’
An Zhe se sentit un peu plus détendu.
‘Bonne chance.’ Il a poliment envoyé une remarque finale. ‘Bonne nuit.’
La réponse de l'autre partie a également été brève.
‘Bonne nuit.’
En regardant ces deux mots, An Zhe retira ses doigts du clavier et sortit l'insigne d'argent. Son corps s'affaiblissait de plus en plus vite et atteignait ses derniers instants. Ses articulations étaient raides alors qu'il essayait de tenir l'insigne dans sa main.
Il y eut du bruit dans les escaliers. C'était Pauli qui montait mais au lieu de retourner dans la chambre, il se tint silencieusement contre les balustrades du couloir, dos à la chambre.
An Zhe se leva, ouvrit la porte et vint vers Pauli. La musique s'est arrêtée. En bas, la Cage Simpson brûlait violemment et la nuit était venue. Des cieux sombres et lointains vint un long hurlement.
Pauli lui demanda: "Tu ne restes pas à l'intérieur?"
An Zhe secoua la tête en pensant à ce que Tang Lan avait dit plus tôt.
« Monsieur, avez-vous compris quelque chose ? »
Pauli le fixa. "Parfois, je pense que tu es plus réceptif que n'importe qui d'autre. Tu es spécial. Tu sembles être plus faible que tout le monde et pourtant tu ne sembles avoir peur de rien.
Les paupières d'An Zhe légèrement baissées.
Il murmura. "Mm."
"Cependant, je n'ai pas la réponse finale." Pauli tendit la main et attacha la première rangée de boutons du manteau d'An Zhe. « Aimerais-tu entendre une histoire simple ? »
"Oui."
"C'était l'hypothèse d'un scientifique il y a longtemps." Dans le vent froid, la voix de Pauli était très douce.
"Supposons que tu aies voyagé dans le temps aujourd'hui et que tu sois arrivé à dans un an. Là, tu as de nouveau voyagé dans le temps et es revenu un an en arrière pour arriver ici", déclara Pauli. "Alors juste devant moi se trouveraient deux versions identiques de toi."
An Zhe y réfléchit. "Oui."
"Tu sais que la matière est constituée d'unités appelées atomes et qu'il y a des électrons dans l'atome. Il n'y a pas deux feuilles identiques dans le monde, mais tous les électrons sont identiques. Alors, comment sait-on que 2 électrons sont deux individus différents ? »
An Zhe répondit après y avoir réfléchi: "Ils sont dans des positions différentes."
« Mais l'espace n'est pas une mesure de position, pas plus que le temps. Ces deux choses n'ont de sens pour les humains que dans quatre dimensions (NT : la théorie des 4 dimensions est un concept mathématique ajoutant une 4è dimension aux 3 existantes, cette dimension étant souvent le temps. Utilisé en particulier en géométrie non euclidienne et pour la relativité restreinte). Dans une dimension supérieure, le temps et l'espace ne sont que des coordonnées horizontales et verticales sur un morceau de papier blanc, comme celui-ci. » Pauli sortit un morceau de craie de sa poche et fit un point sur la rambarde devant eux. « Un électron se déplace librement dans le temps et dans l'espace. La gauche c'est le passé et la droite c'est l'avenir. Il a traversé le temps et a avancé d'une seconde. »
Puis sa plume dessina une barre oblique en bas à droite. "Après avoir traversé le temps, c'est ici."
"Après cela, il a traversé le temps à nouveau et a reculé une seconde, s'arrêtant ici." La craie a tracé une ligne en bas à gauche.
Il y avait maintenant trois points et deux lignes sur la balustrade. Ils formaient un angle aigu avec l'ouverture à gauche et les deux points à gauche formaient une ligne verticale. Polly a tracé cette ligne verticale. « Notre temps est dans cette seconde. Que voyons-nous en ce moment ? » (2) (NT : petit schéma en fin de chapitre….)
An Zhe y réfléchit longuement.
À la fin, il dit: "Deux électrons."
« Oui, nous voyons deux électrons identiques. Ils sont essentiellement un mais ils apparaissent à deux endroits en même temps. » Pauli ajouta d'innombrables électrons ressemblant à des étoiles à côté des 3 points. « Une estimation inexacte est que notre planète comporte 10 à la puissance 51 électrons identiques qui composent ce que nous pouvons voir (NT : mettez 52 zéros après 1 pour avoir une idée de l’ampleur dont il parle : 10000…0). Comment peut-on prouver que cela n'est pas le résultat de l'oscillation répétée du même électron et de ses allers-retours des millions de fois sur l’axe du temps ?"»
"De même, comment pouvons-nous prouver que l'existence de l'univers entier que nous voyons n'est pas le résultat d'une ou plusieurs particules de base vibrant dans l'espace et le temps ?"
An Zhe fronça les sourcils. Bien entendu, il n’avait aucun moyen de le prouver.
Il avait du mal à digérer cette phrase avec sa cognition limitée.
"Alors vous et moi sommes le même électron ?"
Pauli sourit doucement et plaça son bras autour de l'épaule mince d'An Zhe, comme un aîné tenant un jeune enfant innocent.
"Ce n'est qu'une des innombrables conjectures que les humains ont faites sur la nature du monde. Ce n'est pas la vérité, et ce n'est pas incompatible avec la vérité. Il nous est difficile de vérifier. J'ai juste donné cet exemple pour montrer que notre corps, notre esprit et notre volonté sont plus insignifiants qu'un électron par rapport au monde entier. »
An Zhe regarda au loin. Il n'était qu'un simple champignon sans le cerveau d'un scientifique. Il n'avait pas de connaissances riches ni la clairvoyance pour penser au-delà des émotions. Il ne pouvait pas comprendre un tel système et savait seulement que le monde était vraiment devant lui. Il déclara gentiment: "Mais nous sommes tous réels."
Au moment où il a parlé, l'expression de son visage s'est soudainement crispée pendant une seconde. Son front se plissa et ses poumons lui faisaient mal.
Il s'agrippa à la balustrade, son corps tremblant violemment alors qu'il crachait une grande gorgée de sang puis il tomba en avant. Le bras de Pauli trembla alors qu'il attrapait An Zhe en train de chuter et le tenait dans ses bras.
"Rum!" Il cria en direction du labo, sa voix anxieuse.
An Zhe savait que Pauli voulait le guérir ou trouver la cause de sa maladie, en utilisant la mesure de sa température, des antibiotiques, un défibrillateur… ces choses. Il cracha plus de sang et Pauli tendit la main pour l'essuyer avec sa manche. Du sang tacha les manches de la chemise blanche. An Zhe regarda Pauli et sourit à contrecœur.
"Il n'y a pas besoin." Il attrapa lentement le bras de Pauli avec ses doigts, haletant plusieurs fois avant de chuchoter, "... Je n'en ai vraiment pas besoin."
Pauli le tenait fermement. "Tiens bon encore."
"Je ..." An Zhe le regarda dans les yeux et c'était comme voir la mer et le ciel sans fin.
Il allait bien. Il n'était pas encore à son moment le plus faible. Au moins, il pouvait bouger et ses pensées étaient claires.
Il mourrait, que ce soit aujourd'hui ou demain. Il pourrait mourir comme ça. Pauli était le meilleur aîné du monde, le traitant comme un enfant bien-aimé. Il était si bon avec lui… À la fin de sa vie, il pourrait mourir avec un amour si tendre, quelque chose que le reste des gens de cette époque n'osaient pas attendre. Mais s’il mourait ainsi, Pauli ,’accepterait pas sa mort arbitraire. Incapable de trouver la cause de la maladie, il ne pouvait rien faire pour l’aider. An Zhe savait que pour les scientifiques de l’humanité, de tels problèmes insolubles et ces vérités inexplicables constituaient les frustrations les plus profondes.
Il pouvait aussi mourir comme un monstre – il n'avait plus peur que Pauli le déteste. Pauli lui en avait assez donné.
"Je suis désolé je suis désolé." Il leva les yeux vers Pauli. Il était soulagé de prendre sa décision et la douleur n'était rien. Il répéta encore : « Je suis désolé Pauli.
Pauli l'observait.
« Je… » An Zhe sourit. Il toussa quelques fois et ses larmes coulèrent, exactement à la température que son sang. Il haleta fortement avant de réussir à dire à Pauli: « Je… t'ai menti. Je ne suis pas une personne infectée par un monstre, j'étais un monstre à l'origine. Je ne suis pas humain. J’ai… mangé les gènes d'un humain. Je… ressemble juste à un humain. »
Pauli sembla abasourdi pendant une seconde. Puis l'instant d'après, ses yeux gris-bleu s'emplirent d'une douce tristesse. "Peu importe ce que tu es, attends, d'accord ?"
An Zhe secoua la tête.
"Je ne suis pas malade. Ma durée de vie… est ce qu’elle est. Elle ne peut pas être changée… Tu n'as plus besoin de m'aider."
Il finit de parler et Pauli le serra dans ses bras. Ils se regardèrent, tombant dans un triste silence.
L'espérance de vie établie d'une espèce était plus inexorable que la maladie ou les blessures. Dès le moment de la naissance, leur fin était déterminée. Personne ne pourrait éviter ce seuil, le seuil fixé par Dieu—si Dieu existait.
Dans le silence indescriptible, le vent froid rugissait. Au milieu du bruit du vent, Pauli s’adressa à An Zhe.
Au moment où la voix parvint à ses oreilles, son cœur trembla brusquement. Cette phrase était si familière qu'il semblait revenir à cette nuit il y a trois mois où il avait affronté Lu Feng. Le vent ce jour-là était également très fort.
Pauli Jones demanda: "Qu'y a-t-il dans ta main?"
Pour cette personne, An Zhe n'avait rien à cacher. Il ouvrit lentement ses doigts. Un insigne d'argent était toujours dans sa main, symbole de l'identité d'un juge. Les yeux de Pauli tombèrent sur l'insigne et An Zhe jura qu'il pouvait voir une sorte de tristesse lointaine dans les yeux gris-bleu. Puis Pauli Jones sortit quelque chose de la poche de sa veste et le tint dans sa paume.
Les yeux d'An Zhe s'écarquillèrent légèrement. C'était aussi un insigne d'argent. C'étaient des badges presque identiques.
« Vous… » An Zhe fit une pause. « Vous êtes… un juge ? »
"Je l’étais autrefois." chuchota Pauli: "Je suis un transfuge."
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Note du traducteur
- Symphonie n° 5 de Beethoven, probablement la plus connue de ce musicien avec la n°9 (ode à la joie, devenue l’hymne de l’Union Europénne) lien
- La 4è dimension
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