ISMM - Chapitre 10 - Blessé dans ton corps, blessé dans mon cœur
145.
Une fois assis au restaurant, Gu Yiliang déclara qu’il n’avait aucune restriction alimentaire et qu’il n’était pas difficile, me laissant choisir les plats.
146.
Mensonge ! Un énorme mensonge !
Les infos que j’avais reçues me disaient qu’il n’aimait pas les plats sucrés, ni ceux trop vinaigrés, ni les saveurs aigres-douces. Il n’aimait pas non plus les poireaux, le melon amer, le céleri ou les carottes. Il n’aimait pas les soupes, préférait le poulet au canard ou à l’oie, aimait le porc, le bœuf et l’agneau mais pas le poisson, adorait les crabes et les coquillages mais pas les crevettes.
Toutes ces précieuses informations avaient été collectées avec diligence par les fans Niangzi à travers diverses sources !
Et leur exactitude ?
Vu à quel point elles étaient précises à mon sujet, ça devait être assez fiable.
147.
Je parcourus le menu et dis au serveur : « Un plat de poulet effiloché au poivre, un ragoût de crabe (sans crevettes), des pousses de bok choy sautées à l’ail, et deux bols de riz blanc. »
Puis je me tournai vers Gu Yiliang, qui semblait légèrement surpris : « Ça te va ? Tu veux boire quelque chose ? »
« … Oui. »
Gu Yiliang dissimula sa surprise, commanda une bouteille de Jiaduobao (NT : une boisson chinoise à base de plantes) pour lui et une bouteille de thé au miel pour moi.
148.
La force de petit ami du grand patron Gu Yiliang !
Je bus mon thé au miel glacé avec bonheur.
149.
Les plats arrivèrent rapidement.
Nous prîmes nos baguettes en parfaite synchronisation, soulevâmes nos bols de riz en même temps, et ajoutâmes une portion de poulet effiloché dans nos bols, pressant légèrement les morceaux de poulet sur le riz.
C’était tellement synchronisé que nous échangeâmes un regard et éclatâmes de rire en même temps.
150.
Nous mangeâmes et bûmes lentement, discutant de tout et de rien. La conversation dériva sur des anecdotes de tournage.
Gu Yiliang raconta en riant comment, lors du tournage d’un drama wuxia à petit budget, les figurants étaient si peu professionnels et les accessoires si médiocres qu’il s’était fait frapper accidentellement sur le côté par une épée pendant une scène de combat. L’épée s’était même pliée, et il avait eu une ecchymose pendant plusieurs jours. Il parla aussi des câbles de sécurité défaillants…
J’écoutais, horrifié, et ratais plusieurs fois ma tentative de saisir un morceau de crabe.
Il me regarda, interrompant brusquement son récit, et déposa une pince de crabe dans mon bol : «Mais depuis, il n’y a plus eu d’incidents comme ça. Les plateaux de tournage sont très sûrs maintenant, surtout avec des budgets de plusieurs millions. Ne t’inquiète pas. »
Je hochai la tête, dubitatif, en mordant la pince de crabe.
Il demanda, amusé : « Tu n’as jamais été blessé pendant un tournage, toi ? »
Je répondis naturellement : « Bien sûr que si, mais ce n’est pas pareil. Une blessure sur toi… »
151.
J’avalai la phrase « tes fans me tiendraient entièrement responsable » et bifurquai maladroitement : « … me fait mal au cœur ? »
152.
Et voilà, l’embarras omniprésent.
Je riais nerveusement, lui servant assidûment des plats, au point de vouloir lui enfourner directement la nourriture dans la bouche pour l’empêcher de dire quoi que ce soit.
Il hésita, me regarda avec perplexité, puis commença à me servir des plats à son tour.
Je lui en servis encore plus.
Il riposta en m’en servant davantage.
Je lui donnai toutes les pinces de crabe.
Il enleva les grains de poivre du poulet et les mit dans mon bol.
Je pris une cuillère et arrosai son riz de sauce.
Il remplit ma tasse vide de thé au miel.
…
153.
Je lui tendis une serviette en papier.
Il appela le serveur pour régler l’addition.
Moi : « … »
Lui : « … »
154.
Un vrai pro ! J’ai perdu !
Je regardai la montagne de nourriture dans mon bol, mangeai quelques bouchées en tremblant, puis levai les yeux vers Gu Yiliang pour avouer avec difficulté : « … Je ne peux pas tout finir… »
Gu Yiliang éclata de rire et éloigna mon bol : « Alors pourquoi tu t’es forcé ? Ne te gave pas. »
Quel homme attentionné.
J’étais touché par sa sollicitude quand il cligna des yeux et imita ma voix maladroite : « Après tout, si tu te gaves, ça me brise le cœur. »
155.
Je m’en vais !
156.
Je me levai et sortis du restaurant sans un regard en arrière, flottant comme une âme errante dans la rue.
Gu Yiliang, retenant un rire, me rattrapa et posa une main sur mon épaule : « Tu es fâché ? Je plaisantais. »
Je le regardai, le visage blême, et repoussai sa main : « Fais attention à ton image. »
Il reposa sa main sur mon épaule, incapable de cacher son amusement : « Même si on nous prend en photo, ce n’est pas grave. Ne pouvons-nous pas simplement laisser l'entreprise publier un communiqué de presse disant que Gu Yiliang et Wei Yanzi sont devenus amis, non ? »
157.
Non, mais je ne comprends pas.
Les fans Niangzi avaient spontanément placé son nom avant le mien, bon, d’accord, c’étaient des jeunes filles un peu immatures. Mais pourquoi lui aussi, consciemment, plaçait-il son nom avant le mien ?
Etait-ce que juste parce qu’il s’appelait Gu, un nom de famille ultra-populaire dans le BL, il pouvait se permettre de faire ce qu’il veut ?
158.
Je protestai : « Ça devrait être Wei-Gu, pas Gu-Wei. »
Il me regarda, sincèrement perplexe : « Il y a une différence ? »
Moi : « … »
Grand maître, même si je suis aussi un hétéro, tu es vraiment trop hétéro, là !
(NT : pour ceux qui ne le savent pas, une convention courante dans les fandoms de BL est que le 1er nom est le gong)
159.
Pour sauver ma dignité sur ce point étrange, je dis des choses comme « Wei-Gu sonne mieux », «c’est plus agréable à l’oreille et plus mémorable », tout en essayant subtilement de lui faire comprendre que mon nom devrait venir en premier.
Nous continuâmes à plaisanter un peu, et alors que nous approchions de la route principale, j’allais à nouveau repousser sa main, mais il la retira avant moi et sortit son téléphone pour vérifier quelque chose.
Je fis la moue intérieurement.
Hum, regarde-moi cet idole modèle hypocrite.
160.
Puis cet idole modèle hypocrite rangea son téléphone, se dirigea vers un coin un peu sombre et sortit un paquet de cigarettes de sa poche.
Moi : ???
161.
Je regardai Gu Yiliang, penché devant moi pour allumer une cigarette, et me dis que ce monde n’était pas réel.
Hello ? Tu te souviens de ton image d’idole modèle ?
Tu te souviens que je suis ton rival ?
Tu te souviens que ça fait trois ans qu’on se connaît et qu’on n’a échangé nos numéros WeChat qu’hier ?
Bon, personne n’a dit qu’une idole ne pouvait pas fumer, mais…
Il vit l’expression étrange sur mon visage et sourit : « Désolé, j’avais juste envie de fumer. »
Je restai sans voix.
Non pas parce qu’il osait faire ça devant moi, mais parce que, malgré son excellente capacité à dissimuler ses émotions et son sourire sincère, je pouvais sentir sa tristesse.
162.
Je lui dis : « Tu n’as pas peur que je sorte mon téléphone, te prenne en photo et utilise ça pour te discréditer sous un faux compte ? »
Gu Yiliang éclata de rire et haussa les épaules, indifférent.
Je dois dire, il avait l’air trop cool et rebelle avec cette cigarette à la bouche.
Je fus probablement ensorcelé par son attitude, car pendant un instant, je trouvai que Gu-Wei sonnait plutôt bien aussi.
163.
Il fuma en silence, penché, et je le regardai en silence. L’ambiance n’était pas gênante, mais elle me laissait un goût amer.
C’était Gu Yiliang, celui qui avait un si beau sourire quand il était heureux. Son sourire était déjà assez troublant, comment pouvait-il se permettre d’être triste et de me faire autant de peine ?
C’était irresponsable envers mon cœur.
Dans un élan impulsif, je tapotai légèrement sa main tenant le paquet de cigarettes : « Et si… tu m’apprenais à fumer ? »
164.
Gu Yiliang sembla surpris : « Pourquoi ? »
Moi : « … Comme ça, tu n’auras plus à craindre que je te prenne en photo pour te discréditer. On sera dans le même bateau. »
Il me regarda longuement, puis se mit à rire doucement et me tendit la cigarette qu’il était en train de fumer.
165.
Hein ? Il est vraiment hétéro, lui ???
Je le remets sérieusement en question, là.
166.
Je pris la cigarette avec une expression complexe, la mis dans ma bouche et essayai de tirer une bouffée—
—puis je faillis m’étouffer.
167.
Gu Yiliang, sans surprise, reprit la cigarette et me tapota le dos en riant : « Maintenant, tu sais ce qu’il faut apprendre et ce qu’il ne faut pas apprendre, non ? »
Ce sadique ! Les larmes aux yeux, je le fusillai du regard : « Ne bouge pas, reste comme ça, je vais sortir mon téléphone et te prendre en photo pour te faire chanter ! »
Il rit encore plus fort, sortit son téléphone, ouvrit l’appareil photo, m’attira à ses côtés, mit la cigarette à sa bouche, passa un bras autour de mon cou et prit plusieurs photos en rafale.
168.
Avec l’appareil photo avant de l’iPhone.
D’accord, je crois qu’il est vraiment hétéro.
169.
Ayant confiance en mon visage et connaissant son talent pour choisir les photos, je ne demandai pas à voir le résultat. Mais je remarquai son fond d’écran : un chat en train de somnoler.
Le pelage me semblait familier, comme celui du chaton qu’il avait attrapé dans une vidéo postée par un de ses amis du milieu.
Je désignai son téléphone : « C’est le chaton que tu as attrapé dans cette vidéo ? Il a bien grandi. »
Il garda son bras autour de mon cou et sembla légèrement surpris.
170.
Merde !
Comment allais-je expliquer que j’avais vu cette vieille vidéo, qui n’avait que quelques centaines de vues, sans le suivre ni lui ni ses amis du milieu ?
Il allait croire que je suis un pervers obsédé par son corps et son âme !
171.
Je repris mon visage d’idole impassible, tout en paniquant intérieurement, essayant désespérément de trouver une explication plausible.
Mais il se frotta le nez, un peu gêné, et dit avec un sourire timide : « Tu l’as vue ? Alors, pendant le tournage… tu as fait un peu plus attention ? »
172.
?
173.
J’étais complètement perdu.
Traduction: Darkia1030
Créez votre propre site internet avec Webador