MISVIL - Chapitre 120.2 - Extras : Petits fragments (2)

 

8.

Après que Bai Zihao eut décidé d’entrer en cultivation à huis clos pour une durée de cinquante ans, Kong Muhua se retrouva en proie à un profond ennui.

Bien que son époux eût hérité du Pic Inextinguible, élevant ainsi leur statut au plus haut, sa réputation d’indifférence en matière de sentiments s’était largement répandue. Aucune admiratrice n’osait plus se mêler à lui dans les intrigues de palais qu’il affectionnait tant. Après avoir épuisé tous les romans sentimentaux en sa possession, une idée germa dans son esprit. Il résolut de retourner dans le royaume divin afin de solliciter le dieu Phénix. Il voulait découvrir un monde fondé sur la science et la technologie, doté d’une industrie du divertissement florissante, dans lequel il pourrait jouer.

Il voulait devenir une célébrité féminine, tourner des films, incarner de grandes tragédies romantiques, passionnées et bouleversantes.

Toutefois, les dieux avaient interdiction d’utiliser leurs pouvoirs dans les mondes technologiques athées, afin de ne pas interférer avec leur développement naturel. Ayant longtemps accompagné Shenjun dans ses voyages à travers divers mondes, Kong Muhua connaissait parfaitement ces règles.

Il obtint une fausse identité et s’introduisit avec éclat dans l’industrie du divertissement. Sa beauté hors norme pulvérisa les standards d’attractivité. Bien qu’il n’eût encore tourné aucun drame, les campagnes de promotion fondées sur son charisme visuel abondaient. Chant, danse, défilés : dans tous les domaines, il excellait. Sa personnalité, certes singulière, fut efficacement encadrée par son agence, et il gagna rapidement en notoriété.

Les scénarios de cinéma et de télévision affluèrent bientôt.

Kong Muhua les parcourut avec enthousiasme, mais il fut rapidement consterné. Les drames sentimentaux torturés qu’il aimait étaient depuis longtemps passés de mode. Chaque scénario mettait en scène des héroïnes triomphantes. L’on ne trouvait plus que des récits de femmes fortes, des intrigues énergiques où les héroïnes distribuaient gifles et leçons, parsemées de romance sucrée.

Rien de tout cela ne trouvait grâce à ses yeux. Il rejeta tous les scénarios, les refusant un à un.

Finalement, il découvrit le projet d’un réalisateur peu connu. C’était une histoire tragique, située dans un passé lointain, relatant les malheurs d’une humble jeune femme et d’un époux infidèle. L’héroïne, d’un cœur pur et généreux, soutenait financièrement cet homme indigne, lequel la battait malgré tout. Son corps et son cœur étaient en lambeaux. D’autres femmes, aux visages hypocrites et aux intentions sournoises, s’acharnaient également sur elle. Sur les quarante épisodes que comptait le drame, l’héroïne en pleurait dans trente-huit ; les deux restants se résumaient au début et à la conclusion. À la fin, le vaurien réalisait ses torts et regagnait le cœur de l’héroïne, offrant une fin supposément parfaite.

Kong Muhua frappa la table du poing : « Je veux jouer dans celui-là ! »

L’agent resta interdit : « ??? »

Ce jeune réalisateur, bien que soucieux d’éthique, n’était pas particulièrement habile à concilier principes et compromis. Ce scénario affligeant avait été commandité par un investisseur désireux de produire à tout prix. Cependant, il voulait en faire quelque chose de valable. Kong Muhua, grâce à sa beauté éclatante et à sa notoriété, attirait suffisamment l’attention pour espérer une diffusion qui ne soit pas un désastre. Le réalisateur le traita avec les plus grands égards, adaptant toute la distribution autour de lui.

Toutefois, peu d’acteurs masculins acceptaient de jouer un rôle aussi ingrat que celui d’un mari indigne.

Les critères de Kong Muhua en matière de beauté étaient très stricts, et il ne supportait pas la laideur. Après avoir rejeté des dizaines de candidats proposés par le réalisateur, il entreprit de chercher par lui-même. Peu lui importait le talent de l’acteur, tant que celui-ci pouvait soutenir la comparaison avec sa propre beauté. Mais Zihao Gege était encore enfermé en culture à huis clos...

Il pensa aux visages qu’il connaissait et se souvint que, lors de sa dernière visite au Pavillon de la nuée, il avait aperçu l’Immortel Qingshi lisant un ouvrage intitulé L’auto-formation d’un acteur. Ce dernier semblait y prendre un réel intérêt... Même si l’Immortel Qingshi n’égalait pas la beauté de Zihao Gege, il demeurait fort agréable à regarder. De plus, il était sérieux, fiable, d’un tempérament constant et facile à diriger…

Kong Muhua retourna donc au royaume divin et, profitant de l’absence momentanée deBai Zihao, implora l’Immortel Qingshi de l’aider en interprétant le rôle masculin principal.

Song Qingshi lut attentivement le scénario. Bien que le rôle fût celui d’un mari abject, il considérait que l’interprétation d’un personnage ne devait pas refléter l’acteur lui-même. Il souhaitait justement tenter un rôle à contre-emploi. Par ailleurs, le dieu Phénix l’avait récemment félicité pour ses talents d’interprétation au lit, et il se sentait un peu confiant. Il désirait relever un nouveau défi.

Il accepta donc la demande de Kong Muhua sans hésiter.

Mais ce dernier n’attendit pas que le dieu Phénix soit informé de l’affaire et vienne lui demander des comptes.

Song Qingshi passa une audition. Son jeu d’acteur était… absolument désastreux.

Kong Muhua : « ……… »

En fin de compte, il dut recourir à ses fameuses haches jumelles pour capturer un cultivateur yao et le forcer à jouer le rôle principal masculin.

À l’issue du tournage, nombre de jeunes spectateurs, séduits par la beauté du cultivateur, regardèrent le drame jusqu’au bout uniquement pour pouvoir admirer son visage, tout en moquant le scénario. Les dames d’un certain âge, quant à elles, appréciaient le genre, mais estimaient que Kong Muhua était beaucoup trop beau pour un tel rôle. Le drama reçut autant de critiques virulentes que d’éloges.

Le petit réalisateur connut un changement dans sa carrière et finit par tourner un projet de qualité. Grâce à son sérieux, il remporta même, par la suite, plusieurs récompenses pour d'autres films.

Kong Muhua, lui, était indigné. Pendant plus de dix ans, il devint le spécialiste des rôles de « petite fleur blanche » (NT: femme pure et fragile), devenant tristement célèbre comme le roi des échecs cinématographiques.

Finalement… son agent, au bord de la crise de nerfs et le menaçant même d’attenter à sa vie, le força à accepter le rôle d’une puissante héroïne cultivatrice immortelle. Ce rôle le propulsa au sommet de la popularité. Il devint même l’impératrice du cinéma.

Kong Muhua : « …… »

Le monde ne le comprenait décidément pas.

Song Qingshi retourna dans le royaume divin, mais son cœur demeurait accablé de tristesse.

Un tyran érudit ne reconnaît jamais sa défaite. Il étudia donc longuement l’art dramatique, puis prit l’initiative de solliciter Yue Wuhuan afin de lui demander des scénarios…

Yue Wuhuan, ayant eu tout ce qu’il désirait et se sentant pleinement satisfait, déclara : « C’était une excellente performance. »

Il décida de ne pas aller chercher Kong Muhua pour lui demander des comptes.

 

9.

Après le retour de Qing Luan dans le royaume divin, bien qu’elle travaillât encore comme assistante de l’Immortel Qingshi, gérant les envoyés et les préposés, elle n’était plus contrainte de consacrer tout son temps à l’étude.

Chaque jour, elle se rendait au jardin pour y cueillir les plus belles fleurs fraîches et orner avec soin la cour du Pavillon de la Nuée.

Ce jour-là, une oie cygne survola les cieux et, après avoir atterri, se changea en un jeune homme familier à l’apparence charmante.

Ming Hong demanda : « Qing Luan Jiejie, as-tu scellé tous tes souvenirs du petit monde ? »

Qing Luan, coupant calmement les branches fleuries, répondit avec légèreté : « Eh bien, oui, ils sont scellés. »

Ming Hong laissa transparaître une amertume difficilement contenue : « Qing Luan Jiejie, nous étions liés par le destin dans ce petit monde… »

« Je l’ai oublié », répondit-elle en souriant, moqueuse. « Je n’aurais jamais pu entretenir une relation avec un petit démon comme toi. »

Ming Hong en fut profondément irrité. Par un malheureux concours de circonstances, il avait grandi dans le royaume divin, et Qing Luan s’était alors occupée de lui. À cette époque, il manquait de maturité et, pour attirer l’attention de Qing Luan Jiejie, il s’était transformé en un enfant turbulent. Cette sombre période avait laissé une impression durable : aux yeux de Qing Luan, il restait un gamin, peu importe le nombre d’années écoulées.

Il nourrissait pour elle un amour secret depuis de nombreuses années, sans jamais parvenir à progresser. Ce n’est qu’après bien des efforts qu’il avait finalement réussi, dans le petit monde, à conquérir son cœur. Ils étaient devenus un couple lié pour la vie.

Il ne pouvait accepter que ses souvenirs aient été effacés. Et pourtant, Qing Luan affirmait qu’elle les avait bel et bien scellés…

Avant sa mort, elle lui avait pourtant promis qu’ils seraient réunis dans leur prochaine vie…

Les femmes refusent toujours de reconnaître leurs dettes !

Attends une minute !

Qing Luan avait-elle réellement scellé ses souvenirs ? Ou bien se moquait-elle encore de lui ?

Ming Hong leva les yeux au ciel et soupira : « Connais-tu cet arrière-petit-fils ingrat que tu as laissé dans le petit monde, celui qui s’appelle Song Jincheng ? Il n’est plus qu’un bon à rien. Il néglige complètement ses études et ses parents ne parviennent plus à le discipliner. L’héritage des affaires de la Vallée de la Médecine est désormais hors de portée. Tout ce qu’il fait, c’est manger, boire, et se divertir. Il paraît même qu’il a entraîné l’enfant d’une autre famille dans une maison de prostitution… pour des activités inavouables. »

« Une maison de prostitution ? » répéta Qing Luan, tandis que la branche florale dans sa main se brisait sous la pression.

Ming Hong renchérit : « Un véritable descendant indigne ! »

Qing Luan jeta alors les cisailles avec irritation : « Va chercher une autorisation auprès de Shenjun. Je vais donner une leçon bien méritée à cet imbécile. »

Ming Hong, ravi, s'empressa de la suivre. Il savait que Qing Luan Jiejie n’avait jamais scellé ses souvenirs.

 

10.

Song Jincheng avait fait de nombreuses fugues avec Yuwen Yu.

Au fil des années, ils parcoururent ensemble une multitude de lieux célèbres. Partout où il se rendait, Jincheng prenait des notes sur les traditions locales, les mets raffinés, les beautés de passage et les sites pittoresques.

Suivant les conseils avisés de Yuwen Yu, il collabora avec une maison d’édition et publia un ouvrage intitulé ‘Les Voyages de Jincheng’. Grâce à son ton léger et humoristique, conjugué à des thèmes originaux, le livre rencontra un immense succès dans le monde de la cultivation. Les exemplaires s’écoulaient à une vitesse folle, et le public réclamait une suite avec ferveur.

Grâce aux revenus importants générés par ses ventes, Song Jincheng n’avait plus la moindre crainte que ses parents lui coupent son allocation.

Un jour, Yuwen Yu, portant son sac sur l’épaule, demanda : « Où allons-nous cette fois-ci ? »

Fort de son expérience, Song Jincheng répondit : « À Feng Cheng. Il paraît qu’une danseuse célèbre y exécute une danse du sabre d’une élégance inégalée. »

Yuwen Yu acquiesça : « Je te suivrai. »

« Il paraît aussi que leur hydromel est exceptionnel. Nous devrions y goûter », ajouta Song Jincheng.

« Au fait », reprit Yuwen Yu, « tes parents n’étaient-ils pas furieux la dernière fois ? Ils disaient que tu couvrais ta famille de honte en refusant d’hériter de l’entreprise. »

Song Jincheng, imperturbable, répondit : « Ce n’est pas grave. De toute façon, mes ancêtres ne vont pas bondir hors de leur cercueil pour me réprimander. »

(Tu as tort… ils s’apprêtent précisément à venir à ta rencontre.)

 

11.

Yuwen Yan regarda la lettre de fuite posée sur son bureau. Il la froissa d’un geste sec et la jeta dans la corbeille, avant de pousser un profond soupir.

Au fil des ans, il était passé de la colère à la bouderie, puis à une résignation silencieuse.

Son fils aîné était une cause perdue. Il était temps d’avoir un second enfant…

Il rêvait d’une fille, douce et affectueuse. Une enfant qui ne chercherait pas constamment à lui tenir tête… et ne s’enfuirait pas avec un homme.

 

12.

Sur l’île de Xian Ling.

Dame Nian instruisait Duo Duo avec une gravité bienveillante : « Lorsqu’il s’agit d’hommes, ne te fie jamais à leur apparence. Les plus beaux sont souvent les plus perfides. Ils te forceront à faire des exercices. »

Duo Duo frissonna : « C’est horrible. »

Les punitions infligées sur l’île de Xian Ling prenaient souvent la forme de longues séries de devoirs à accomplir. Tout le monde en avait une peur bleue.

Cela valait en particulier pour ces jeunes garçons séduisants qui espéraient charmer des cultivatrices. Tous ceux que Dame Nian capturait étaient enfermés dans une pièce obscure. Selon la gravité de leur faute, ils recevaient dix mille feuilles d’exercices à remplir, et n’étaient autorisés à sortir qu’une fois la tâche accomplie.

Il était dit que l'effet éducatif était redoutablement efficace.

Une fois libérés, ces jeunes hommes repartaient les jambes flageolantes. Au seul regard d’une jolie cultivatrice, ils pâlissaient et n’osaient plus jamais nourrir la moindre pensée déplacée.

 

13.

Yue Wuhuan ramena Song Qingshi dans le monde moderne, celui qui lui avait tant manqué.

Sous la direction de sa présidente autoritaire, la famille Song était désormais à la tête d’une entreprise internationale de renom, figurant parmi les cent plus grandes fortunes mondiales.

Yue Wuhuan retrouva les réincarnations du père, de la mère et de la sœur de Song Qingshi. Il recueillit leurs âmes et reconstitua une fois encore le fil de leur passé.

Ce jour-là, tous firent le même rêve magnifique.

Dans un monde lointain, d’un passé oublié depuis des siècles, la paralysie progressive de Song Qingshi avait été miraculeusement guérie. L’on parla alors d’un prodige médical.

La famille Song menait une vie comblée de bonheur.

La sœur de Song poursuivit ses ambitions dans le monde des affaires, tandis que son époux, artiste accompli, tenait le foyer avec grâce. Leur mariage était empli d’harmonie. Le jeune frère, lui, devint une figure de proue de l’industrie médicale. Plus tard, il revint auprès de sa famille, accompagné de son compagnon, Yue Wuhuan, musicien de renommée internationale.

Passé le moment de surprise, la famille Song accueillit avec bienveillance l’orientation de leur fils et lui offrit tout leur soutien, le cœur empli de chaleur.

Tous vécurent une existence paisible et lumineuse.

Le père et la mère Song atteignirent l’âge vénérable de cent ans, connus de tous pour l’amour profond qui les unissait.

La sœur de Song et son mari vécurent une relation stable et heureuse, menant de brillantes carrières. Ils eurent des jumelles, aussi éclatantes que le printemps.

Yue Wuhuan et Song Qingshi avancèrent ensemble, main dans la main, jusqu’à ce que leurs cheveux se parent de blanc.

Lorsqu’ils se réveillèrent, bien que les membres de la famille Song n’aient gardé aucun souvenir conscient de ce rêve partagé, tous ressentirent au plus profond d’eux-mêmes une paix indicible, comme si un vide ancien avait été comblé. Une douce chaleur, presque irréelle, les enveloppait.

Le soleil filtrait à travers les fenêtres, une brise tiède portait le parfum délicat des fleurs.

Le monde bruissait de vie. Les pertes et les gains n’étaient plus que des échos du cœur.

Il n’y avait, en cette vie, plus aucun regret.

 

Fin

 

Traduction: Darkia1030

 

 

 

 

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