Dinghai - Chapitre 2 – Première rencontre

 

« Je lui ai donné des médicaments. Vous me dites maintenant qu'il a des milliers de morts sur la conscience ? »

 

Une demi-heure s’écoula.
L'identité de Chen Xing était déjà devenue l’objet d’une querelle dans le manoir du gouverneur. Beaucoup de gens disaient que l’intention de ce garçon était assez suspecte et qu’il devait faire l'objet d'une enquête.
Zhu Xu déclara : « Les documents émis par Xie An ne sont pas des faux ! Que voulez-vous que je fasse ? »
Un général répondit : « Avoir un seul document ne suffit pas pour faire sortir un prisonnier condamné à mort ! »
Quelqu’un ajouta : « J’ai peur que ce soit un espion envoyé dans notre ville ! Les personnes dans le couloir de la mort sont capables des pires vilénies. Même si la ville s’effondre, on ne peut pas les laisser vivre ! »

Dans la pièce des invités, au-dessus :
Chen Xing allongea l'homme sur le canapé, s’assit sur le rebord, respirant rapidement. Il lui essuya le visage, sortit chercher de l'eau, puis ouvrit la poche à médicaments qui pendait à sa taille et en sortit une pilule rouge. Il tenta de maintenir la bouche de l'homme ouverte, mais ses dents étaient étroitement serrées et tremblaient, et il ne put le nourrir. Chen Xing réfléchit au problème pendant longtemps, puis se résigna à mâcher la pilule, la dissout avec un peu d’eau froide, puis pinça l’homme à la mâchoire et le nourrit de force avec sa propre bouche.
Est-ce lui ?

Chen Xing fronça les sourcils en se rappelant ce qu'il avait vu dans ses rêves, la ville de Xiangyang, couverte de neige abondante. Le bâtiment au cœur de la ville était la maison du gouverneur, sans conteste. La Lampe du cœur clignota trois fois, la première fois le guidant vers le donjon, la deuxième fois à la porte du donjon, et la troisième fois dans la cellule au plus profond du donjon.
« D’où viens-tu ? » Chen Xing essuya son visage et murmura : « Pourquoi est-ce toi qui as été choisi par la Lampe du cœur ? »
Quelqu’un à la porte de la pièce lui remit un message : Zhu Xu voulait le voir. Chen Xing n’avait pas encore organisé les choses ici, et voulut que Zhu Xu attendît un peu, mais le messager n’accepta tout simplement pas, attendant obstinément devant la porte. Chen Xing, impuissant, dut se précipiter.
La neige continuait de tomber. Zhu Xu se tenait au troisième étage de la tour, surplombant la ville de Xiangyang.
Chen Xing arriva derrière Zhu Xu, face aux lumières de la ville. Au loin, on entendait le son d’une flûte, qui ressemblait aux pleurs d’une personne.
« Donne-moi une explication claire. » déclara Zhu Xu : « Sinon, je ne pourrai pas te laisser prendre ce prisonnier, que tu sois un exorciste ou non. »
Chen Xing regarda Zhu Xu, et soudainement demanda : « Seigneur, crois-tu qu’il y a des dieux dans le monde, qu’il y a des monstres ? Crois-tu que j’ai des pouvoirs magiques ? En fait, je suppose que tu n’es pas convaincu. »
Zhu Xu soupira et dut admettre : « Aujourd’hui, je voulais juste stabiliser les militaires. Dis simplement la vérité, ne mens plus. Ton véritable objectif est ce prisonnier. Je suppose que c'est vrai ? Qui t’a mandaté pour venir le chercher ? Ça ne peut pas être Xie An. Tu es envoyé par les Hu ?»
À mesure qu’il parlait, Zhu Xu devint à nouveau ferme, prononçant chaque mot clairement :
« Donne-moi une idée claire de la situation. Si tu dis les mauvais mots, ta tête tombera. Même si la ville s’écroule demain, aujourd’hui je suis encore le maître, je peux te décapiter à tout moment. »

Chen Xing regarda le sabre accroché à la taille de Zhu Xu, puis le regarda dans les yeux, sachant que Zhu Xu avait commencé à remarquer que quelque chose n’allait pas. Aux yeux des autres, il n'était qu'un adolescent prétendant être un Dieu pour agir comme le diable. Auparavant, il s’était mis un bandeau noir sur les yeux, pour être plus sensible à la Lampe. Ce n'était pas une tromperie délibérée. En fait, même Chen Xing n’aurait jamais imaginé que la personne qu’il cherchait était dans le couloir de la mort.

Chen Xing répondit : « Eh bien, je vais vous dire tout, si vous voulez sortir votre épée, attendez que j’aie fini. »
Zhu Xu se tourna et regarda Chen Xing dans les yeux. Il répondit froidement : « Parle. Je veux entendre quels mensonges tu as inventés ! »
« Il faut vraiment recommencer depuis le début. C’est une longue histoire qui prend en considération combien la vie est courte. Puisque le gouverneur insiste pour l’entendre, il n’y a pas de problème à la raconter. Il y avait du mana (1) dans ce monde il y a tout juste trois cents ans. »
Les sourcils de Zhu Xu se plissèrent légèrement, il ne s’attendait pas à ce que Chen Xing mentionnât ces soi-disant « sorts ».
« Il y a trois cents ans, il y avait des démons, de la magie et du mana dans le monde… » Chen Xing dut prétendre qu’il ne voyait pas le visage de Zhu Xu. Il s’écarta et expliqua lentement.
Cette année-là, l’empereur de la dynastie Han était en place, et Ban Chao fut envoyé dans les régions occidentales en mission diplomatique, pour définir la stratégie de la région occidentale pendant les cent prochaines années. Tous vivaient et travaillaient en paix, et les alchimistes, samouraïs et guérisseurs florissaient. D’après la légende, les soi-disant « démons » furent expulsés par de puissants exorcistes vers les régions montagneuses du sud-ouest de Yizhou et l’État de Yelang. Ils furent encerclés par des enchantements et piégés, jusqu’à ce qu’ils périssent, afin de les empêcher de s’immiscer dans les affaires de l’Empire du Milieu.
Après que les démons furent exterminés, les êtres humains n’eurent plus qu’une mission : rechercher la longévité.
Les alchimistes croyaient que tant qu’ils communiquaient avec les cieux et la terre, absorbaient l’aura spirituelle et pratiquaient la magie, ils vivraient pour toujours. Mais un certain jour, tout le « mana » du monde disparut du jour au lendemain.
Il n’y eut aucun signe précurseur. Toutes les armes magiques existant sous le soleil se transformèrent en ferraille, et les artefacts utilisés pour lutter contre les démons devinrent des armes banales. Les chants et les sorts perdirent leur efficacité – que ce fût les sorts puissants capables de déplacer les montagnes et remplir la mer, ou bien les petits sorts comme les « cinq fantômes pour transporter de l'argent ».

Chen Xing fit un geste dénué de sens vers Zhu Xu, en disant : « Depuis lors, il n’y a plus de mana sur la terre de Chine. C’est ce que les exorcistes appellent "la magie est revenue au silence". »
« Oh ? » Zhu Xu rit, puis dit avec un sourire : « Alors, maintenant ? »
Chen Xing déclara avec regret : « Certaines personnes disent que c’est ‘la porte Xuan’, celle qui libère l’aura du ciel et de la terre, qui s’est fermée.
Laozi dit que "plonger du mystérieux au plus mystérieux est la voie vers le secret de toute vie". Les gens à cette époque pensaient que l’aura du ciel et de la terre était libérée de l’invisible ‘porte de Xuan’ dans le vide céleste. Ils pensaient que si le mana n’existait plus, c’était parce que la porte Xuan s’était fermée. Alors, ils offrirent des sacrifices aux cieux, adorèrent les montagnes et les rivières, et épuisèrent toutes les méthodes possibles, toutes furent vaines.
Heureusement, la tribu des démons ne déclencha pas de chaos à grande échelle. Après tout, dans les années où les exorcistes étaient répandus, les monstres furent tous détruits. Pour que les nouveaux oiseaux et bêtes puissent se cultiver comme des démons, ils devaient absorber l’aura spirituelle du ciel et de la terre. Sans l’aura spirituelle, naturellement, il était impossible de faire des vagues. Après tout, utiliser l’énergie démoniaque (yao) pour faire de mauvaises choses sans pouvoir la recharger en aspirant celle des autres était très fatiguant.
Il y a des avantages et des inconvénients à ce que la magie soit silencieuse. Sans monstre, le monde n’a naturellement plus besoin d’un exorciste.
Mais le problème résidait ailleurs – les démons yaos ne pouvaient pas se cultiver, mais ce n’était pas nécessairement indispensable pour les vrais démons.
Chen Xing déclara : « Les démons sont le grief du monde. Les morts sur terre sont pleins de ressentiment. Tout naît dans le ciel, retourne à la terre, puis entre dans le cycle céleste de réincarnation, mais ce ressentiment ne peut être éliminé. À vrai dire, plus les gens meurent de la peste, la guerre, les famines, plus il est facile de recueillir des griefs. »
Pendant le règne de l’empereur Hui, la famille royale Sima concourut pour le trône et un total de 800 000 personnes moururent dans la guerre civile. Au cours des années de sécheresse dans les plaines de Guanzhong, il y eut de fréquentes famines, et plus de deux millions de personnes moururent de faim et de maladies.

Pendant les années Yongjia, Liu Yuan envahit le Comté Huguan, vainquit les défenses de Chang’an et captura Luoyang. À Guanzhong, Guan Yu et dans d'autres endroits, 1,8 million de personnes moururent. Les Jin s’enfuirent vers le Sud via Jiankang et furent anéantis près du fleuve Yangtze.
Le moine Shi Leike maîtrisa Jinyang et sa région, et plus de deux millions de personnes moururent.
Le clan Murong de la tribu Xianbei et le général Heng Men, des Jin, s’engagèrent dans une bataille gigantesque, qui tua 400 000 personnes. Les tribus Xianbei, Xiongnu et Jie pillèrent les plaines centrales. Elles n’avaient pas pris de provisions avec elles et demandèrent aux Han, qu’elles appelaient les « moutons à deux pattes », de leur fournir de la nourriture militaire en cours de route. 20 millions de personnes vivaient dans les plaines centrales d’après les calculs faits par la dynastie Jin. Après que Ran Min (2) eut tué Jie Zhao, on refit le calcul et il restait moins de 4 millions de personnes.
Cependant, les bons moments ne durèrent pas longtemps et la ville tomba. Ran Min fut tué par la tribu Murong, et les gens furent abattus, leurs possessions volées.
Chen Xingchao déclara : « Seigneur gouverneur, après avoir compté, il y a toujours 20 millions de personnes tuées. Les 10 premiers millions de personnes sont des Chinois Han. Elles furent tuées par la cavalerie des Cinq Barbares. Des millions de personnes de la tribu Hu se livrèrent à des luttes internes. Tout ceci intensifia la naissance des ressentiments. »
Même s’il savait que Chen Xing mentait, Zhu Xu écouta toujours, comme en transe, et répondit : « Le monde est dans le chaos et la vie des gens est fragile comme de la porcelaine. »
Chen Xing déclara : « Si l’on remonte encore plus loin, les familles Wei, Sui et Wu divisèrent le monde en trois parties. Au cours des 100 dernières années, il y eut des batailles sans fin. Les gens moururent dans les guerres par dizaines de millions. Par conséquent, plus de 30 millions de personnes moururent dans la Contrée Divine au cours des trois cents dernières années. Le grief de ces 30 millions de personnes erre entre le ciel et la terre, ne pouvant aller nulle part ; il est déjà allé bien au-delà des limites que le pays peut accueillir. Si cela continue, des démons seront créés en quelques années. J’ignore l’origine possible de ces démons, je n’ai jamais rencontré une situation semblable auparavant. Il y a très peu de documents historiques. Le point important est le suivant. Chacun doit être préparé à l’avance, être sur ses gardes, car l’apparition du diable peut arriver à n’importe quel moment. »
« Ma famille est originaire de Jinyang, et mes parents moururent jeunes. Après la bataille entre Fu Jian et le clan des Murong, je déménageai à Mt Hua pour vivre en isolement. »
Chen Xing se souvint encore clairement de la bataille d’il y a neuf ans, même s’il n’avait alors que sept ans. Sa maison prit feu et brûla entièrement, et sa grand-mère ordonna à un fidèle serviteur de l’envoyer chez un vieil ami dans une région retirée du Mt Hua, pour étudier les déités et les étoiles, et pratiquer la technique de l’exorcisme. Je ne sais pas combien de générations se sont transmises les livres anciens, et de nos jours, ils sont couverts de poussière, puisqu’ils ne peuvent plus servir du fait de la disparition de la magie.
À l’âge de seize ans, Chen Xing fit un rêve – il rêva d’une grande ville où il n’était jamais allé. Après avoir écouté ceci, son maître réfléchit longuement, suspecta que c’était la ville de Xiangyang et lui dit que les rêves étaient le message de la Lampe du cœur. Son protecteur, le Dieu martial, l’attendait dans cette ville. Il devait d’abord trouver un moyen de le localiser, pour mener ensuite à bien sa mission avec son aide.
"Alors, je vins ici, et je me tiens devant vous", conclut finalement Chen Xing.
"Est-ce terminé ?" Zhu Xu sortit lentement l’épée : "Après avoir attendu longtemps, vous me déblatérez une histoire aussi ridicule ?"
Chen Xing ne recula pas. Face à la pointe de l’épée de Zhu Xu, il plaça sa main droite devant sa poitrine à l’emplacement du cœur, puis leva la main, et une lumière blanche scintilla dans cette main, face à Zhu Xu !
Zhu Xu s’attendait à ce que ce garçon continue à essayer de le bluffer. Il ne s’attendait cependant pas à ce qu’une lumière surgisse de nulle part et il fut soudainement secoué au point qu’il ne pouvait plus ouvrir les yeux.
« Ce… Quelle est cette astuce ? » Zhu Xu agrippa l’épée, mais ne put la bouger.
"C’est la Lampe du cœur", répondit Chen Xing.

Zhu Xu fut choqué : « Vous êtes vraiment… un mage, pouvez-vous émettre de la lumière ? À quoi sert cette lumière ? »
Chen Xing répondit honnêtement : « Cela ne sert pas, cela ne brille qu’occasionnellement. »
Zhu Xu : « … »

Zhu Xu devint encore plus méfiant. Chen Xing n’eut d’autre choix que de lâcher prise alors que la lumière s’éteignait. Il expliqua : « J’ai parcouru les annales de l’histoire et j’ai appris qu’il y aurait de grandes difficultés dans les cieux et sur la terre. Quand le Pays divin s’effondrera, un gardien de la Lampe du cœur, accompagné de son protecteur, le Dieu martial, apparaîtra pour exorciser les démons. L’apparition soudaine de la Lampe du cœur dans le monde indique que la résurrection de la "Magie" approche. Je dois trouver le Dieu martial, éveiller son pouvoir et aider le monde à résister au danger des démons.
« Les batailles entre les clans Hu et Han sont une affaire domestique. Lorsque les démons apparaîtront, toute la Chine sera complètement bouleversée. Toutes les créatures vivantes seront anéanties, la terre sera ramenée à l’ère du déluge. Tout recommencera. Que vous soyez un Hu ou un Han, personne ne pourra y échapper. »
« Vous… vous… » Zhu Xu ne pouvait soudainement plus parler.
Chen Xing dit à contrecœur : « Je ne veux pas que cela arrive non plus, ok ? Seigneur gouverneur, essayez de comprendre, pensez-vous que je voulais venir à Xiangyang ? »
« Après la mort de mon Maître, je fis rapidement mes bagages, quittai Mt Hua, empruntai une carriole, me précipitai vers Xiangyang. J’ai pu prendre un bateau et entrai dans la ville sans rencontrer de danger, avec pour but de rencontrer le gouverneur principal de la ville. Je suis celui qui a hérité de la noble tâche de réunifier le monde et de restaurer la profession d’exorciste, et je l’ai accepté bien que j’ignore pourquoi je suis celui choisi. Cependant, les hommes vaillants qui restent ont été ignorés par la Lampe, et j’ai dû aller dans le donjon, trouver un individu malade, et je n’ai pas encore résolu comment sortir de la ville ! »

À ce moment-là, le gardien du donjon arriva avec le registre de la prison. Zhu Xu remit son épée dans son fourreau, prit le registre et y jeta un œil.
Le gardien : « La liste des prisonniers a été trouvée ; son nom est Ziang Shu, c’est un Hu. »
Zhu Xu fronça les sourcils. Après avoir vu la lumière des mains de Chen Xing, il le crut pour le moment.
Chen Xing réfléchit puis répondit : « Hu ou Han, pour moi… ce n’est pas si important. Eh bien, je n’aime vraiment pas beaucoup les Hu, ça peut être difficile, mais il ne ressemble pas à… un Hu ? Les Hu ont-ils ce genre de noms de famille ? Quel clan ? »
Zhu Xu tourna le registre jusqu’à la dernière page. Il y avait une page rajoutée il y a six mois par l’officier d’escorte. Il lut les premières lignes inscrites. « Démon (Yaoren) Xiang Shu ».
Le gardien : « Au cours de la première année de la dynastie Taiyuan, Jianwei Zhonglang voulut envoyer cette personne à Jiankang pour qu’il fût exécuté. Cette personne ne parla jamais, quelles que soient les tortures qui lui furent infligées. L’officier d’escorte mourut d’une maladie alors qu’il était de passage à Xiangyan et le prisonnier fut repris par la ville. Je voulus le transférer à Jiankang, mais il a été temporairement oublié tellement il y avait de condamnés à mort. »

Zhu Xu déclara : « Il y a six mois, à Guanzhong, des innocents furent massacrés et donnés en sacrifice au ciel. Au total, 2 000 personnes furent tuées dans les six villages Hu et Han. Les hommes, les femmes et les enfants, et même les poulets et les chiens de la maison ne furent pas épargnés. Les officiers et les hommes de la ville de Dajin firent de grands efforts pour l’attraper lors d’une bataille épique. »
Concernant la Lampe du cœur, Zhu Xu hésita désormais à y croire, mais souleva une nouvelle question : « Comment avez-vous choisi cette personne ? »
Chen Xing dit à contrecœur : « Pourquoi fut-il choisi ? Je ne sais pas ! »
À ces mots, Chen Xing se sentit soudainement inquiet. Se pourrait-il que l’éclair qu’il avait vu devant lui fût une illusion ?
Chen Xing reprit le registre et ne vit que quelques lignes traitant du sujet : « Xiang Shu, a massacré plus de 2 000 personnes, un Hu, on suppose qu’il s’agit d’un attaché militaire, on ignore à quelle tribu il appartient… Existe-t-il une telle chose ? »
« Je lui ai donné des médicaments. Vous me dites maintenant qu’il a des milliers de morts sur la conscience ? » se plaignit Chen Xing.
« Ne vous ai-je pas dit de ne pas le laisser sortir ? » Zhu Xu déclara. « Prenez en un autre. »
Chen Xing : « Cela peut-il être changé ? Je ne peux pas le changer, hein ! Attendez, je crois que je dois encore réfléchir un peu. Une fois qu’il se sera rétabli, je lui demanderai plus de détails, et s’il avait été induit en erreur ? »
Chen Xing était bouleversé et se détourna rapidement pour s’en aller. Zhu Xu fronça les sourcils. Il se tourna et regarda en bas. Depuis le manoir situé au nord de la ville, il voyait au-delà des murs de la ville la masse dense de l’armée de l’État Qin qui y était stationnée.

*

Au même moment, dans la chambre des invités, l’homme haleta soudain, et revint à la vie.
Chen Xing retourna dans la pièce, ferma la porte, puis observa l’homme. Il était vivant maintenant. Que faire ? Était-il encore nécessaire de le tuer ? Peu importe ce que les autres disaient, devait-il lui donner une chance de se défendre ? Et c’est mon Protecteur ! Chen Xing considéra cet homme nommé Xiang Shu comme « sa chose » et donc il ne pouvait pas le tuer.
Il décida d’attendre qu’il puisse parler pour lui poser des questions. Alors Chen Xing prit une casserole d’eau chaude afin de l’essuyer.
« Quel est ton nom ? » Chen Xing observa le visage de l’homme et murmura : « Tu es un Hu ? »
L’homme avait un nez haut et des yeux profonds, et ses traits du visage étaient clairement définis. Son visage était plus creusé en raison de sa maigreur. Il n’avait pas été rasé depuis six mois, ses cheveux étaient emmêlés, son corps couvert de cicatrices – toutes dues à d’anciennes blessures.
Chen Xing ne put que l’essuyer, et le reste du nettoyage pourrait être fait par Xiang Shu lui-même une fois qu’il aurait récupéré. Alors qu’il essuyait le corps, il découvrit que ses doigts étaient fins, les jointures distinctes, les mains longues et les pieds grands, et ses jambes semblaient fortes et puissantes.
Mon Protecteur semble être un très bon combattant, pensa Chen Xing, très satisfait.

Chen Xing prit une aiguille en argent du sac de médecine et l’inséra dans un point d’acupuncture de sa taille. L’homme ouvrit soudainement les yeux.
Chen Xing recula immédiatement et brandit l’aiguille devant son nez.
« Vous avez été empoisonné, » poursuivit Chen Xing. « Je vous ai donné une pilule pour récupérer, et pendant six heures, tu ne pourras plus bouger, tu ne pourras rien dire. À la même heure demain soir, ton corps redeviendra normal. Tu pourras récupérer lentement lorsque tu mangeras quelque chose. »
L’homme lui jeta un regard noir et fixa Chen Xing. Ses yeux brillaient intensément, ressemblant à ceux d’une bête dangereuse. Chen Xing tourna légèrement la tête de côté, fronça les sourcils et réfléchit aux mots qu’il allait prononcer.
« Tu as été sélectionné par la Lampe du cœur, » déclara Chen Xing. « À partir de ce moment, tu es le Dieu martial. Je suis le Grand exorciste, nommé Chen Xing, nom de courtoisie Tianchi. Mais j’ai entendu dire que tu… avais tué beaucoup de gens ? Est-ce vrai ou faux ? »
« Peu importe ce que tu as fait avant, » dit Chen Xing après une courte réflexion. « Si je ne t’avais pas sauvé, tu ne survivrais pas une fois la ville tombée. C’est quelque chose que tu dois savoir. Tu ne peux pas mettre tes mains sur moi. »
L’homme ne put parler. Son regard se détourna. Chen Xing tira la couette et le couvrit. Il se demanda s’il devait l’attacher avec la couette, au cas où cette personne serait un meurtrier, qui exploserait une fois l’effet de la drogue estompé ; ce ne serait pas facile de le contrôler. Si tel était le cas, ce serait trop stupide de devenir le premier exorciste tué par son Protecteur.
Mais quand il y pensa, il était son bienfaiteur après tout. Cette personne ne ressemblait pas à un chien enragé. Ce ne devrait pas être une personne capable de se retourner contre son bienfaiteur. Chen Xing bâilla, il avait trop sommeil. Il s’assit à la table et s’appuya contre elle, tournant sa tête vers Xiang Shu.
Il avait quitté Mt. Hua il y a 15 jours, traversé terres et eaux pour arriver jusqu’à Xiangyang, alors que la ville était encerclée par l’armée Qin. Il fallut beaucoup d’efforts pour entrer dans la ville. Après plusieurs jours d’inquiétude et de peur, il devait penser à un moyen de partir le plus vite possible. Chen Xing était trop fatigué, il n’avait même pas la force de chercher une corde pour attacher l’homme. Il voulut juste faire une courte sieste, mais il s’endormit sans s’en rendre compte.
Il ne savait pas combien de temps il avait dormi, lorsqu’un bruit fort le réveilla soudainement.
« L’armée Qin attaque la ville ! »
« La ville est tombée ! »
Chen Xing était encore somnolent et se redressa. On entendait des bruits forts à l’extérieur, des pleurs, des cris et les clameurs de ceux qui se battaient.
Non, quelle coïncidence ? Chen Xing se leva immédiatement et sortit. Il entendait les coups de feu des soldats qui se battaient et tuaient, tandis qu’il rentrait dans la cour. Il sentit une balle frôler sa tête, puis exploser en flammes, alors qu’il s’accroupissait sur le toit du shogunat. Plus loin, il vit les hommes et les femmes de la rue brûlés par des flammes qui se tordaient tout en courant.
« La ville est tombée ! » Un soldat se précipita et cria : « Partez ! Le gouverneur est allé au sud de la ville ! Il se bat avec l’ennemi ! Partez ! Ne tardez pas ! »
La résidence du gouverneur était située au nord et c’était la première place à faire les frais de l’attaque de la cavalerie.

 

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Notes

  1. Mana : Croyance en des Forces supérieures répandues dans la nature, habitant certains êtres et certaines choses auxquels elle confère le pouvoir de dominer les autres 

  2. Ran Min : chef militaire à l'époque des Seize Royaumes (Wikipedia)

  3. Shifu en chinois: maître, enseignant. Utilisé pour le Maître d’arts martiaux

 

Traducteur: Darkia1030