KOD -Chapitre 53 - Le monde réel

 

Vie quotidienne



Certaines personnes se plaignaient toujours de la monotonie de la vie, mais ce n’est qu’après avoir vécu dans le monde à l'intérieur des portes qu’on réalisait que cette simplicité était en réalité une forme de chance.

La circulation, les passants, jusqu’aux nuages à l’horizon et à l’herbe au bord de la route, tout devenait réconfortant par contraste du monde à l'intérieur des portes. Lin Qiushi et Cheng Qianli étaient installés sur des fauteuils sur la terrasse du toit de la villa, se baignant dans la chaleur du soleil.

Toast et Lizi étaient aussi à côté d’eux ; Toast remuait la queue en sautillant sur le toit, tandis que Lizi était allongé près de Lin Qiushi, étirant son corps et prenant le soleil avec eux.

Cheng Qianli s’endormit rapidement, sa respiration devint progressivement régulière.

Alors que Lin Qiushi sombrait lui aussi dans la somnolence, il entendit des voix se disputer en bas. Ce bruit lui parut lointain, inaudible pour une personne normale, mais Lin Qiushi saisit ce son à peine perceptible.

Au début, il pensa que c’était une dispute parmi les autres habitants de la villa, mais en écoutant attentivement, il sentit que quelque chose n’allait pas, car les voix semblaient être celles de Ruan Nanzhu et de Cheng Yixie.

« Pourquoi fais-tu ça, Cheng Yixie ? Si ton frère l’apprenait, il ne serait pas content non plus», disait Ruan Nanzhu. Bien que sa voix paraissait calme à première écoute, Lin Qiushi savait, d’après son expérience récente avec lui, qu’il était en colère.

« C’est pour ça que je ne le laisserai pas savoir », répondit Cheng Yixie. « Ruan ge, je sais que tes intentions sont bonnes. »

« Tu comprends ? » demanda Ruan Nanzhu.

« Mais je n’ai pas le choix », poursuivit Cheng Yixie.

Ruan Nanzhu rétorqua froidement : « J’espère que tu comprends. »

Lin Qiushi n’avait jamais entendu Ruan Nanzhu parler d’un ton aussi glacial, comme s’il avait totalement perdu espoir envers son interlocuteur. Après ces paroles, il se tut. Cheng Yixie ne chercha pas à se justifier davantage.

Cette conversation était très confuse. Si ce n’était leurs tons étranges, Lin Qiushi n’aurait même pas deviné qu’ils se disputaient. Après réflexion, il supposa que cela avait un rapport avec Cheng Qianli, mais il ignorait de quoi il s’agissait exactement.

La chaleur du soleil faisait somnoler Lin Qiushi. Une fois le silence revenu, il ferma lentement les yeux. Juste au moment où il allait s’endormir, une ombre se posa soudainement devant lui. Lin Qiushi sursauta, ouvrit les yeux et vit Ruan Nanzhu debout à côté de lui, le regardant calmement.

Lin Qiushi eut un sursaut, se leva de sa chaise et demanda : « Tu as besoin de quelque chose ? »

Ruan Nanzhu répondit : « Prépare-toi, on va sortir rencontrer quelqu’un. »

Lin Qiushi acquiesça : « D’accord… »

Ruan Nanzhu tourna les talons après avoir dit cela, sans expliquer pourquoi ils sortaient ni qui ils allaient voir.

Mais ces choses finiraient par être découvertes tôt ou tard. Lin Qiushi changea de vêtements, monta dans la voiture de Ruan Nanzhu, et ils prirent la route vers le centre-ville.

Arrivés en ville, ils entrèrent dans une résidence discrète, qui semblait particulière, avec une sécurité très stricte.

Lin Qiushi, curieux, demanda : « Qui vit dans ce quartier ? »

« Des hommes d’affaires riches, des politiciens influents, et des stars très célèbres », répondit Ruan Nanzhu. « La personne qu’on va voir est spéciale. Toi, reste en retrait et écoute. »

« D’accord », acquiesça Lin Qiushi.

Après avoir garé la voiture, Ruan Nanzhu emmena Lin Qiushi dans une jolie villa blanche.

À l’intérieur, Lin Qiushi aperçut une d'apparence familière, Tan Zaozao, qu’il avait déjà vue. Elle portait une belle robe blanche élégante et siégeait sur le canapé, tenant un verre de vin rouge. Elle leur offrit un sourire réservé.

Il fallait reconnaître que Tan Zaozao avait une forte présence, mais Lin Qiushi, ayant déjà vu son apparence dans le monde derrière la porte, ne ressentait aucune pression.

« Qiushi, tu es là », dit Tan Zaozao en souriant. « Ruan ge… »

« Où est-il ? » demanda Ruan Nanzhu en allant droit au but.

Tan Zaozao répondit : « Il n’est pas encore arrivé. C’est un homme fier, ses paroles peuvent paraître dures, ne le prends pas mal, je vais essayer de le convaincre. »

Ruan Nanzhu s’assit à côté d’elle, l’air indifférent.

« Il ne croit pas trop aux fantômes et autres choses surnaturelles », expliqua Tan Zaozao. «Je ne pensais pas qu’il rencontrerait le monde des portes… »

« Il te l’a dit lui-même ? » demanda Ruan Nanzhu.

« Oui, il pensait qu’il avait fait un rêve. Alors… Ruan ge, penses-tu pouvoir accepter ce travail ? »

Ruan Nanzhu répondit : « On verra après avoir rencontré la personne. »

Tan Zaozao acquiesça.

Alors qu’ils parlaient, un homme entra. Lin Qiushi le regarda à peine mais son expression devint surprise. Cet homme, il le connaissait — en fait, 80 % du pays le connaissait. C’était l’acteur le plus en vogue du moment. Contrairement à la plupart des stars, il excellait dans son art et avait déjà franchi les frontières nationales pour devenir réalisateur. Il avait dirigé plusieurs films à succès.

Même quelqu’un comme Lin Qiushi, qui ne s’intéressait pas trop au show-business, avait vu ses films.

« Zhang Yiqing », appela Tan Zaozao.

Zhang Yiqing semblait plus âgé que Tan Zaozao et, sans parler de son statut dans le milieu artistique, son apparence tranchante et agressive donnait l’impression d’une personne difficile à approcher.

D’après ce que disait Tan Zaozao, c’était bien le cas.

« Voici Ruan Nanzhu, et Lin Qiushi », présenta-t-elle en souriant. « Ce sont les personnes dont je t’ai parlé… »

Zhang Yiqing les salua poliment, sans chaleur ni froideur.

« Ce sont eux qui m’ont accompagné dans la porte, Ruan ge est très fiable, une personne rare dans ce milieu », expliqua Tan Zaozao. « Avec eux, tu ne seras jamais… »

Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase que Zhang Yiqing fit un geste pour l’arrêter et dit : « Je sais déjà. »

Tan Zaozao demanda alors : « Alors, tu… »

Zhang Yiqing répondit : « Je dois encore réfléchir. » Il échangea un regard intense avec Ruan Nanzhu, deux personnes l’une comme l’autre loin d’être faciles à gérer. Ce regard avait un petit air d’électricité statique.

Tan Zaozao fut surprise : « Mais ta prochaine porte va bientôt s’ouvrir, et si… »

Zhang Yiqing répondit : « Une autre organisation m’a contacté. »

Ruan Nanzhu demanda : « Le Cerf Blanc ? »

Zhang Yiqing : « Tu connais ? »

Ruan Nanzhu sourit avec dédain, se leva et dit à Lin Qiushi : « Qiushi, on y va. »

Lin Qiushi acquiesça et suivit Ruan Nanzhu, prêt à partir.

Tan Zaozao, paniquée, s’écria : « Yiqing, pourquoi cherches-tu le Cerf Blanc ? Dans ce milieu, c’est Obsidienne qui est le plus fiable, j’ai eu tant de mal… »

Zhang Yiqing répliqua : « Comment savoir qui est le plus fiable si je n’ai pas essayé ? »

Tan Zaozao, irritée, répondit : « Je l’ai testé avec ma vie ! Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Qu’est-ce que les gens du Cerf Blanc t’ont dit — »

Ruan Nanzhu partit sans hésiter, ignorant complètement les appels de Tan Zaozao, sans même se retourner.

Tan Zaozao, désemparée, ne put que regarder Ruan Nanzhu partir.

Dans la voiture, Lin Qiushi demanda, curieux : « Nanzhu, on part juste comme ça ? »

Ruan Nanzhu répondit : « Oui. »

Lin Qiushi demanda : « C’est Li Dongyuan qui a fait ça ? »

Ruan Nanzhu sourit avec une pointe d’ironie : « Qui d’autre ? » Il n’avait plus l’air aussi tendu qu’à l’intérieur de la maison. « Mais c’est un type difficile à gérer, si ça tournait mal, ça serait un vrai problème. Ce n'est pas une mauvaise idée de le donner à Li Dongyuan. »

Lin Qiushi se souvint de l’expression hautaine de Zhang Yiqing et trouva que ce que disait Ruan Nanzhu avait du sens. Ce Zhang Yiqing ne semblait vraiment pas être quelqu’un de facile, que ce soit à l’écran ou en face-à-face.

Cependant, à bien y réfléchir, au début Lin Qiushi pensait que c’était Bailu qui leur avait volé des affaires, mais plus il regardait l’expression de Ruan Nanzhu, plus il sentait que quelque chose clochait. Finalement, il ne put s’empêcher de demander : «  Nanzhu, ce ne serait pas toi qui as délibérément donné des infos au Cerf Blanc, n’est-ce pas ? »

Ruan Nanzhu, qui conduisait, sentit sa main sur le volant s’arrêter légèrement en entendant ces mots.

« C’est vrai?» Lin Qiushi saisit immédiatement le moindre détail de son expression, confirmant sa supposition. «  C’est vraiment toi qui as filé l’info iushi pensait que c’était Bailu qui leur avait volé des affaires, mais plus il regardait l’expression de Ruan Nanzhu, plus il sentait que quelque chose clochait. Finalement, il ne put s’empêcher de demander : «  Nanzhu, ce ne serait pas toi qui as délibérément donné des infos à Cerf Blanc ? »

Ruan Nanzhu : «  Hmm. »

Lin Qiushi : «  Pourquoi… »

Ruan Nanzhu répondit à la question de Lin Qiushi d’une voix très lente : «  Parce que je n’aime pas ses films. »

Lin Qiushi : «  … »

«  Bon, je plaisantais. » Ruan Nanzhu éclata de rire. «  Tu n’as quand même pas cru que je parlais sérieusement. »

Lin Qiushi : «  … » Pourquoi avait-il l’impression que Ruan Nanzhu était sérieux.

«  Après tout, c’est Tan Zaozao qui me l’a présenté. » dit Ruan Nanzhu. «  Je devais lui faire une faveur, mais s’il refuse lui-même d’accepter Obsidienne, ce n’est plus mon problème. »

Lin Qiushi : «  Alors, comment Cerf Blanc a-t-il réussi à convaincre Zhang Yiqing ? »

Ruan Nanzhu : «  Qui sait. » Il ne s’en souciait pas du tout.

Peu de temps après leur retour à la maison, Lin Qiushi reçut un appel de Tan Zaozao. Au téléphone, elle s’excusa très sincèrement pour cette affaire et demanda à Lin Qiushi de convaincre Ruan Nanzhu de ne plus être fâché.

Lin Qiushi : «  Pourquoi ne lui passes-tu pas directement un coup de fil ? »

Tan Zaozao : «  J’ai peur… »

Lin Qiushi : «  … »

Tan Zaozao : «  Toi, tu n’as pas peur de Ruan Ge ? »

Lin Qiushi : «  Au début, oui, un peu. Maintenant ça va. » L’attitude froide de Ruan Nanzhu pouvait en effet intimider, mais après l’expérience de la « porte », Lin Qiushi s’y était habitué.

«  Alors tu es vraiment fort. » s’exclama Tan Zaozao. «  Moi, je préfère quand il porte des vêtements féminins… »

Lin Qiushi pensa intérieurement en souriant : Qui n’aime pas ça ?

La prochaine porte serait la sixième pour Lin Qiushi, Ruan Nanzhu avait mentionné qu’il pourrait y aller avec Cheng Qianli. Mais comme il était encore tôt, la situation exacte n’était pas encore claire, et Ruan Nanzhu conseilla simplement à Lin Qiushi de bien se reposer et de ne pas trop y penser.

Le nouveau venu Qin Budai, amené par Yi Manman, avait franchi la deuxième porte mais était tombé dans un état dépressif, une sorte de refus de vivre. Il ne mangeait plus, ne bougeait pas, restait assis dans le salon toute la journée, perdant du poids au fil des jours.

Lin Qiushi s’inquiétait un peu pour lui, mais Chen Fei lui conseilla de ne pas trop s’alarmer, expliquant que c’était une étape que tous les nouveaux traversaient.

Lin Qiushi, un peu surpris, demanda : «  Une étape obligatoire ? »

Chen Fei : «  Oui, presque tout le monde déprime un moment, généralement entre la deuxième et la troisième porte. Si tu tiens le coup, ça va, sinon… c’est fini. »

Lin Qiushi : «  … Alors pourquoi moi, je n’ai rien eu ? »

Chen Fei lui lança un regard : «  Tu es peut-être juste costaud nerveusement. »

Lin Qiushi : «  … »

Chen Fei dit : «  Je n’ai vu que deux personnes qui n’ont pas réagi aux portes, acceptant calmement la chose, l’un c’est toi. »

Lin Qiushi : «  L’autre c’est Ruan Nanzhu ? »

Qui savait, Chen Fei secoua la tête : «  L’autre, c’est Cheng Qianli. »

Lin Qiushi : «  … »

Chen Fei : «  Après discussion, on a pensé qu’il était juste un peu lent d’esprit, incapable de comprendre ce qui se passe dans les portes. »

Lin Qiushi se remémora l’expression de Cheng Qianli qui courait après le derrière de Toast et trouva que cette explication semblait assez plausible.

«  Ruan Nanzhu a-t-il aussi eu une dépression ? » demanda Lin Qiushi, curieux.

«  Probablement. » répondit Chen Fei. «  Mais on n’était pas là, donc on ne connaît pas les détails. J’ai entendu un ancien en parler : Ruan Ge a effectivement déprimé un moment, puis ça s’est arrangé. »

Lin Qiushi : «  Cet ancien, où est-il ? »

Chen Fei resta silencieux un instant : «  Mort. Il est mort en entrant avec Ruan Ge dans la neuvième porte. »

Lin Qiushi sentit sa respiration se couper.

Chen Fei ne semblait pas vouloir s’attarder sur ce sujet, il agita la main pour lui dire de ne pas trop y penser, après tout ils étaient tous à un pas de la mort, autant profiter et savourer le moment présent.

Effectivement, pensa Lin Qiushi, les gens dans cette maison ont tous un mental très solide.

Alors que Lin Qiushi se reposait, Ruan Nanzhu ne ralentit pas son rythme. Il semblait s’être habitué à entrer fréquemment dans les portes, au moins deux ou trois fois par semaine.

Selon lui, plus on entrait dans ces portes, plus on découvrait des règles, créant comme un réflexe conditionné : on voyait une image et la réponse apparaisssait d’elle-même.

Évidemment, cela nétait possible que pour quelqu’un comme Ruan Nanzhu, car chaque porte comportait un risque, et même les vétérans ne pouvaient jamais garantir qu’ils sortiraient toujours indemnes.

Ce jour-là, Lin Qiushi et Cheng Qianli allèrent au supermarché pour acheter des ingrédients, prévoyant de faire un hot pot le soir. Sur le chemin du retour, Lin Qiushi reçut un appel de Wu Qi qui l’invitait à dîner.

«  J’ai déjà acheté les ingrédients, tu peux venir manger chez moi, sinon. » dit Lin Qiushi. « J’ai mijoté un bouillon d’os, je compte faire un hot pot. »

«  Ça marche. » Wu Qi aimait la cuisine de Lin Qiushi, et depuis que ce dernier avait déménagé, il n’était pas venu manger chez lui depuis longtemps. «  Je viens tout à l’heure, je dois apporter quelque chose ? »

Lin Qiushi : «  Amène juste ta bouche. »

«  D’accord ! » Wu Qi était content.

Lin Qiushi retourna à la villa, apporta les ingrédients dans la cuisine et commença à faire mijoter le bouillon de base. Cheng Qianli et Chen Fei l’aidèrent à préparer les légumes et la viande. Dans cette maison, seuls deux personnes savaient cuisiner : Lin Qiushi et Lu Yanxue. Ces derniers jours, Lu Yanxue était partie en voyage, la responsabilité de cuisiner incombait donc à Lin Qiushi.

Heureusement, Lin Qiushi n’avait rien contre cuisiner, donc tout se passait plutôt bien.

Quand le hot pot fut presque prêt, la sonnette de la porte retentit. Lin Qiushi alla ouvrir et vit Wu Qi debout à l’extérieur, une caisse de bière à la main.

« Hé, je vous ai apporté un peu d’alcool », dit Wu Qi.

« Super, entre », répondit Lin Qiushi en se décalant pour le laisser passer.

Ils installèrent une plaque à induction sur la table du salon, posèrent la marmite dessus,tout était prêt pour commencer à manger.

Lin Qiushi mit les bols et les baguettes en place, puis dit : « Nanzhu est en haut ? Je vais le chercher. »

« Il doit y être », répondit Chen Fei. « On ne l’a pas vu sortir aujourd’hui. »

Lin Qiushi s’apprêtait à monter chercher Ruan Nanzhu, quand il vit une grande et belle femme descendre tranquillement les escaliers. Elle portait un maquillage léger, une chemise blanche simple et un pantalon noir droit. À première vue, il était impossible de deviner son genre. Sa longue chevelure couleur encre, semblable à une cascade, était attachée en queue-de-cheval soignée, avec quelques mèches flottant près de ses oreilles.

Wu Qi la fixa, les yeux écarquillés, et donna un coup de coude à Lin Qiushi : « Qiushi… Tu abuses, franchement. Tu ne m’a pas dis qu’il y a une aussi jolie fille ici ? »

Lin Qiushi : « … » Son expression était très compliquée – cette beauté, c’était Ruan Nanzhu. Il venait probablement juste de sortir d’une porte intérieure et n’avait pas encore retiré son maquillage. Celui-ci adoucissait les traits les plus acérés de son visage, dégageant une beauté androgyne envoûtante.

D’ordinaire déjà très captivant, à cet instant, il était tout simplement irrésistible.

À voir la tête de Wu Qi, on aurait dit qu’il allait foncer vers lui pour lui demander son numéro.

Ruan Nanzhu vit aussi Wu Qi. Il leva légèrement les yeux, fit comme s’il ne l’avait pas vu, puis alla s’asseoir à côté de Lin Qiushi et, nonchalamment, prit ses baguettes et son bol.

« Je n’ai pas mis trop de piments. Si tu trouves que ça manque, ajoute un peu de sauce », dit Lin Qiushi, sachant que Ruan Nanzhu supportait mal le piment. « Tiens, la sauce. »

Ruan Nanzhu hocha la tête et commença à manger.

Quand quelqu’un est beau, tout ce qu’il fait paraît plaisant. Ruan Nanzhu, la bouche légèrement entrouverte, mâchait avec une élégance inexplicable.

Wu Qi, charmé, n’osait pas le fixer directement. Il jetait des coups d’œil furtifs comme un ado mal assuré.

Lin Qiushi, en voyant son attitude, ne savait s’il devait en rire ou en pleurer.

Ruan Nanzhu, en dehors des portes, portait une perruque, mais une fois rentré dans le monde des portes, celle-ci se transformait immédiatement en véritables cheveux. Il remarqua évidemment le regard de Wu Qi et s’interrompit dans ses gestes.

Lin Qiushi s’alarma en le voyant s’arrêter, pensant qu’il était fâché. Mais au lieu de ça, son action suivante fut de tendre la main, attraper ses cheveux et tirer brusquement –

Révélant une chevelure courte.

« Pffft !! » Wu Qi faillit s’étouffer avec sa propre salive.

Ruan Nanzhu haussa un sourcil, jeta la perruque d’un geste désinvolte, et reprit son repas avec une expression toujours aussi impassible.

« Putain… putain… », murmura Wu Qi, les yeux brillants d’émotion, se tournant vers Lin Qiushi : « Qiushi, c’est une fille ou un mec, en fait ? »

Il était probablement sous le choc et avait dit ça devant Ruan Nanzhu sans y penser.

Lin Qiushi le regarda avec pitié : « Un mec. »

Wu Qi : « … » Il se frotta vigoureusement le visage.

Lin Qiushi : « Un mec plus grand que toi. »

Wu Qi était au bord des larmes. Il avait l’impression que l’erreur en soi n’était pas le plus terrible, le pire, c’était que même après avoir vu la perruque arrachée… il le trouvait toujours incroyablement beau.

Lin Qiushi dit : « Arrête de le regarder, mange donc une boulette. » Il lui donna une boulette de bœuf, tentant de consoler son esprit proche de l’effondrement.

Wu Qi détourna enfin les yeux, mâcha la boulette tout en pleurant intérieurement, l’air complètement absent pendant tout le reste du repas.

Ruan Nanzhu, lui, mangeait avec appétit. Après le dîner, il monta se changer, enleva son maquillage, puis redescendit.

En le voyant en vêtements masculins, Wu Qi lui trouva soudain un air familier, et demanda d’un ton rêveur : « Qiushi, pourquoi je le trouve toujours aussi beau ? »

Lin Qiushi : « Parce qu’il est effectivement très beau. »

Wu Qi : « Et tu l’apprécies, toi ? »

Sa voix était un peu forte, et Ruan Nanzhu, assis de l’autre côté du canapé, tourna soudain la tête vers Lin Qiushi.

Lin Qiushi : « … Oui. » Comment ne pas l’aimer ? Qui aurait le courage de dire du mal de Ruan Nanzhu en face ?

Wu Qi : « Moi aussi je l’aime, ouiiiin… »

Lin Qiushi : « … » Ruan Nanzhu, fléau des amateurs de beaux visages.

Ce jour-là, Wu Qi subit un choc énorme. En repartant, il avait l’air d’un homme déconnecté de son âme. Lin Qiushi n’osa pas le laisser conduire seul et le raccompagna lui-même.

Arrivés chez Wu Qi, ce dernier sortit de la voiture, se mit à fumer longuement au bord du trottoir, puis dit d’un ton douloureux : « Qiushi… vivre avec quelqu’un comme ça tous les jours, tu es sûr que tu vas pas finir par dévier ? »

Lin Qiushi, interloqué : « Dévier ? Dévier comment ? »

Wu Qi : « … »

Lin Qiushi : « Qu’est-ce que tu veux dire par dévier ? »

Wu Qi : « Genre… aimer les mecs. »

Lin Qiushi : « Aimer les mecs ? » Il réfléchit un moment, puis comprit ce que Wu Qi insinuait. « N’importe quoi, y’a encore plein de jolies filles, non ? »

Wu Qi : « Hein ? Jolies filles ? J’en ai pas vu une seule ! » Il n’y avait que des mâles dans cette baraque, voyons.

Lin Qiushi se calma, mais sentit que quelque chose clochait. Quand il avait dit « jolies filles», l’image de Zhu Meng lui était venue à l’esprit… mais Zhu Meng… Bref, laissons tomber.

« Bon, j’y vais. Prends soin de toi », dit Wu Qi en lui faisant un signe de la main, montant les escaliers l’air abattu.

Lin Qiushi le regarda s’éloigner, pensif.

De retour à la villa, Cheng Qianli, Ruan Nanzhu et les autres étaient assis sur le canapé, mangeant des graines de tournesol en jouant aux cartes.

Cheng Qianli tenait deux cartes en main, l’air désespéré.

Lin Qiushi s’approcha et vit qu’il avait gardé une paire de trois.

Lin Qiushi : « … » Il recommença à douter du QI de Cheng Qianli.

Ruan Nanzhu joua tranquillement ses dernières cartes et demanda : « Tu l’as raccompagné ? »

Lin Qiushi comprit qu’il parlait de Wu Qi : « Oui. »

Ruan Nanzhu : « Il est assez fragile mentalement. »

Lin Qiushi, mi-amusé, mi-désespéré : « … Ça va encore. Tout le monde n’a pas les nerfs de Cheng Qianli. »

Ruan Nanzhu : « Alors, quand tu as su que j’étais Ruan Bai Jie, qu’as tu pensé ? »

Lin Qiushi réfléchit : « Pas grand-chose. » Il avait accepté le fait très calmement, à ce moment-là.

« Pas mal », dit Ruan Nanzhu en nettoyant les coquilles de graines de tournesol de sa main.

Lin Qiushi, qui venait de se faire complimenter sans comprendre pourquoi, était un peu gêné. Il posa alors une question qu’il se retenait de poser depuis longtemps : « Frère Ruan, tu aimes vraiment tellement t’habiller en femme ? »

Ruan Nanzhu ne répondit pas. Il tendit soudain la main, attrapa le menton de Lin Qiushi et tourna légèrement son visage : « En y regardant de près, tu as aussi de bonnes bases. »

Lin Qiushi : « Hein ?? »

Ruan Nanzhu : « Tu devrais essayer la prochaine fois. » Il lâcha son menton, se leva et afficha un sourire énigmatique : « La vie est courte, autant en profiter. »

Lin Qiushi : « … »

Il resta complètement déboussolé, tandis que Cheng Qianli et Chen Fei lui lançaient déjà des regards pleins de pitié.

Ruan Nanzhu s’éloigna. Chen Fei tapa sur l’épaule de Lin Qiushi et dit : « Pourquoi as tu posé une question aussi suicidaire… »

Lin Qiushi : « … »

Chen Fei : « Maintenant c’est trop tard. »

Lin Qiushi, légèrement paniqué, sentait qu’il avait fait une énorme bêtise. Il se tourna vers Cheng Qianli, qui soupira : « Ce n’est pas grave. Une fois que tu as survécu à ça, ça va. On est tous passés par là. »

Lin Qiushi : « … » Mais enfin, qu’est-ce que vous insinuez tous, au juste ?

Mais ni Chen Fei ni Cheng Qianli n’expliquèrent quoi que ce soit, se contentant de s’éloigner.

 

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L’auteur a quelque chose à dire :

Hahahahahaha, quelqu’un veut voir Lin Qiushi en fille ?

Ruan Nanzhu : Tu m’as demandé si cela me rend heureux, non ? La prochaine fois, essaie toi-même.

Lin Qiushi : Hein ???

Traducteur: Darkia1030

 

 

 

 

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