Paysage onirique
L'atelier de la maîtresse de maison se trouvait au septième étage.
Xiao Su avait disparu après avoir visité le septième étage.. Cependant, selon le compagnon qui était avec elle à l'époque, ils n'étaient pas entrés dans l'atelier de la maîtresse de maison, mais avaient seulement jeté un coup d'œil aux autres peintures à côté.
Ruan Nanzhu et Lin Qiushi montèrent l'escalier en colimaçon jusqu'au septième étage et revirent le couloir fantomatique plongé dans l'ombre. Le couloir du septième étage s'étendait à l'infini, et le sol était toujours recouvert d'un épais tapis, qui s'étendait des escaliers vers les deux côtés, s'arrêtant finalement devant l'atelier au bout du couloir.
L'atelier était un peu différent des autres pièces. La porte était entièrement recouverte d'un tissu noir, comme si le propriétaire de l'atelier ne voulait pas que la lumière passe à travers les interstices de la porte.
"Où est-elle maintenant ?" demanda Tan Zaozhao, un peu effrayée. Frottant la chair de poule sur ses bras, elle murmura : "Ce serait vraiment gênant si nous entrions et la voyions en train de peindre."
"J'espère qu'elle n'est pas dans l'atelier pour le moment," dit Ruan Nanzhu. "Attendez ici, je vais d'abord aller frapper à la porte."
Sur ce, il se dirigea vers la porte et, en quelques pas, se retrouva devant l'atelier. Il leva la main et frappa poliment.
Tan Zaozhao écarquilla les yeux en entendant Ruan Nanzhu frapper hardiment à la porte de l'atelier. Elle s'exclama : "Putain—comment peut-il être aussi courageux ?"
Lin Qiushi, qui était habitué à cela maintenant, était plus calme : "Il a toujours été très courageux."
Il n'y eut aucune réponse de l'intérieur aux coups de Ruan Nanzhu. Celui-ci frappa une deuxième fois, puis finit par conclure que personne n'était actuellement dans l'atelier.
"Entrons," proposa Ruan Nanzhu.
"Mais la porte est fermée à clé," fit remarquer Tan Zaozhao. "Comment allons-nous entrer ?"
Ruan Nanzhu sortit une épingle à cheveux de sa poche et se pencha naturellement pour travailler la serrure.
Tan Zaozhao : "..." Elle avait presque oublié que Ruan Nanzhu possédait ces compétences divines.
Après quelques instants passés à manipuler la serrure, un léger clic se fit entendre, et la porte fut ouverte par Ruan Nanzhu. Il saisit la poignée, ouvrit doucement la porte, , révélant bientôt l'intérieur de la pièce. Il jeta d'abord un coup d'œil à l'intérieur de l'atelier pour en observer la disposition. Puis, il fit signe à Lin Qiushi : "Viens avec moi, Tan Zaozhao, reste à la porte et fais le guet. Si tu entends quelque chose de suspect, préviens-nous."
Tan Zaozhao acquiesça docilement.
Lin Qiushi s'avança et entra dans l'atelier avec Ruan Nanzhu.
L'atelier n'était pas très grand, et l'éclairage était très mauvais. Les fenêtres étaient recouvertes de lourds rideaux noirs, bloquant complètement tout flux de lumière naturelle de rentrer à l'intérieur. Ils ne pouvaient compter que sur une faible lumière provenant d'une petite lampe au plafond. Il fallait faire un effort pour distinguer les détails de la pièce.
Au milieu de l'atelier, un chevalet supportait une toile recouverte d'un tissu. L'ensemble de la pièce était imprégné d'une odeur âcre de peinture, étouffante.
Ruan Nanzhu, toujours direct dans ses actions, se dirigea vers le chevalet et souleva le tissu.
Une fois le tissu enlevé, une peinture inachevée fut révélée. Lin Qiushi fut surpris en voyant cette œuvre : "C'est..."
"La Cène," dit Ruan Nanzhu.
(NT : du latin coena, qui signifie "repas" ; dernier repas que Jésus-Christ a partagé avec ses apôtres avant sa crucifixion. Cela a donné lieu à une peinture célèbre de Léonard de Vinci)
À première vue, cette peinture ressemblait effectivement à la Cène, représentant un groupe de personnes participant à un banquet autour d'une longue table. Mais en y regardant de plus près, on remarquait que les convives n'étaient pas les douze apôtres du Christ, mais eux-mêmes. Oui, c'était bien eux, ceux qui étaient entrés dans la porte.
Il y avait Ruan Nanzhu, Lin Qiushi, Tan Zaozhao, assis autour de la table, certains mangeant, d'autres conversant à voix basse avec leurs voisins.
Si cela s'était arrêté là, ce n'aurait pas été si étrange. Mais les personnages sur la peinture n'avaient presque pas de visage. Lin Qiushi ne pouvait les reconnaître qu'à leurs vêtements.
"Son visage est peint," dit Ruan Nanzhu en désignant une fille dans un coin. "C'est sûrement Xiao Su."
Lin Qiushi vit également ce que Ruan Nanzhu montrait. Dans un coin de la table, le visage d'une fille était peint, mais son expression n'était pas celle de la joie ou de la détente d'un repas. C'était une expression de peur indescriptible. Même à travers la toile, Lin Qiushi pouvait ressentir cette atmosphère de désespoir. C'était comme si toute la douleur captive dans la toile s'était éveillée avec cette unique touche de couleur de la palette de l'artiste. Le souffle oppressant du désespoir effleurait l'âme de Lin Qiushi, pénétrant insidieusement les recoins les plus profonds de son cœur ; il ressentait intensément ces émotions de détresse, comme si elles faisaient partie intégrante de lui, comme si lui-même était une part du tableau.
À part cette peinture, il n'y avait rien d'autre de particulier dans l'atelier. Après avoir inspecté les lieux, Ruan Nanzhu ne s'attarda pas et sortit avec Lin Qiushi, en refermant soigneusement la porte derrière eux.
Tan Zaozhao, les voyant sortir, leur demanda anxieusement ce qu'ils avaient vu à l'intérieur.
"Une peinture," révéla Lin Qiushi. "Une peinture où nous sommes en train de dîner." Il décrivit ensuite les détails particuliers de la peinture.
Après avoir écouté, Tan Zaozhao avala sa salive et demanda d'une voix tremblante : "Cette fille, Xiao Su a vraiment été emprisonnée dans cette peinture ?"
"Oui," répondit Ruan Nanzhu. "C'est probablement ce qui s'est passé. Je veux aussi aller voir au sixième étage."
"Allons-y," soutint Lin Qiushi.
Le sixième étage avait un endroit particulier que le majordome leur avait dit de ne pas visiter : la salle d'exposition des œuvres inachevées.
Comme son nom l'indiquait, cet endroit devait abriter les peintures qui n'étaient pas encore terminées. Ruan Nanzhu trouva rapidement cette pièce au sixième étage et ouvrit sans difficulté la serrure de la porte. Il entra avec Lin Qiushi.
L'environnement de la salle d'exposition des œuvres inachevées était un peu meilleur que celui de l'atelier, bien que morne. Au moins, les fenêtres n'étaient pas recouvertes de tissu noir, et la pièce était très spacieuse.
Elle était remplie de peintures, alignées les unes à côté des autres. Lin Qiushi en regarda quelques-unes et remarqua que la plupart avaient des parties manquantes, comme si elles étaient intentionnellement laissées inachevées.
Ruan Nanzhu, avec son sens aigu de l'observation, parcourut rapidement des centaines de peintures et trouva rapidement ce qu'il cherchait. Il appela doucement Lin Qiushi, qui était encore en train de chercher : "Qiushi."
Lin Qiushi s'approcha de Ruan Nanzhu et vit ce qui avait attiré son attention. En voyant la peinture que Ruan Nanzhu désignait, Lin Qiushi sentit un frisson glacé lui parcourir l'échine. Il resta silencieux pendant un long moment étouffant, puis murmura : "C'est... ma chambre ?"
"Oui," confirma Ruan Nanzhu. "Ta chambre."
La peinture représentait une pièce identique à la chambre de Lin Qiushi, avec la même disposition et même la vue depuis la fenêtre. La porte de la chambre était grande ouverte, et des traces d'eau fétide marquaient le sol, rappelant la terrible scène de cette nuit-là. Mais cette peinture avait également une partie manquante, près de la porte, comme si elle avait été laissée exprès pour que Lin Qiushi la remplisse.
"Si tu n'avais pas réalisé que Tan Zaozhao était un imposteur cette nuit-là," dit Ruan Nanzhu en regardant la peinture, d'un ton calme mais effrayant, "tu aurais probablement rempli cette partie."
Lin Qiushi : "...Oui."
Ruan Nanzhu commenta : " Néanmoins, cette peinture est intéressante. Je me demande si on peut l'emporter." Bien qu'il ait dit cela, il ne fit pas mine de toucher la peinture. Il pivota alors sur ses talons et dit : "Allons-y, nous en avons assez vu."
Lin Qiushi demanda : "Tu as mémorisé les peintures ?"
Ruan Nanzhu répondit : "En gros."
Quand Ruan Nanzhu disait "en gros", cela signifiait généralement qu'il avait pris note de l'idée approximative . Effectivement, une fois sortis, il expliqua : "Mémoriser ne sert pas à grand-chose. Les scènes de ces peintures couvrent presque tous les coins du château. On ne peut pas les éviter."
Lin Qiushi soupira.
"Tant que tu es prudent à partir de maintenant, il ne devrait pas y avoir de problème." le rassura Ruan Nanzhu. "Après tout, c'est une porte de niveau inférieur, les conditions de mort sont assez strictes."
Tan Zaozao marmonna en signe d'objection, arguant que les conditions étaient plus que dures. Si elle avait été à la place de Lin Qiushi cette nuit-là, il y aurait déjà cinq mètres d’herbe poussant sur sa tombe. Qui pourrait garder son calme et distinguer les anomalies autour de lui dans une telle situation ?
Ruan Nanzhu lui jeta un regard en biais et, chose rare, la réconforta : « Ne t’inquiète pas. Si jamais tu deviens un tableau… »
Les yeux de Tan Zaozao brillèrent d’espoir : « Vous viendrez me sauver ? »
Ruan Nanzhu répondit : « Nous veillerons à exaucer tes dernières volontés et à vivre pour toi, afin que tu partes en paix. »
Tan Zaozao : « … » Elle n’était absolument pas réconfortée, merci bien.
Ils avaient passé plus de temps à explorer les deux endroits que prévu et, lorsqu’ils redescendirent, il était presque l’heure du dîner.
Tout le monde se retrouva à l’heure dans la salle à manger pour manger. Mais une fois le repas commencé, Lin Qiushi remarqua qu’il manquait une personne : seules sept personnes étaient assises autour de la grande table.
« Où est la dernière personne ? » demanda-t-il.
« Il a dit qu’il ne se sentait pas bien, » répondit quelqu’un. « Il se repose dans sa chambre. »
Lin Qiushi s’étonna : « Il ne vient même pas manger ? »
L’autre haussa les épaules : « Je ne sais pas… J’irai voir plus tard. »
Lin Qiushi acquiesça.
Ce manoir était immense, et chacun se dispersait dans son coin. Le seul moment où l’on pouvait vérifier si tout le monde allait bien et évaluer la situation, c’était à l’heure des repas.
Cependant, la personne qui avait répondu semblait également inquiète, s’agitant constamment sur son siège. À peine avait-il mangé la moitié de son repas qu’il se leva précipitamment. Quelques minutes plus tard, il revint avec un visage livide et des mains tremblantes : « Il… il a disparu. Il n’est plus dans sa chambre. »
Un silence pesant s’installa.
« As-tu cherché autour ? » demanda Lin Qiushi. « Les couloirs, les toilettes… »
« J’ai cherché. » L’individu secoua la tête. « Aucune réponse. »
Ruan Nanzhu s’essuya la bouche et demanda : « Y avait-il quelque chose d’inhabituel dans la chambre ? Comme un tableau, par exemple ? »
L’autre réfléchit un instant avant de secouer la tête : « … Je n’ai pas fait attention. »
« Allons voir ensemble. » déclara Ruan Nanzhu.
L’autre le regarda avec reconnaissance. Il était clair qu’il était mort de peur et n’osait pas y retourner seul.
Le groupe quitta alors la salle à manger et se dirigea vers la chambre du disparu. Dès qu’il entra, Lin Qiushi sentit cette odeur d’eau croupie et nauséabonde qui lui était si désagréable.
Sans aucun doute, l’occupant de cette chambre avait probablement vécu la même chose que lui. Sauf que… tragiquement , cet homme n’avait visiblement pas eu sa chance.
Ruan Nanzhu balaya la pièce du regard et déclara : « Il y avait autrefois un tableau accroché ici. Il n’est plus là. »
« Que signifie sa disparition ? » demanda quelqu’un, la voix tremblante. Après l’incident avec Xiao Su, tout le monde savait à quoi s’en tenir.
« Yang Jie… est-il… ? »
Yang Jie était le nom de l'homme qui avait disparu dans les airs.
« Impossible de le dire pour l’instant, » répondit Ruan Nanzhu en secouant la tête. « Nous devons continuer à chercher. »
Ils fouillèrent le manoir de fond en comble, sans succès. Malgré le ratissage de plusieurs étages, ils ne trouvèrent pas la peinture de Yang Jie.
Ce ne fut que le lendemain que Lin Qiushi, en jetant un coup d’œil par la fenêtre, aperçut quelque chose d’étrange dans les buissons au loin.
Il se précipita vers les buissons et découvrit, caché au fond des arbustes denses, un tableau. Le cadre noir lui était terriblement familier et portait encore des traces de terre fraîche à sa surface…
C’était sans aucun doute le même cadre qu’ils avaient enterré profondément la veille.
Et Yang Jie avait été retrouvé. Il était désormais figé dans le tableau que Lin Qiushi tenait entre ses mains. Son corps se fondait dans les buissons peints, déformé et s'inclinant vers l'intérieur, un spectacle troublant et étrange à voir.,
« Je l’ai trouvé. » déclara Lin Qiushi en rapportant la toile au manoir.
Dès que le compagnon de Yang Jie vit le tableau, il éclata en sanglots, un grand homme tremblant comme s’il était en plein choc électrique. Il essuyait frénétiquement ses larmes en gémissant : « On va tous mourir ici, n’est-ce pas ? On va tous mourir ici ! »
Son effondrement émotionnel eut un effet domino : bientôt, toute la pièce résonna de pleurs et de cris de panique.
Ruan Nanzhu, exaspéré, se renfrogna.
Lin Qiushi, ne sachant que dire pour réconforter ces individus en larmes, les laissa pleurer. Finalement, c’est Tan Zaozao qui en eut assez et jura : « Bordel, ça sert à quoi de chialer ? Ça va nous sortir de là ? Bande de grands gaillards plus peureux que moi, une fille chétive ! »
« Alors dis-nous quoi faire ! » lui lança l’un d’eux, furieux. « Quelqu’un s’est encore transformé en tableau ! »
« Comme si j’en savais quelque chose ! » répliqua Tan Zaozao, sèchement. « Je suis ta mère, peut-être ? pourquoi devrais-je m'occuper de bébés comme toi ! »
Ruan Nanzhu, visiblement de mauvaise humeur, ne prononça pas un mot et tourna les talons devant la foule paniquée.
Lin Qiushi et Tan Zaozao lui emboîtèrent immédiatement le pas.
Ce n’est qu’une fois dans leur chambre que Ruan Nanzhu lâcha enfin : « Je pense qu’il y a un traître parmi nous. »
« Hein ? Comment ça ? » demanda Lin Qiushi.
Ruan Nanzhu précisa : « Exactement ce que j’ai dit. Quelqu’un dans notre groupe tue intentionnellement. »
Lin Qiushi en resta bouche bée : « Un meurtre intentionnel ? »
Ruan Nanzhu resta calme : « Le tableau qui était dirigé vers ta chambre… Il a peut-être été placé là délibérément par quelqu’un. »
Lin Qiushi : « … »
Tan Zaozao frissonna en entendant cela : « Mais… Tu en es sûr ? Comment tu peux savoir ça? »
Ruan Nanzhu répondit : « Ce n’est qu’une supposition pour l’instant. »
Il s’assit sur le lit, baissa la voix et expliqua : « J’ai pris le temps d’aller voir l’endroit où nous avions enterré le tableau. Il y avait une rangée d’empreintes de pas supplémentaires. La pointure tourne autour du 35. Ce n’est ni celle de Tan Zaozao, ni celle de la maîtresse de maison. »
Il ferma les yeux, semblant se remémorer quelque chose, puis ajouta :
« Quelqu’un a déterré le tableau… Il y a cinq femmes dans notre groupe. En excluant Tan Zaozao et Xiao Su, il en reste trois. Parmi elles, deux correspondent au profil. »
Lin Qiushi demanda : « L’une d’elles, c’est cette nouvelle qui voulait rejoindre ton équipe ? »
Ruan Nanzhu hocha la tête : « Oui. »
Lin Qiushi hésita : « Tu crois que c’est elle… ? »
Ruan Nanzhu : « C’est possible. Elle pleurait aussi tout à l’heure, non ? »
Tan Zaozao, impatiente, s’exclama : « Évidemment qu’elle pleurait ! Elle n’a pas cessé de pleurer depuis notre arrivée ici ! »
Ruan Nanzhu acquiesça : « Attendons encore un peu. Pour l’instant, ce n’est qu’une supposition. »
"Bien." dit Lin Qiushi. "Alors ce soir, je vais dormir avec vous."
Ruan Nanzhu répondit : "D'accord."
*
Le soir, Lin Qiushi et Ruan Nanzhu dormirent dans le grand lit moelleux, tandis que Tan Zaozao s’étendait sur le sol près du lit. Elle s’était habituée à ce traitement inconfortable, donc elle n’était pas trop perturbée pour le moment. Le sol, c’est bien. Je peux rouler comme je veux, sans me soucier de devoir partager l’espace avec quelqu’un. Le sol, c’est vraiment bien… enfin, pas du tout ! Ruan Nanzhu, ce bâtard avare ! Je m’en souviendrai ! Hmph !
Lin Qiushi avait des préoccupations, accablé par l'agitation et le malaise. Il pensait qu’il ne réussirait pas à dormir, mais, étant donné qu’il avait ce somnifère humain à côté de lui, il s’endormit rapidement.
Lin Qiushi dormait profondément jusqu’au matin, mais en ouvrant les yeux, il ne vit pas Ruan Nanzhu.
"Où est-il ?" Lin Qiushi se redressa sur le lit et remarqua que Tan Zaozao était toujours enroulée dans ses couvertures, dormant profondément.
"Zaozao," dit Lin Qiushi en la réveillant. "As-tu vu Ruan Nanzhu ?"
Tan Zaozao ouvrit péniblement les yeux et répondit d’un ton confus : "Il a disparu ?"
"Oui," répondit Lin Qiushi. "Je ne l’ai pas vu quand je me suis levé."
"Je ne sais pas..." Tan Zaozao semblait aussi un peu désorientée. "Je ne l’ai pas vu."
Ruan Nanzhu était introuvable. Même au petit déjeuner, Lin Qiushi ne l’aperçut pas. Si cela avait été quelqu’un d’autre, Lin Qiushi aurait probablement pensé que cette personne était partie, mais Ruan Nanzhu n’était pas une personne ordinaire. Lin Qiushi se demandait donc s’il était parti faire quelque chose.
Cependant, après le petit déjeuner, Ruan Nanzhu n’était toujours pas là, et Lin Qiushi commença à s’inquiéter.
"Mais où est-il allé ?" demanda Tan Zaozao. "Peut-être qu’il est arrivé quelque chose..."
Lin Qiushi tenta de la rassurer : "Ne t’inquiète pas, on va continuer à chercher. Ruan Nanzhu est très compétent, il ne lui arrivera rien, de plus, il dormait avec nous hier soir, et il ne s'est rien passé ensuite."
Tan Zaozao resta silencieuse, les sourcils froncés avec inquiétude.
Ils cherchèrent dans tout le bâtiment, étage par étage, du rez-de-chaussée au huitième étage, mais ne trouvèrent toujours pas Ruan Nanzhu.
Tan Zaozao commença vraiment à paniquer. "Il ne lui est pas arrivé quelque chose, non ? Tu n’as rien entendu la nuit dernière ?"
"Non," répondit Lin Qiushi. Son ouïe était toujours très fine, s’il s’était passé quelque chose, il l’aurait entendu, mais il avait dormi toute la nuit sans entendre aucun bruit.
"Que faisons-nous ?" Tan Zaozao demanda, inquiète.
"Nous... allons regarder les peintures dans ces étages," répondit Lin Qiushi d’une voix un peu difficile. "On va vérifier d’abord."
Tan Zaozao ne répondit pas. Elle comprenait ce que Lin Qiushi voulait dire. Lin Qiushi avait peur que Ruan Nanzhu ait été transformé en peinture, et si c’était le cas… Tan Zaozao se tut, et suivit Lin Qiushi pour examiner attentivement les peintures du bâtiment.
Ils explorèrent trois étages complets, sans voir Ruan Nanzhu. Bien qu'ils aient été quelque peu soulagés, un sentiment obsédant de terreur continuait de les ronger, s'enfonçant plus profondément dans leurs cœurs lourds.
Ne trouvant toujours pas Ruan Nanzhu, ni l’un ni l’autre n’eurent faim au moment du déjeuner.
Tan Zaozao, épuisée, dit qu’elle voulait retourner se reposer un peu avant de continuer la recherche l’après-midi. Lin Qiushi, voyant qu’elle n’était pas dans son état normal, acquiesça en signe de compréhension.
Mais à leur retour dans la chambre, ils trouvèrent Ruan Nanzhu allongé sur le lit en train de faire une petite sieste, essayant de rattraper le sommeil qu'il avait manqué. Il avait l’air décontracté, rien à voir avec quelqu’un qui aurait eu un problème.
"Ruan Nanzhu !!!" Tan Zaozao cria presque, "Où étais-tu passé ? Tu nous as fait chercher partout !"
Ruan Nanzhu ouvrit les yeux, bâilla paresseusement : "J’avais des choses à faire."
"Des choses à faire ? Pourquoi ne pas nous avoir prévenus ?" se plaignit Tan Zaozao. "Tu sais à quel point on s’est inquiétés pour toi ? On t’a cherché toute la matinée."
Ruan Nanzhu répondit : "Je ne savais pas que ça prendrait aussi longtemps."
Tan Zaozao : "Hm ? Où es-tu allé exactement ?"
Ruan Nanzhu expliqua : "Je suis allé dans le tableau."
À ces mots, Tan Zaozao se tut immédiatement. Elle resta silencieuse pendant un moment, avant de demander, avec prudence : "Dans le tableau ? Est-ce le tableau auquel je pense?"
Ruan Nanzhu acquiesça.
Lin Qiushi, stupéfait, dit : "Comment as-tu pu y entrer… ? Le cadre avait disparu, non… ?"
"Non," répondit Ruan Nanzhu. "On a mal compris quelque chose. Xiao Su a disparu, mais le cadre est toujours là. Yang Jie a disparu, et son cadre n’a pas disparu non plus. Pour le dire autrement, l’ancien cadre est devenu un tableau, et de nouveaux cadres vont apparaître."
Lin Qiushi : "…"
Ruan Nanzhu ajouta : "Celui qui veut qu’on meure a utilisé un nouveau cadre." Il sourit. "Mais heureusement, c’est réglé maintenant."
Lin Qiushi : "Qu’est-ce que tu veux dire… ?"
Ruan Nanzhu répondit : "Au sens littéral. Et aussi, j’ai trouvé un nouveau message."
Il y avait tellement d’informations que Lin Qiushi et Tan Zaozao n’arrivaient pas à tout saisir. Les deux avaient l’air complètement perdus, leurs esprits semblaient un peu surchargés.
En voyant leurs expressions hébétées, Ruan Nanzhu afficha un regard presque paternel et dit : "Ne vous inquiétez pas, vous pouvez réfléchir lentement."
Lin Qiushi : "…" Est-ce une tolérance envers leur intelligence ?
Non, c’était sans doute un amour et une compassion paternels. Tan Zaozao comprit la signification du regard de Ruan Nanzhu.
Ruan Nanzhu semblait avoir compris, voyant que Lin Qiushi et Tan Zaozao étaient encore dans la confusion, et soupira avant de s’asseoir sur le lit. Il expliqua simplement ce qui s’était passé la nuit précédente.
Il apparut que, après que Lin Qiushi se soit endormi cette nuit-là, Ruan Nanzhu s’était réveillé en plein milieu de la nuit, sentant que quelque chose n’allait pas. En se levant, il avait découvert que, près de la fenêtre, un cadre était apparu.
Le cadre se fondait dans l’obscurité, et si Ruan Nanzhu n’avait pas eu une bonne vue, il l’aurait peut-être manqué.
L’intuition lui disait que ce cadre était suspect, alors il sortit précipitamment de la chambre pour l’enlever. En descendant, il aperçut une femme vêtue de noir, se tenant dans l’escalier et le regardant silencieusement.
Pour n’importe qui d’autre, cela aurait été un choc, mais Ruan Nanzhu était habitué à ce genre de jeu. Il ne ressentit aucune peur et se contenta de la fixer en retour pendant quelques minutes, jusqu’à ce qu’elle disparaisse d’elle-même.
"Putain !!!" Tan Zaozao, n’en pouvant plus, s’écria : "Tu n’as pas eu peur ? Tu l’as juste fixée ?!"
Ruan Nanzhu répondit : "Pourquoi avoir peur ? De toute façon, elle est partie la première."
Tan Zaozao : "…" Je n'ai pas de mots.
Ruan Nanzhu continua : "Ensuite, elle est apparue plusieurs fois. Je voulais rapidement sortir et prendre le cadre, mais je sentais que quelque chose n’allait pas." Il ajouta : "Je pense qu’elle essayait de me pousser quelque part."
Lin Qiushi écoutait en silence.
"J’ai réfléchi et je me suis rendu compte qu’elle apparaissait toujours près de l’escalier, mais elle ne m’attaquait pas. Elle ne voulait peut-être pas que je monte les escaliers ?" Ruan Nanzhu poursuivit. "Le seul endroit où elle n’est pas apparue, c’est devant la porte. Alors, je suppose qu’elle voulait que je sorte."
"Et dehors, c’est le monde du tableau ?" Tan Zaozao demanda. "C’est ça ?"
"Presque," répondit Ruan Nanzhu. "Heureusement que Qiushi nous avait fourni des informations." Il expliqua : "J’ai constaté que l’extérieur était en effet une image miroir."
Dehors, c’était sombre, avec des buissons noirs et indistincts. Il était impossible de voir quoi que ce soit de suspect, mais grâce à l’expérience de Lin Qiushi, il put observer minutieusement avant de confirmer facilement que l’extérieur était effectivement inversé.
"facilement je ne suis pas sorti tout de suite, j’ai attendu un peu dans la pièce," expliqua Ruan Nanzhu en haussant les épaules. "Qui aurait cru que j’aurais attendu si longtemps."
"Tu m’as fait peur," dit Tan Zaozao en soupirant de soulagement après avoir entendu la réponse de Ruan Nanzhu. "Tu n'as aucune idée de ce qui nous traversait l'esprit à ce moment-là. Qiushi et moi avons cru que tu étais devenu un tableau."
Lin Qiushi hocha la tête en signe d'accord.
Ruan Nanzhu sourit chaleureusement."Eh bien, me voilà maintenant. Je vais tout à fait bien."
Bien que Ruan Nanzhu n’ait décrit la scène qu’en quelques mots, Lin Qiushi en comprenait les dangers perfides que l'autre avait évités de justesse.. Ruan Nanzhu avait failli rester coincé dans ce monde, à quelques pas près.
"Que veux-tu dire par ‘nouveau message’ ?" demanda Lin Qiushi, intéressé.
"Tiens." Ruan Nanzhu sortit un bout de papier de sa poche.
Lin Qiushi le prit et lut le message. C'était un poème :
"Tu te tiens sur le pont, admirant le paysage,
Pendant que ceux qui contemplent la vue, te scrutent de l'étage.
La pleine lune illumine ta fenêtre et luit,
Et toi, tu embellis les songes d'autrui. "
(NT : poème Fragment(断章- Duanzhang), du poète chinois Bian Zhilin (1910-2000). Le poème suggère l’idée que nous sommes à la fois des observateurs et les objets de l’observation dans ce monde de relations réciproques et de points de vue relatifs)
Lin Qiushi fut stupéfait : "C’est… un indice pour la porte ?"
"Oui," répondit Ruan Nanzhu. "Cet indice, je l’ai obtenu de quelqu’un d’autre."
"Quelqu’un d’autre ?" répéta Tan Zaozao.
Ruan Nanzhu répondit : "C’est la nouvelle personne qui voulait rejoindre notre équipe le premier jour."
--
L’auteur a quelque chose à dire :
Lin Qiushi : "Le cinquième jour sans Meng, je pense à elle."
Ruan Nanzhu : "Lin ? Qiu ? Shi ???"
Lin Qiushi murmure : Je plaisantais..."
Traducteur: Darkia1030
Créez votre propre site internet avec Webador