ADGWBMC -Chapitre 93 - Te souviens-tu de ce que tu m’as dit plus tôt ?

 

La voix de Jiang Suizhou était si faible qu’il en restait à peine un souffle. En fait, ses yeux se fermèrent avant qu'il ne puisse finir de parler.

Les veines bleues sur le dos de la main de Huo Wujiu ressortirent, et ses lèvres commencèrent à trembler.

Il ne pouvait pas dire ce qu'il ressentait en ce moment. Il avait enfin entendu les mots dont il avait rêvés tous ces jours, des mots qu'il n'osait même pas imaginer entendre un jour. Cependant, ces mots lui serrèrent le cœur, le déchirant en morceaux. Cela faisait tellement mal qu'il cessa de respirer.

Il ne pouvait pas prononcer un mot. Tout ce qu'il pouvait faire était de lever une main tremblante pour vérifier la respiration de Jiang Suizhou.

Elle était si faible qu'il pouvait à peine la sentir, mais Huo Wujiu sentit le souffle fragile mais stable dans la vague de chaleur ardente à proximité. C'était comme s'il avait enfin trouvé une bouée de sauvetage dans une situation désespérée. C'était peut-être un souffle à peine perceptible, mais c'était suffisant pour stabiliser son cœur.

La voix de Huo Wujiu était basse et rauque, avec un tremblement indistinct. Il dit à Jiang Suizhou : "Tout va bien. Tout ira bien. Ne t'inquiète pas. Personne ne peut te faire du mal."

Son ton était tendu. Il parlait clairement à Jiang Suizhou, mais la confusion et la crainte qui ne pouvaient être dissimulées dans sa voix laissaient penser qu’il voulait nettement se convaincre aussi lui-même.

Après avoir parlé, il regarda autour de lui et vit un soldat trotter tout le chemin et traîner le médecin impérial titubant à travers les portes du palais.

Huo Wujiu serra Jiang Suizhou dans ses bras et se leva. Il se tourna vers Wei Kai et ordonna: "Fais suivre le médecin."

Son visage restait aussi solennel et calme que jamais, comme s'il cachait délibérément sa panique, mais ses yeux rouges et pleins de larmes ne pouvaient être dissimulés.

Wei Kai réagit immédiatement. Il se retourna et alla à leur rencontre. Huo Wujiu porta Jiang Suizhou et se retourna, puis se dirigea droit vers une pièce de palais intacte à proximité.

Après avoir fait plusieurs pas, il s'arrêta et jeta un coup d'œil à Hou Zhu qui se trouvait à côté de lui. Hou Zhu était affalé sur ses genoux et était avachi. Son visage était rouge à cause du vin, mais son regard était droit et empli de haine sinistre. Il fixait Jiang Suizhou dans les bras de Huo Wujiu.

Huo Wujiu baissa les yeux et lui jeta un regard, puis se retourna et partit.

"Attachez-le solidement et jetez-le dans le feu," ordonna-t-il.

 

*

 

Une agitation éclata à l'extérieur des fenêtres. Au moment où l'armée entra dans la ville impériale, ils saisirent toutes les courtisanes et concubines dans tout le palais. Les soldats de Huo Wujiu envahirent l'extérieur. Hou Zhu était déjà mort, et tout le monde s'activait à éteindre le feu.

 

L'atmosphère à l'intérieur de la pièce du palais, cependant, était tendue. La main du médecin tremblait alors qu'il vérifiait le pouls de Jiang Suizhou. Actuellement, des soldats en armure lourde étaient strictement postés tout autour. Le Général debout près du lit, dont l'armure était encore tachée de sang, le fixait d'un regard froid.

Huo Wujiu donnait l'impression que si la personne sur le lit faisait face au moindre danger, il lui arracherait immédiatement la tête. Il en était tout à fait capable.

Le médecin impérial savait que cet homme venait de diriger une armée dans la Cité impériale et avait tué l'Empereur. Après avoir pris le pouls de Jiang Suizhou, le médecin soupira enfin de soulagement. Il s'agenouilla et s'inclina devant les pieds de Huo Wujiu.

"General, soyez assuré !" dit-il, "Bien que Son Altesse ait été torturée, ses blessures ne sont pas trop graves. Il a juste perdu un peu trop de sang. De plus, son corps est faible et il est mentalement épuisé. Couplé au surmenage qu’il a connu plus tôt, il a perdu connaissance. Je vais prescrire des médicaments pour Son Altesse, puis traiter ses blessures. À ce moment-là, Son Altesse le Prince Jing se réveillera !"

Un léger bourdonnement se fit entendre. Huo Wujiu, qui se tenait là, les nerfs à vif, laissa soudainement échapper un souffle retenu et ressentit une perte momentanée de force. Il vacilla et s'appuya contre le montant du lit.

"Est-il vraiment bien ?" insista Huo Wujiu.

Le médecin impérial hocha la tête à plusieurs reprises : "Ce n'est vraiment rien de sérieux ! Général, soyez juste rassuré !"

En entendant cela, Huo Wujiu laissa échapper un soupir de soulagement.

"Allez chercher les médicaments", dit-il. "Wei Kai, va rapidement à la résidence Jing et fais venir Li Changning ici."

Wei Kai acquiesça et sortit précipitamment.

Huo Wujiu s'appuya contre le montant du lit et regarda Jiang Suizhou. Sa robe de cour déchirée était tachée de sang. Ses cheveux étaient éparpillés sur l'oreiller, souillant la literie et l'oreiller de l'odeur du sang. Même les quelques mèches de cheveux en désordre sur ses joues étaient tachées de sang. Son teint était si pâle que les taches de sang étaient assez éblouissantes.

Ainsi, lorsque le médecin impérial revint avec sa trousse médicale, il vit une telle scène. Le général austère d'auparavant était maintenant à moitié accroupi et à moitié agenouillé au chevet du lit, brossant soigneusement les cheveux de Son Altesse le Prince Jing sur le lit. Sa main était très légère, et avait même des tremblements peut-être dus à une extrême prudence.

Le médecin impérial baissa précipitamment les yeux et fit semblant de ne pas voir. En même temps, un soldat à l'extérieur entra précipitamment. C'était Ji Hongcheng.

"Général !" il entra d'un pas rapide et dit. "Le général Lou a demandé à ce subalterne de rapporter que Pang Wei a amené son armée et est presque à l'extérieur de la ville !"

La main de Huo Wujiu qui caressait le côté du visage de Jiang Suizhou fit une pause légère. Ensuite, il demanda : "Combien en a-t-il amené ?"

Ji Hongcheng répondit : "Le décompte actuel est incertain, mais il y a au moins cent mille hommes ! Mais en regardant leur formation, je pense que Pang Wei a dû venir en hâte. Les chiffres sont inférieurs à 300 000 !"

Huo Wujiu resta silencieux un moment. Il voulait rester dans la pièce et surveiller le médecin impérial pendant qu'il traitait Jiang Suizhou, jusqu'à ce que ce dernier se réveille.

Mais il n'avait pas oublié que si ce n'était les plans dangereux de Pang Shao et Pang Wei, il n'aurait pas été contraint de quitter Lin'an, et il n'aurait pas laissé Jiang Suizhou seul dans la ville, permettant à Pang Shao et Jiang Shunheng de trouver une faille.

Cette rancune devait être vengée.

Il caressa soigneusement la joue de Jiang Suizhou avec ses jointures, puis se redressa sur le bord du lit en s’aidant d’une main et se leva.

"J'arrive tout de suite," acquiesça-il.

Ji Hongcheng lui répondit joyeusement par un murmure, puis se retourna pour ouvrir la voie. Mais il entendit alors Huo Wujiu ajouter : "Toi, tu restes."

Ji Hongcheng fut stupéfait. Il se retourna et demanda : "Avez-vous d'autres ordres, Général?"

En voyant la posture sérieuse et indifférente de Huo Wujiu, Ji Hongcheng pensa : Serait-il possible qu'il reste des forces ennemies dans la ville qui n'ont pas été éliminées ? Ou peut-être y avait-il encore quelques facteurs instables dans la ville de Lin'an, qui pourraient entraver leur succès ?

Contre toute attente, Huo Wujiu tourna la tête et regarda le médecin qui portait sa trousse médicale à la porte.

"Surveille-le", commanda-t-il. "Qu'il traite bien le prince Jing, et s'il ose faire quelque chose, tue-le".

*

Jiang Suizhou reprit conscience dans un bouillard.

D'abord, il ressentit vaguement des changements dans son corps. C'était une sensation rafraîchissante dont il avait été privé pendant quelques jours d'affilée, lorsqu'il se sentait souillé par des taches de sang. Ensuite, l'odeur de la médecine flottait autour de son nez. C'était amer, mais aussi mélangé à une odeur de sang.

Ses cils papillonnèrent, laissant filtrer la lumière entre ses paupières. Il fronça les sourcils et entendit un bruit subtil juste à côté de lui.

Quelqu'un semblait le surveiller à côté du lit. À ce moment-là, la personne se redressa au bord du lit et se pencha en avant.

Il bougea ses paupières et ouvrit laborieusement les yeux. Presque instantanément, la lumière des bougies autour de lui l’aveugla. Il les referma aussitôt, mais entendit immédiatement une voix familière mais enrouée.

"Es-tu réveillé ?" C'était Huo Wujiu.

La conscience embrouillée de Jiang Suizhou se clarifia un peu. Il lutta à nouveau pour ouvrir les yeux et vit Huo Wujiu, qui veillait au chevet au milieu des flammes brillantes des bougies et du baldaquin en cascade.

"Toi…" Jiang Suizhou s'apprêtait à parler lorsque l'inconfort lui noua la gorge. Il toussa immédiatement. Sa toux le tirailla et lui fit ressentir à nouveau des douleurs dans tout son corps. Il chercha à reprendre son souffle entre les quintes de toux.

Huo Wujiu à côté de lui paniqua immédiatement. Il s’inquiétait, voulant apaiser sa respiration, mais craignait aussi de lui faire mal. Il le tint dans ses bras un moment.

Jiang Suizhou se raidit, n'osant pas bouger.

"Li Changning !" Huo Wujiu éleva anxieusement la voix. Le bruit de pas précipités approchant de loin se fit entendre peu après. Li Changning se hâta et vérifia le pouls de Jiang Suizhou, puis examina ses blessures. "Général, ne vous inquiétez pas. Ce n'est rien de grave," dit Li Changning, "Il a juste inhalé de la fumée dans l'incendie. Il lui suffit de prendre deux doses de médicament et de bien récupérer pendant plusieurs jours, puis il sera en forme."

Huo Wujiu fut soulagé et dit : "C'est bien. Y a-t-il encore du médicament sur le feu ? Vous devriez retourner et le surveiller."

Li Changning acquiesça et se retira.

Après une quinte de toux, la conscience et les souvenirs de Jiang Suizhou revinrent peu à peu. Il se souvint de l'empereur Hou Zhu ivre et des flammes brûlantes de la salle du palais. Dans son épuisement, il était seulement parvenu à récupérer les preuves de la trahison de Huo Yuyan envers Huo Wujiu, puis s'effondra près du trône, regardant le toit être consumé par les flammes.

Ses souvenirs par la suite étaient flous, comme s’il s’agissait d’une illusion.

Au milieu des flammes crépitantes, il semblait avoir entendu la voix de Huo Wujiu l'appeler. Ensuite, il tomba dans une étreinte assez familière. C'était celle de Huo Wujiu. À ce moment-là, il pensait seulement que Dieu avait entendu son obsession mourante, alors il avait conçu une telle illusion pour lui.

Mais maintenant, il semblait que... tout pourrait être réel.

En repensant à ce dont il se souvenait en dernier, il semblait avoir fait un dernier effort pour sortir ces pages de preuves de ses bras, puis avoir dit à Huo Wujiu…

Quand Jiang Suizhou se rappela cela, son cœur battit de frayeur. Il s'était en fait appuyé sur sa courte espérance de vie et avait dit à Huo Wujiu ce qu'il avait caché dans son cœur.

Quand sa toux s'arrêta peu à peu, il jeta un regard prudent à Huo Wujiu. Il réalisa que Huo Wujiu n'avait pas eu le temps de changer de vêtements. Il portait une épaisse armure noire et était couvert de sang rouge sombre qui était maintenant séché.

Il s'était détourné et versait du thé à la table. Dès qu'il se retourna, Jiang Suizhou vit la cape rouge gravement brûlée derrière lui. Il n'avait pas dû le remarquer, et personne n'osait lui rappeler de la changer.

À ce moment-là, Huo Wujiu se retourna.

Jiang Suizhou paniqua. Il voulait fermer les yeux rapidement et faire semblant de ne pas s'être réveillé du tout.

Mais il était déjà trop tard. Huo Wujiu l'aida à s'asseoir. À cause de ses blessures, il était trop lent à bouger, donc il était trop tard pour se coucher. En un éclair, Huo Wujiu s'était déjà retourné, amenant une tasse de thé chaud à ses lèvres.

"Hydrate d'abord ta gorge", dit Huo Wujiu. "Le médicament de Li Changning sera prêt dans un instant."

Jiang Suizhou tendit la main pour prendre la tasse, mais Huo Wujiu lui tint le poignet et le repoussa fermement sous les couvertures.

"Ne bouge pas", ordonna Huo Wujiu.

Jiang Suizhou ne put lui résister, alors il but quelques gorgées d'eau en ayant des papillons dans l'estomac.

Huo Wujiu n'avait probablement même pas imaginé quoique ce soit, n'est-ce pas ? Jiang Suizhou avait en fait fait volte-face sur sa parole. Il lui avait dit qu'il n'était pas un manche coupée, mais puis après un moment, il lui avait dit qu'il l'aimait.

Les hommes hétérosexuels ont toujours été dégoûtés par ce genre de chose, alors il ne savait pas si Huo Wujiu était gentil avec lui à cause des preuves qu'il avait trouvées pour lui.

Jiang Suizhou y réfléchit un moment jusqu'à ce que le thé dans la tasse soit épuisé.

Huo Wujiu retira la tasse de thé, et Jiang Suizhou ouvrit promptement les lèvres, cherchant un sujet qui ne l'embarrasserait pas. "Où sont Pang Shao et Jiang Shunheng ?" demanda-t-il.

Huo Wujiu se tourna pour ranger la tasse de thé tout en disant : "Jiang Shunheng a été brûlé vif, et Pang Shao est actuellement emprisonné."

"Alors Pang Wei…"

"Il a perdu la tête à cause de la capture de son père et a amené cent mille cavaliers. Ils sont arrivés ce matin et ont été capturés au crépuscule. Il a trompé ces soldats en leur faisant croire qu'ils entraient dans la capitale pour sauver l'Empereur, pour découvrir que c'était le général Lou qu’il fallait combattre. Ils ont naturellement refusé de le faire, donc cela n'a pas demandé beaucoup d'efforts de ma part", déclara Huo Wujiu.

Jiang Suizhou poussa un soupir de soulagement : "C'est bien, alors…"

Mais Huo Wujiu se retourna et demanda : "N'as-tu pas entendu ce que Li Changning a dit tout à l'heure ? Tu viens de te réveiller. Pourquoi as-tu tant à dire ?" C'était clairement une question féroce, mais le ton de Huo Wujiu sonnait inexplicablement de façon douce. Il le réprimandait clairement, mais pourquoi cela semblait-il un peu affectueux ?

Jiang Suizhou considéra simplement cela comme une illusion et se tut, embarrassé.


Aux yeux de Huo Wu Jiu, son expression était pleine de chagrins. Tout ce qu'il ressentait, c'était son cœur fondre en une flaque d'eau de source. Il se retourna et marcha jusqu'au lit. Il s'accroupit sur un genou devant le lit, exactement à la hauteur des yeux de Jiang Suizhou.

"Puisque tu veux parler, pourquoi ne pas me laisser poser les questions?" proposa Huo Wujiu en le regardant.

Jiang Suizhou acquiesça.

Huo Wujiu le fixa un moment, puis tendit la main. Ses jointures touchèrent le côté de son visage et le caressèrent doucement. "Alors laisse-moi te demander, te souviens-tu encore de ce que tu m'as dit plus tôt aujourd'hui?"

Le visage affichait une expression sérieuse, mais au fond de ces yeux, il n'y avait rien d'autre qu'un sourire rempli de douceur.

 

Traducteur: Darkia1030

 

 

 

Créez votre propre site internet avec Webador