MISVIL - Chapitre 118 – Le monde renaît

 

Il ricana : « Usurpateur. »

 

Sur la paroi du Pic Inextinguible, des centaines de milliers de lampes d’âme vacillaient encore.

Depuis le début de la guerre, ni la foudre ni les flammes du combat n’avaient pu briser la barrière ni troubler la paix régnant en ce lieu.

Yue Wuhuan s’y engagea lentement et saisit la première lampe d’âme. L’âme qu’elle contenait, nommée Xie Que, était depuis longtemps engourdie par trois mille ans de torture.

Face à cette âme répugnante, des souvenirs de sa propre chute en enfer revinrent hanter Yue Wuhuan, et la puanteur qu’il percevait s’intensifia.

Cependant, ces souvenirs n’étaient plus capables de tourmenter son cœur.

Yue Wuhuan éteignit doucement cette lampe d’âme, anéantissant à jamais cette âme pécheresse, la réduisant en cendres, effacée à jamais du monde.

Au plus profond de lui, une chaîne noire semblait se délier ; en déposant la haine, son âme retrouva sa liberté.

Yue Wuhuan éteignit la deuxième lampe, puis la troisième, la quatrième…

Sa vengeance était accomplie depuis longtemps, il n’avait plus besoin de se retourner vers le passé.

À mesure que les lampes des souvenirs s’éteignaient, les chaînes de la haine se brisaient une à une. Son âme s’allégeait peu à peu, ses pas devenaient plus vifs, plus libres...

Finalement, Yue Wuhuan se dressa au sommet de la falaise, leva la main et libéra une puissante pensée divine, éteignant d’un coup des centaines de milliers de lampes d’âme.

À l’instant même où ces flammes s’éteignirent, le phénix enfermé dans les abysses fut enfin libéré. Le grain de beauté maudit, semblable à une larme au coin de son œil, s’effaça lentement en même temps que la haine.

Yue Wuhuan aperçut enfin le véritable visage du monde. L’air était saturé d’une énergie démoniaque abjecte, qui corrodait toute chose. C’était là la source de cette puanteur omniprésente. Tout en haut du ciel, une porte noire menant à l’enfer était entrouverte, déversant un flot incessant d’énergie impure qui pervertissait et remodelait le monde, le transformant en un cauchemar infernal.

Les démons, sentant leur sceau rompu, comprirent que leur fin était proche. Dans les grondements du tonnerre, on perçuit leurs gémissements d’agonie.

Yue Wuhuan leva les yeux : "Usurpateurs."

*

Dans le royaume divin, l’Empereur Céleste et les dieux s’étaient rassemblés autour de l’Arbre-Monde flétri.

Les fruits du monde qu’il portait avaient été pour la plupart envahis par l’énergie obscure des démons.

Cet arbre sacré, né avec le phénix des les flammes les plus pures, puisait sa force dans le cycle de renaissance et de réincarnation du phénix.

Le phénix soignait patiemment chaque monde en gestation, attendant que les lois de chacun deviennent complètes, que les cycles y soient stables, pour alors détacher ces fruits du monde et les déposer dans la Voie Lactée, où ils devenaient de véritables univers.

Mais comme les lois de ces mondes étaient encore immatures, des failles apparaissaient souvent, entraînant leur dépérissement ou leur mort. Ainsi, le Dieu Phénix créa un artefact du destin, destiné à ajuster et à éprouver ces mondes : il choisissait des âmes humaines compatibles et leur confiait des missions destinées à tester les lois du monde ou à corriger les déviations de leur destinée.

Chaque monde possédant son propre développement — technologie, magie, cultivation spirituelle, etc. —, pour faciliter leur compréhension et éviter que la ligne du destin ne soit déviée, les missions étaient transmises sous forme de récits, de pièces de théâtre, de légendes ou de romans...

L’artefact fonctionnait parfaitement, et l’Arbre-Monde ne cessa de porter fruit : des mondes en gestation, riches de myriades d’âmes et de ressources.

Les démons convoitaient depuis longtemps ces mondes immatures. Mais pour que l’Arbre-Monde subsiste, la puissance du phénix était indispensable. Or, le Dieu Phénix était l’essence même de la perfection divine : puissance, sagesse, volonté — il était puissant et invulnérable.

Les démons ourdirent alors une machination millénaire. Durant la guerre des dieux et des démons, ils posèrent un piège, blessèrent le Dieu Phénix, et lui arrachèrent un fragment de son âme divine, qu’ils dissimulèrent dans l’Arbre-Monde. Ils y insufflèrent également les moindres désirs et fantasmes que les créatures du monde nourrissaient envers le Dieu Phénix, et les condensèrent en un grain de beauté scellé sous forme de larme, verrouillant sa mémoire divine. Puis, ils créèrent un corps magnifique pour contenir cette âme, tout en y imposant de puissantes restrictions.

Ce sceau éveillait les pensées impures envers sa beauté. Une fois que son corps serait apte à supporter le pouvoir, les démons manipuleraient le destin pour attirer à lui des êtres maléfiques, afin qu’ils abusent de lui, le violentent, et le poussent à la souffrance et à la haine.

Briser le sceau nécessitait une immense force issue des mondes.

Mais plus le Dieu Phénix haïssait le monde, plus celui-ci le rejetait.

Ainsi, il ne pouvait ni s’éveiller, ni contrôler les mondes, ni puiser dans leur puissance.

Une méthode simple, mais abjecte.

Au départ, les dieux ne s’inquiétaient pas outre mesure. Certes, c’était répugnant, mais les divinités avaient une volonté inébranlable, et les mondes étaient toujours ceux du Dieu Phénix. Il lui serait donc facile de reprendre le contrôle…

Ils avaient tort.

L’Arbre-Monde commença à dépérir. Les fruits se succédaient, pourrissant les uns après les autres. Ce n’est qu’alors que les dieux réalisèrent que le Dieu Phénix, si parfait, possédait bel et bien une faiblesse.

Né dans les flammes les plus pures, il était d’une pureté absolue. Il ne tolérait aucune souillure, aucun contact impur. Fier et digne, il refusait toute émotion entachée de désir, toute caresse remplie d’une intention charnelle. Il n’aspirait qu’à un amour véritablement pur et il rejetait donc la poursuite de tous les autres.

Sa noblesse, sa perfection, son intégrité, sa sagesse et sa puissance, tout ce qui faisait sa grandeur, les démons s’en servirent pour le détruire.

Le Dieu Phénix pouvait endurer toute torture physique ou mentale, mais il ne supportait pas la souillure. La moindre tache sur sa perfection, comme une goutte d’encre sur une page blanche, le plongeait dans une lutte désespérée pour s’en débarrasser. Mais plus il tentait de s’en libérer, plus la souillure s’étendait, l’aveuglait.

Il haïssait le monde, lequel le rejetait. Les démons profitèrent de cette faille pour gouverner davantage de mondes et infliger des supplices pires encore. Isolé, trahi par le destin, le Dieu Phénix en vint à haïr plus profondément encore, jusqu’à se perdre, refusant de voir la vérité.

C »était un cercle vicieux.

Dans cet enfer de réincarnations, le phénix sombra entièrement, incapable de s’extraire de la boue. Sa puissance devint l’engrais des démons, qui transformèrent monde après monde en enfers démoniaques.

Les dieux étaient désespérés et furieux.

Ils tentèrent d’infiltrer les petits mondes pour réveiller le Dieu Phénix.

Mais l’artefact du destin était tombé aux mains des démons. Pour le rejoindre, les dieux durent se faire passer pour des humains, accomplir des missions pour le retrouver.

Les démons flairèrent leur stratégie. Ils scellèrent la magie et les souvenirs des missionnaires, leur assignèrent des tâches absurdes et imposèrent des châtiments cruels en cas d’échec.

Même privés de leurs pouvoirs, les dieux restaient naturellement supérieurs aux humains.

L’Empereur Céleste grava un sceau dans leurs âmes, leur rappelant de ne jamais perdre leur objectif : sauver le Dieu Phénix.

Un à un, des dieux loyaux, courageux et sages se lancèrent dans ces mondes, dans l’espoir de réveiller leur frère divin.

Mais les démons, exploitant leurs faiblesses, leur infligèrent de cruels départs dans la vie, multiplièrent les fausses pistes et les induisirent en erreur.

Le général inflexible ? Défiguré et haï de tous, il fut noyé dans la colère et l’amertume.
La servante loyale ? Privée de tout bonheur, perdue dans une spirale d’aide et de pitié, elle oublia jusqu’au Dieu Phénix.
Et ceux qui l’avaient aimé autrefois ? Les démons leur créèrent des répliques parfaites, leur offrirent des romances idéales, les plongèrent dans une illusion si douce qu’ils en oublièrent le véritable phénix, brisé, méconnaissable.

Les échecs s’accumulèrent, et le Dieu Phénix devint méfiant, paranoïaque, violent. Toute personne portant en elle la moindre intention cachée ou trace de désir se heurtait à sa rage ou à son rejet, même jusqu’à la mort.

Sans mission, nul ne pouvait quitter le monde.
Mais avec une mission, on ne pouvait gagner sa confiance.

La majorité des dieux abandonnèrent et se contentèrent d’accomplir la mission de l’artefact pour repartir. Seuls quelques-uns, particulièrement proches du phénix, comme le général An Long, gardien de la frontière divine, persistèrent… jusqu’à perdre leur statut de missionnaire et chuter, corps et âme, dans la réincarnation. Son squelette de dragon fut même transformé en arme pour torturer le phénix.

L’Empereur Céleste dut se rendre à l’évidence : c’était une mission impossible.

Les petits mondes tombaient les uns après les autres.

Le royaume divin était au bord de l’impuissance.

La demande de mission déposée par Maître Qingshi prit tous les dieux de court.

L’Empereur Céleste, même après mille réflexions, ne comprenait pas d’où provenait l’amitié si profonde entre le Dieu Phénix et Qingshi, pour que ce dernier accepte encore de tenter de le sauver après tant d’échecs.

L’ascension de l’Immortel Qingshi avait été un accident, un pur hasard.

Son corps originel n’était autre qu’une pierre blanche, forgée il y a des éons par l’Empereur Céleste à partir du Lotus de Feu Noir, placé sur le mont Song pour contenir les flammes du monde souterrain. Personne ne se souvenait de cette pierre.

(NT : pour mémoire, qīngshí (青石 ) signifie ‘pierre turquoise’)

Qui aurait cru qu’après tant de millénaires à sceller le feu infernal, après avoir sauvé des milliards d’âmes, elle accumulerait assez de mérite pour s’élever ?

Lorsque l’Empereur vit ce caillou devenir immortel, il fut abasourdi…

Il tenta quelques paroles cérémonieuses pour alléger l’atmosphère, mais il découvrit vite que, si la pierre avait pris forme humaine, son cœur demeurait inerte : elle ne ressentait rien — ni honte, ni haine, ni joie, ni amour.

Il parla, tenta l’empathie. La pierre le regarda sans comprendre, incapable de répondre.

L’instant fut d’un embarras extrême...

L’Empereur Céleste, d’un geste distrait, lui donna un nom : il l’appela Song Qingshi (清时, pierre turquoise). Mais lorsque le dieu chargé de consigner le destin mit ce nom par écrit, il comprit mal l’intention de l’Empereur, et le transforma en Song Qingshi (青石 , moment clair). L’Empereur jeta un œil à cette version, la trouva finalement assez convenable, et décida de l’adopter.

Il s’adressa alors au tout nouveau Maître Qingshi sur un ton grave et solennel : « Puisque tu ne comprends pas encore le monde, alors lis davantage. Quand on lit suffisamment, on finit par tout comprendre. »

Il fallut à l’Empereur beaucoup d’efforts pour faire comprendre cette phrase au Seigneur Qingshi, et lui inculquer l’importance de l’apprentissage.

Mais parce que le Maître Qingshi ne parvenait ni à s’adapter ni à s’intégrer à la vie des dieux, les problèmes s’accumulaient. L’Empereur Céleste, songeur, se dit qu’après tout, cette pierre avait été façonnée par lui-même ; il devait donc assumer la responsabilité. Il lui aménagea un petit pavillon dans les nuages, y envoya des instructeurs pour lui enseigner l’écriture, lui offrit une immense quantité d’ouvrages, et lui ordonna d’y étudier sérieusement. Lorsqu’il aurait tout appris, il pourrait alors reparaître devant les autres.

Mais le Maître Qingshi, une fois entré dans ce jardin céleste, se plongea dans ses lectures sans jamais en sortir.

Les messagers divins rapportaient qu’il passait ses journées à lire, à étudier, et parfois, assis à la fenêtre, à contempler les nuages. Il refusait de participer aux assemblées divines et n’adressait la parole à personne.

Ainsi s’écoulèrent plusieurs dizaines de milliers d’années dans une solitude austère.

Au début, les dieux s’étonnaient encore de cette « pierre stupide ». Puis, peu à peu, ils l’oublièrent.

Voyant que le Maître Qingshi ne montrait aucun signe de changement, qu’il ne souffrait nullement de solitude, et qu’il semblait se satisfaire de cet isolement, l’Empereur finit par renoncer à le surveiller. Il se contenta, lors des distributions annuelles de récompenses, de lui faire parvenir davantage de livres — manière discrète de s’en occuper.

Jusqu’au jour où la nouvelle du malheur frappant le Dieu Phénix se répandit.

Ce fut alors que, pour la première fois, le Maître Qingshi quitta son petit pavillon et se rendit au Palais Divin pour demander à entrer dans un monde de mission.

Tous les dieux puissants avaient échoué. Que pouvait donc accomplir cette pierre incapable de parler?

Et pourtant, le Maître Qingshi se montra d’une obstination inébranlable. Il ne comprenait ni le refus ni la moquerie.

Qui pourrait l’emporter face à une pierre aussi dure ?

L’Empereur Céleste, épuisé par cette résistance, finit par songer : puisque le Seigneur Qingshi, en tant que simple pierre, était parvenu à s’élever grâce au mérite accumulé, peut-être sa chance était-elle remarquable. De plus, il n’avait aucun lien affectif avec le Dieu Phénix, aucune convoitise, n’éprouvait ni émotions ni désirs, et ne comprenait rien à ces amours chaotiques. Il ne tomberait donc probablement pas dans les pièges tendus par les démons. Le Dieu Phénix, de plus, avait toujours aimé collectionner les pierres précieuses ; peut-être ce rocher stupide aurait-il la « chance du simple d’esprit », et réussirait là où tous avaient échoué ?

De toute façon, tout le monde avait déjà échoué. Un échec de plus ne changerait rien. Il finirait bien par revenir après s’être heurté à la montagne du Sud…

L’Empereur Céleste, adoptant l’attitude du désespoir, tenta une dernière fois de sauver le cheval mourant : il envoya le Maître Qingshi dans un petit monde pour tenter de sauver le Dieu Phénix.

*…

L’âme s’éveilla. La puissance divine revint.

Tous les souvenirs revinrent inonder la mer de conscience de Yue Wuhuan. Il se rappela que, dans ses innombrables cycles de désespoir et de réincarnation, il avait toujours aperçu cette silhouette obstinée qui tentait, encore et encore, de le rejoindre — et échouait toujours.

Dans les premières dizaines de réincarnations, cette silhouette avançait en trébuchant, ne comprenant rien aux émotions humaines, incapable de parler, rencontrant mille obstacles. Il n’était même pas question de remplir une mission ou d’arriver jusqu’à lui : il mourait déjà en chemin.

Mais il ne renonça jamais. Peu importaient les chutes, il revenait toujours.

Il affrontait l’échec avec persévérance, analysait chaque erreur, comparait les émotions décrites dans les livres avec celles des humains, imitait maladroitement, s’exerçait à les exprimer. Grâce à une ténacité désarmante et une absence totale de désir personnel, il finit par s’approcher du phénix méfiant et hypersensible. Il donna tout de lui-même, jusqu’à ce que le phénix, peu à peu, lui accorde sa confiance… puis son cœur.

Les émotions du monde des hommes — l’amour, la haine, la joie, la tristesse — polirent cette pierre inerte.

Dans chaque monde, il lut davantage, vécut des instants de chaleur, observa les multiples visages de la vie humaine, connut toutes sortes de souffrances. Il apprit ce qu’était la douleur, comprit les larmes, le sourire, la colère, l’abattement, la joie.

La pierre s’anima.

Et lorsqu’elle comprit enfin les émotions, elle permit au phénix de retrouver son vrai soi.

*

Tous les sceaux furent levés. La puissance revint. L’Arbre-Monde se remit à bourgeonner.

Le phénix le plus éclatant ressuscita. Ses neuf plumes de queue, aux flammes dorées et cramoisies, s’étirèrent dans les airs tandis qu’il s’élançait vers le ciel obscurci, fonçant droit sur la porte de l’enfer.

Une lumière sacrée perça les ténèbres, purifiant complètement ce monde souillé par les démons.

Les impuretés furent chassées. L’énergie malsaine fut purifiée. La porte des enfers se referma à jamais, dans les hurlements impuissants des créatures infernales.

La foudre cessa. Le tonnerre se tut. Une fine pluie se mit à tomber doucement du ciel.

La terre, jadis déchirée, se referma lentement. Les lits des rivières desséchées virent rejaillir les eaux. Les arbres foudroyés bourgeonnèrent. Les fleurs sur les falaises s’épanouirent, exhalant leur parfum. Les oiseaux, cessant leur fuite, cherchèrent des matériaux pour bâtir leurs nids. Les animaux terrés dans les recoins sortirent la tête, s’aventurant prudemment vers leurs anciens foyers.

Le monde tout entier se mit à respirer à nouveau.

Les patients atteints du mal démoniaque reprirent leurs esprits sous la pluie. Ils découvrirent, stupéfaits, que les marques noires sur leur peau disparaissaient peu à peu.

Une mélodie céleste résonna dans le ciel. En levant les yeux, ils aperçurent un phénix traversant les nuages. Sa beauté pure et sans tache leur fit oublier la guerre, la douleur, la haine, les massacres…

La terreur qui pesait sur leurs cœurs se dissipa. Le flux sombre de leurs désirs malsains s’évapora.

Ils repensèrent à tout ce qu’ils avaient fait ces derniers temps, et se trouvèrent d’une stupidité accablante.

*

Dès qu’il s’aperçut que la maladie démoniaque avait disparu, le Seigneur de la ville de Lingxin,, interrompit aussitôt les combats. Il n’eut pas le loisir de réfléchir aux fautes commises ni à l’affaire du Pavillon Tianwu ; excuses et compensations furent remises à plus tard.

Il rentra à toute vitesse, accompagné des cultivateurs de la ville de Lingxin. Dans la cour de sa résidence, il vit sa fille, belle et douce, qui lui tendait comme à l’accoutumée une tasse de thé spirituel et des fruits parfumés, en lui adressant un sourire : « Père, tu as travaillé dur... »

On dit que les vrais méchants ne versent pas facilement de larmes.

Le Seigneur de la ville de Lingxin serra dans ses bras sa précieuse fille, retrouvée après avoir été perdue, et éclata en sanglots déchirants.

*

Sur l’Île des Esprits Immortels, Dame Nian tenait la main de Duoduo. Allongée dans l’herbe, elle attendait tranquillement l’arrivée de la mort.

Soudain, Duoduo pointa le ciel du doigt et s’exclama, émerveillée : « Regarde ! Quel magnifique oiseau ! »

Dame Nian ouvrit les yeux. Elle vit le phénix tournoyer parmi les nuages, tandis que les ténèbres s’écartaient peu à peu, laissant filtrer des rayons de soleil d’une douceur inouïe, de plus en plus éblouissants. Lorsque le phénix s’éloigna, elle s’éveilla de cette scène splendide et remarqua soudain que son corps s’était allégé, et que les marques noires sur le visage de Duoduo avaient disparu…

Derrière elles, des acclamations de femmes cultivatrices retentirent :

« Nous avons survécu. »

« L’Île de Xian Ling a survécu. »

*

Le phénix parcourut chaque recoin du monde, et les acclamations résonnèrent elles aussi dans chaque coin du monde.

Toutes les émanations démoniaques furent entièrement purgées.

Enfin, le phénix retourna au Pic Inextinguible.

Song Qinshi était assis de biais sur un immense rocher, adossé à un pin gigantesque. Son artefact spirituel natal avait été brisé, son dantian détruit, toute son énergie méritoire épuisée, et sa vie touchait à sa fin. Son visage était d’une pâleur extrême, son corps trop faible pour se tenir debout, mais dans son cœur, il ressentait une joie sincère…

Le phénix atterrit, reprit forme humaine. Dans ses yeux d’or, empreints de noblesse et d’austérité, brillait une autorité digne : il était la divinité de ce monde, devant qui toutes choses devaient s’incliner.

Pas à pas, il s’approcha de Song Qinshi, le regardant avec dévotion, fixant ces yeux les plus limpides du monde.

Song Qinshi leva les yeux, un sourire radieux aux lèvres : « Bienvenue chez toi. »

Yue Wuhuan répondit avec douceur : « Merci, de n’avoir jamais abandonné. »

*

Le monde avait été réparé. L’Arbre-Monde rayonnait à nouveau de vitalité.

Yue Wuhuan leva la main, rassembla dans sa paume l’immensité des mérites générés par l’Arbre-Monde, et les insuffla dans le corps de Song Qinshi pour réparer son âme divine affaiblie. Puis, il réajusta les lignes du destin de ce monde, permettant à la petit sphère qui se faisait appeler «système» de renaître, désormais purifié de toute impureté.

La sphère bondit joyeusement, émettant des bips, et annonça :

« Agent Song Qinshi, mission n°1350 réussie : sauvetage du protagoniste shou Bai Zihao. »

« Agent Song Qinshi, mission n°1351 réussie : élimination du grand antagoniste du Pic Inextinguible.»

« Monde en déconnexion… »

Le corps de Song Qinshi se transforma en myriades de particules lumineuses dorées, puis se dissipa dans le firmament.

Le phénix déploya à nouveau ses ailes et s’élança à sa poursuite.

 

Traduction: Darkia1030