(NT : boire du vinaigre veut dire être jaloux)
Après un moment de surprise, Tang Fan posa ses baguettes, s'essuya la bouche et dit en riant pour lui-même : "Eh bien, il semble que le hall Zhongjing soit vraiment un endroit intéressant, je vais aussi aller voir."
Sui Zhou n'avait jamais été du genre à se mêler des affaires des autres, alors le fait qu'il soit allé de son propre chef au hall Zhongjing était vraiment surprenant pour Tang Fan.
Inévitablement, il se souvint de la jeune demoiselle Du qu'il avait rencontrée la veille à la pharmacie.
Elle était gracieuse, d'une beauté remarquable, et à l'âge fleuri. Il ne serait pas surprenant que Sui Zhou soit séduit par elle.
Après tout, même avec un tempérament aussi réservé, le commandant Sui Zhou restait un homme normal.
Le problème était qu'il y avait beaucoup de femmes plus remarquables que la demoiselle Du à la capitale. Pour ne pas mentionner la cousine maternelle de Sui Zhou, qui l'aimait aussi.
Il n'y avait aucune raison pour que Sui Zhou dédaigne sa cousine d'enfance pour se préoccuper d'une demoiselle qu'il n'avait vue qu'une fois.
La demoiselle Du aurait-elle quelque chose de particulièrement inoubliable ?
Tang Fan, ne pouvant comprendre, devint de plus en plus curieux.
Après le petit-déjeuner, il se dirigea tranquillement vers le hall Zhongjing.
Le hall Zhongjing semblait être aussi prospère tous les jours. La veille, il était bondé de monde, et ce jour ci, c'était pareil, avec des files d'attente s'étendant à l'extérieur, au point que même la boutique de petits pains à côté faisait de bonnes affaires.
Beaucoup de gens qui venaient consulter n'avaient même pas pris le temps de déjeuner, alors ils achetaient deux petits pains à la boutique voisine et mangeaient en faisant la queue, tuant ainsi deux oiseaux d'une pierre.
Les gens à côté murmuraient entre eux, et Tang Fan tendit l'oreille pour écouter. Il entendit dire que le vieux docteur Du était de service aujourd'hui, et que son habileté médicale était divine, ce qui expliquait la foule exceptionnelle.
Tang Fan n'était pas là pour consulter, alors il se fraya un chemin à travers la foule et entra directement dans le hall principal.
En entrant dans le hall principal, il fut ébloui par la vue. Le hall spacieux était également plein à craquer, rendant impossible d’apercevoir Sui Zhou.
Heureusement, un employé qui accueillait les clients remarqua Tang Fan qui regardait autour de lui et s'approcha : "Monsieur, êtes-vous ici pour consulter ou pour prendre des médicaments ? Si c'est pour consulter, veuillez faire la queue dehors. Si c'est juste pour des médicaments, donnez-moi l'ordonnance."
Tang Fan sourit dès qu'il le vit : "Comment, vous ne vous souvenez pas de moi ?"
Voyant l'air perplexe de l'employé, Tang Fan lui rappela : "Hier, j'ai eu une luxation du bras et je suis venu ici."
L'employé se souvint. Il se rappela vaguement que Tang Fan semblait être quelqu'un d'important et s'empressa de sourire : "Monsieur, vous êtes ici pour…?"
Tang Fan répondit en souriant : "Hier, votre demoiselle m'a donné des médicaments, je suis venu spécialement pour la remercier aujourd'hui."
L'employé comprit soudain : "Justement, la demoiselle est là. Par ici, s'il vous plaît !"
En traversant la foule bruyante, l'employé l'amena de l'autre côté du hall principal.
Ce n'est qu'à ce moment-là que Tang Fan remarqua que la demoiselle Du consultait également aujourd'hui. Elle était simplement cachée par la foule et assise, il ne l'avait donc pas vue tout de suite.
Bien qu'ils soient tous les deux en consultation, il y avait beaucoup moins de patients devant elle que devant son père. De plus, une tenture perlée les séparait, créant un espace privé, et ceux qui venaient la consulter étaient principalement des femmes.
Tang Fan remarqua également que Sui Zhou, qui avait soi-disant quitté la maison tôt le matin, était assis sur une chaise à l'extérieur de la tenture, un livre à la main, apparemment absorbé par sa lecture.
L'employé de l'auberge était sur le point de conduire Tang Fan vers Mademoiselle Du, mais Tang Fan l'arrêta et le laissa retourner à ses tâches.
Étant donné la foule, avec des gens allant et venant de toutes parts, ni Mademoiselle Du ni Sui Zhou ne remarquèrent l'arrivée de Tang Fan.
Un moment plus tard, un homme d'âge moyen, ressemblant à un médecin, vint prendre le relais. Mademoiselle Du se leva, échangea quelques mots avec lui, céda sa place, puis souleva la tenture et se dirigea vers Sui Zhou, en souriant et en lui posant une question. Sui Zhou leva les yeux pour répondre et aperçut Tang Fan.
Voyant qu'ils avaient tous deux remarqué sa présence, Tang Fan se sentit obligé d'avancer en se frottant le nez.
Surprise, Mademoiselle Du s'exclama : "Maître Tang ?"
Après la bousculade d'hier, elle avait appris le nom de Tang Fan, grâce à Meng Cun.
Tang Fan la salua en souriant : "Bonjour, Mademoiselle Du. Merci pour les médicaments d'hier. Mon visage est à nouveau aussi lisse que du jade, je suis venu vous remercier."
Ces paroles, venant d'un autre homme, auraient pu paraître désinvoltes, mais de la part de Tang Fan, elles étaient pleines de courtoisie.
Mademoiselle Du ne put s'empêcher de rire : "Maître Tang, vous êtes trop aimable. Tant que vous allez bien, c'est l'essentiel."
Cependant, Sui Zhou, comme s'il ne supportait pas cette scène de sourires et de rires, les interrompit brusquement : "Tu n'as pas besoin d'aller chez Wang Zhi aujourd'hui ?"
On aurait dit qu'il interrompait une conversation plaisante.
Tang Fan le regarda de travers : "Pourquoi irais-je chez lui ? J'ai déjà reçu une gifle hier, ce n'est pas pour y retourner aujourd'hui et en recevoir une autre !"
Sui Zhou acquiesça sans poser d'autres questions et se tourna directement vers Mademoiselle Du : "Tu as dit que tu m'apprendrais à reconnaître les plantes médicinales. As-tu le temps maintenant ?"
Mademoiselle Du sourit : "Le docteur Tian est là, il peut prendre la relève. Par où veux-tu commencer ?"
Sui Zhou répondit : "Peu importe, je te laisse décider."
C'était donc déjà à ce stade ?
Avait-il manqué quelque chose ?
Tang Fan ouvrit grand les yeux de surprise.
Sui Zhou et Mademoiselle Du, sans prêter attention à son expression, se dirigèrent vers l'armoire à médicaments.
Profitant de l'avancée de Mademoiselle Du, Tang Fan tira discrètement la manche de Sui Zhou et le rapprocha de lui : "Depuis quand t'intéresses-tu aux plantes médicinales ?"
Sui Zhou le laissa presque sans voix avec sa réponse : "Je m'y intéresse maintenant."
Tang Fan : "..."
Avant qu'ils ne puissent continuer, Mademoiselle Du se retourna : "Maître Sui Zhou ?"
La manche de Sui Zhou glissa doucement des mains de Tang Fan : "Appelle-moi Guangchuan."
Tang Fan : "..."
Les joues de Du Guier rosirent légèrement : "Je vais continuer à t’appeler grand frère Sui."
Sui Zhou acquiesça d'un léger "hm" sans s'y opposer.
Tang Fan : "..."
Les herbes médicinales de la pharmacie Zhongjing étaient en effet très complètes, avec des tiroirs étroitement alignés sur les hauts placards.
Chaque tiroir portait une étiquette en papier indiquant le nom de l'herbe.
Pour ne pas déranger ceux qui préparaient des médicaments pour les patients, Du Guier choisit un coin à l'écart.
Du Guier : "Les tiroirs du haut sont hors de ma portée et nécessitent une échelle. Commençons par ceux du bas."
Sui Zhou hocha la tête : "D'accord."
Du Guier ouvrit alors un tiroir, prit une petite quantité de l'herbe qu'il contenait, la mit dans sa main et la tendit à Sui Zhou, lui demandant de l'examiner, de la sentir, puis elle expliqua brièvement les propriétés médicinales, les utilisations et les contre-indications de l'herbe.
Sui Zhou écoutait avec une attention surprenante, posant parfois des questions.
Enseignant et apprenant, concentrés, ils semblaient particulièrement harmonieux dans cet environnement bruyant.
Tang Fan, debout à côté, commença à se sentir de trop.
S'il ne connaissait pas Sui Zhou aussi bien, il aurait pu croire que ce dernier envisageait d'ouvrir une pharmacie à la capitale.
Mais si Sui Zhou n'avait pas l'intention d'ouvrir une pharmacie, pourquoi montrait-il soudainement un tel intérêt pour l'identification des herbes médicinales ?
Serait-ce qu'il avait réellement des sentiments pour cette jeune femme, Du Guier ?
Tandis que Tang Fan se perdait dans ses pensées, Du Guier avait déjà sorti deux autres herbes de deux tiroirs différents.
"Voici du curcuma commun et du curcuma sauvage (NT : curcuma aromatica, ou safran des indes). Les deux ont des propriétés similaires, favorisant la circulation sanguine, mais le curcuma est le rhizome du curcuma longa, tandis que le curcuma sauvage est le rhizome du curcuma aromatica, qui pousse dans le Zhejiang. La différence est que le curcuma commun traite les douleurs causées par les stases sanguines dans la poitrine et l'abdomen, tandis que le curcuma sauvage est utilisé pour les douleurs causées par les rhumatismes."
Sui Zhou réfléchit : "La pathologie est différente."
Du Guier sourit en hochant la tête : "Exactement, bien qu'ils aient des fonctions similaires, les maladies qu'ils traitent diffèrent beaucoup. Si une personne a une connaissance superficielle de la médecine, elle risque de mal les utiliser, causant de sérieux problèmes."
Elle avait une nature franche et, sentant que Sui Zhou semblait vraiment avoir un certain intérêt pour elle, elle voulut plaisanter en disant "Veux-tu devenir mon disciple ?", mais, apercevant Tang Fan du coin de l'œil, elle se retint.
Elle remit les herbes dans leurs tiroirs et en sortit deux autres.
"Ceci est..."
"Ceci est du chèvrefeuille sauvage et du chèvrefeuille commun, n'est-ce pas ?" quelqu'un à côté la devança.
Du Guier fut surprise, puis sourit : "En effet, c'est bien du chèvrefeuille sauvage (NT : Lonicera macranthoides, ou chèvrefeuille des montagnes) et du chèvrefeuille doré (NT : Lonicera h-japonica ou chèvrefeuille japonais). Le chèvrefeuille sauvage pousse principalement dans le sud et ressemble beaucoup au chèvrefeuille doré, ce qui fait que peu de gens du nord le reconnaissent. Je ne pensais pas que Maître Tang aurait une connaissance si approfondie de la médecine."
Tang Fan, les mains dans les manches, sourit : "On ne peut pas dire que ce soit approfondi, j'ai grandi dans le sud, c'est pourquoi je les reconnais."
Sui Zhou tapota l'épaule de Tang Fan.
Tang Fan le regarda, intrigué.
Sui Zhou : "Les baozi aux trois saveurs de la boutique d'à côté sont excellents, veux-tu les essayer ?"
Tang Fan : "..."
Auparavant, tu disais que j'étais ton ami intime, et maintenant, tu me chasses pour t'occuper de cette belle jeune femme ?
Pensant cela avec amertume, Maître Tang ne laissa rien paraître et répondit innocemment : "Non merci, j'ai bien mangé ce matin. Si tu veux en acheter, vas-y. Je vais rester ici avec Mademoiselle Du, j'aimerais aussi apprendre la pharmacologie avec elle."
Sui Zhou : "..."
Du Guier : "..."
Du Guier ne pensait pas qu'elle pouvait être si exceptionnelle que deux jeunes hommes talentueux venus de la capitale s'intéressent à elle en même temps et lui fassent la cour. En observant la conversation entre Sui Zhou et Tang Fan, elle avait l'impression qu'il y avait des sous-entendus entre eux.
"Mademoiselle Du !" La voix du commis se fit entendre de l'extérieur.
Il se fraya rapidement un chemin à travers la foule, accompagnant une femme d'âge moyen, essoufflé : "Mademoiselle, Madame Xing est arrivée !"
Du Guier se retourna avec un sourire, manifestement elle connaissait cette femme.
"Madame Xing, vous venez encore chercher des médicaments ?"
"Oui..." Madame Xing sourit avec gêne, "Je dérange encore Mademoiselle Du. Si vous êtes occupée, je peux attendre."
Elle était simplement habillée, ressemblant à n'importe quelle femme d'une famille modeste. Bien qu'elle ne soit pas très âgée, les rides profondes autour de ses yeux et de sa bouche révélaient les lourdes pressions de la vie quotidienne.
"Ce n'est rien, vous êtes une cliente régulière, je dois bien vous traiter !" répondit gentiment Du Guier. "Avez-vous apporté l'ordonnance ?"
"Oui, oui !" Madame Xing sortit une feuille de papier froissée de son sein et la tendit.
Du Guier la parcourut rapidement du regard : "Racine de Achyranthis Bidentata (NT : en chinois niuxi, litt. Genou de vache), racine de réglisse, brindille de cannelier (NT : ramulus cinnamomi, cannelier de Chine, on extrait la casse, une épice ressemblant à de la cannelle, de son écorce). C'est une ordonnance pour traiter les rhumatismes, n'est-ce pas ? Est-ce que Jiang Shu a des problèmes de dos et de jambes ?"
Madame Xing soupira : "Oui, la dernière fois, il n'a pas écouté les conseils et est allé récolter des herbes dans la montagne. Il a été pris sous la pluie et depuis, il a ces douleurs."
Du Guier, désapprobatrice : "Madame, vous devez convaincre Jiang Shu, il n'est plus tout jeune. Monter dans la montagne pour récolter des herbes est dangereux, que ferait-il s'il tombait ?"
Madame Xing baissa la tête : "Je le lui ai dit, mais il ne m'écoute pas..."
Du Guier secoua la tête sans insister : "Attendez ici, je vais vous préparer les médicaments. Vous voulez six doses cette fois ?"
Madame Xing sortit précipitamment de l'argent : "Jiang Shu a dit qu'il en voulait neuf, pour pouvoir les prendre plus longtemps et se soigner progressivement."
Du Guier repoussa l'argent avec un sourire : "D'accord, neuf doses alors. Mais ne me payez pas, sinon mon père va me gronder !"
Madame Xing, déconcertée : "Ce n'est pas possible, si vous ne prenez pas l'argent, je n'oserai plus revenir. Si Jiang Shu l'apprend, il me grondera sûrement !"
Pendant que les deux femmes continuaient à se disputer poliment, Tang Fan poussa Sui Zhou du coude, souriant doucement : "Mademoiselle Du, bien que n’ayant pas une beauté éclatante, est une charmante jeune femme, compétente en médecine et au grand cœur. Il est rare de voir notre inspecteur Sui ému par une femme. Veux-tu que je t'aide à la courtiser ?"
Contre toute attente, Sui Zhou ne nia même pas le terme "ému", se contentant de dire : "Ne fais pas de bêtises."
Tang Fan rit : "Comment cela serait-il une bêtise ? Tu ne crois pas que je puisse gagner son cœur pour toi ?"
Sui Zhou répondit : "Elle est différente des autres femmes."
En entendant cela, Tang Fan ne put s'empêcher de le regarder attentivement.
À ce moment-là, bien que le visage de Sui Zhou restât impassible, Tang Fan perçut dans cette impassibilité une certaine tendresse.
Pas étonnant qu'il soit venu si tôt ce matin, pensa-t-il, serait-il vraiment tombé amoureux ?
De l'autre côté, le débat entre Du Guier et Madame Xing se résolut : Du Guier accepta la moitié de l'argent et rendit le reste. Madame Xing, reconnaissante, la remercia chaleureusement avant de suivre le commis pour récupérer les médicaments.
Tang Fan, curieux, demanda : "Mademoiselle Du, bien que la compassion soit nécessaire pour être médecin, le hall Zhongjing n'est pas un dispensaire de charité. Pourquoi ne prendre que la moitié du paiement pour les médicaments ?"
Du Guier soupira : "L'oncle Jiang, le mari de Madame Xing, était l'un de nos médecins au hall Zhongjing. Sa santé déclinant, il est retourné à Guangling pour y passer sa retraite. Récemment, leur fils est allé dans la montagne pour récolter des herbes et n'est jamais revenu, probablement emporté par une bête sauvage. L'oncle Jiang et Madame Xing vivent maintenant seuls, et bien qu'il soit médecin, il rédige ses propres ordonnances et vient ici pour chercher les matériaux. Leur vie est difficile, et Madame Xing a probablement dû vendre quelque chose au prêteur sur gages pour obtenir cet argent. Si je peux réduire leurs dépenses, je le fais."
Tang Fan, admiratif, commenta : "Mademoiselle Du, votre bienveillance et votre compétence médicale vous permettront sûrement de devenir une grande médecin un jour !"
Le visage de Du Guier rougit légèrement : "Monsieur Tang, vos éloges sont trop généreux. On n'a jamais entendu parler d'une femme devenant une grande médecin, je fais simplement ce que mon père m'a enseigné, avec conscience."
Tang Fan sourit : "Vous avez tort, Mademoiselle Du. Prenez par exemple Yi Shuo de la dynastie Han et Zhang Xiaoniang de la dynastie Song, toutes deux étaient des médecins renommées. Pourquoi faire une différence entre les hommes et les femmes ?"
Qui n'aime pas entendre des compliments, surtout quand ils touchent au cœur ? Du Guier, bien que souriante et silencieuse, ne pouvait dissimuler sa joie.
Ne supportant plus de voir Tang Fan flatter Du Guier, Sui Zhou lui suggéra : "Il y a du thé et des pâtisseries là-bas. Va t'asseoir un moment et je te rejoindrai plus tard."
Tang Fan hésita à dire qu'il n'avait pas faim, mais sous le regard insistant de Sui Zhou, il toussota : "Très bien, prends ton temps."
Sur la table, il y avait des pruneaux et des gâteaux de Huangqi (NT : gâteaux à base d’astragale, qui est également une plante médicinale) apportés par le commis. Zhongjing étant une pharmacie, même les collations avaient une touche médicinale. Tang Fan goûta un morceau, mais trouva cela trop sucré à son goût. Tout en grignotant distraitement, il se dirigea vers la porte.
Madame Xing, ayant pris ses médicaments, passa près de lui sans le remarquer. Tang Fan la regarda quitter la pharmacie et se hâter vers l'ouest.
À ce moment-là, quelqu'un sortit du prêteur sur gages au coin de la rue. Avalant son dernier morceau de gâteau, Tang Fan épousseta ses mains et s'apprêtait à retourner à l'intérieur lorsqu'il remarqua cette personne du coin de l'œil.
Bien qu'il ne puisse pas se souvenir de tout le monde qu'il rencontrait, il avait une bonne mémoire. Cette fois-ci, il se souvint rapidement de l'identité de cette personne : le majordome de la résidence du général.
Tang Fan se souvenait que ce majordome, nommé Wang, était un fidèle serviteur de Wang Yue depuis des années. Wang Yue l'avait présenté à Tang Fan lors de sa première visite au manoir du général.
Mais à cet instant, le comportement de Wang était inhabituellement furtif, pas comme d'habitude. Intrigué, Tang Fan décida de le suivre en sortant de Zhongjing.
En passant devant le prêteur sur gages, il jeta un coup d'œil à l'intérieur et croisa le regard du gérant, sans rien voir de suspect. Il se concentra à nouveau sur la traque de Wang.
Wang marchait vite et se mélangea dans la foule, augmentant la distance entre lui et Tang Fan. Ce dernier accéléra le pas pour ne pas le perdre de vue.
Tang Fan ignorait pourquoi il se sentait obligé de suivre le majordome Wang. Il était courant de devoir aller au prêteur sur gages en période de difficultés financières, et il n'y avait rien de particulièrement suspect dans le comportement de Wang.
Dès qu'il s'était tenu à la porte de la pharmacie, Tang Fan avait ressenti une étrange sensation, comme s'il ratait une information importante.
Cependant, n'ayant pas le temps de réfléchir, il se concentra sur la poursuite de la personne devant lui.
Peut-être que le majordome Wang avait remarqué qu'il était suivi, car Tang Fan le vit soudainement ralentir et se glisser dans une ruelle adjacente.
Fronçant légèrement les sourcils, Tang Fan le suivit rapidement dans cette ruelle.
La ruelle était étroite et ne comportait qu'un seul chemin, nécessitant de tourner à droite après quelques pas.
Mais lorsqu'il tourna, il se retrouva face à une impasse, sans issue.
Tang Fan s'arrêta, stupéfait, réalisant que sa filature avait été découverte.
Sans perdre un instant, il fit demi-tour et se précipita vers la sortie de la ruelle.
La rue animée était presque à portée de vue, mais avant qu'il ne puisse se détendre, une silhouette apparut à l'entrée de la ruelle.
Cette personne se jeta sur Tang Fan, apparemment armée d'une lame.
Tang Fan esquiva instinctivement, mais son dos heurta violemment le mur de terre, et son bras fut immédiatement blessé.
Il poussa un cri de douleur tandis que l'assaillant le fouillait rapidement avant de s'enfuir avec sa bourse.
Ne pouvant pas lutter contre l'arme de l'assaillant, Tang Fan dut le regarder partir avec son argent.
Stupéfait, il pensa que tout cela n'était qu'une manœuvre pour le voler.
Un passant s'exclama : "Jeune homme, vous saignez !"
Tang Fan tourna la tête et remarqua que son bras, déjà démis la veille, était à nouveau blessé, avec une entaille profonde mais non dangereuse, d'où le sang coulait abondamment.
Se demandant ce qu'il avait fait pour mériter cela, il déclina l'offre d'un passant de l'accompagner à la pharmacie, couvrant sa blessure et retournant à Zhongjing par lui-même. Le chemin de retour, qui ne lui avait pas paru si long en venant, lui sembla interminable cette fois, surtout après avoir perdu du sang.
En arrivant à la porte de Zhongjing, il se sentit étourdi.
Le même commis l'accueillit, stupéfait de le voir revenir si vite et blessé, et se précipita pour l'aider : "Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment vous êtes-vous blessé ? Vite, Mademoiselle Du !"
Les gens à l'intérieur de la pharmacie s'écartèrent pour leur laisser le passage.
Du Guier arriva précipitamment et, voyant la situation, s'exclama : "Venez vite à l'arrière, il y a des bandages et des médicaments, il faut d'abord arrêter le saignement !"
Le commis l'aida à l'emmener à l'arrière, où Sui Zhou, ayant déjà vu la scène, apporta rapidement des bandages et des médicaments. Sans dire un mot, il déshabilla partiellement Tang Fan pour traiter sa blessure.
Du Guier, bien qu'elle ait voulu aider, préféra sortir discrètement en voyant la scène.
Même si ce n'était pas de sa faute, Tang Fan se sentait inexplicablement coupable en voyant Sui Zhou soigner sa blessure en silence, les lèvres serrées. Tentant de détendre l'atmosphère, il dit en riant : "Ce n'est qu'une coupure, rien de ..."
Mais il ravala ses mots en voyant le regard de Sui Zhou.
Sui Zhou, voyant que le saignement diminuait, continua d'appliquer la poudre médicinale avec soin.
La douleur et les picotements faisaient grimacer Tang Fan, mais il sentait l'efficacité de la poudre, la plaie se refermant peu à peu.
"Tiens bon," murmura Sui Zhou en pensant que Tang Fan souffrait, adoucissant encore ses gestes.
« Cette poudre n'est pas bon marché, alors n'en utilise pas trop. Économise un peu, sinon Mademoiselle Du s'en inquiétera », ne put s'empêcher de remarquer Tang Fan.
« De toute façon, ce n'est pas ton argent », répondit Sui Zhou sans lever la tête.
Tang Fan resta silencieux, se demandant si Sui Zhou avait mangé de la poudre à canon.
Sui Zhou surveilla l'état de la plaie de Tang Fan jusqu'à ce qu'il juge que c'était calmé. Ensuite, il enroula des bandages autour de la blessure de Tang Fan pour la couvrir.
« Runqing. »
« Oui ? » Tang Fan, voyant l'expression sérieuse de Sui Zhou, se redressa instinctivement.
« Si je me rapproche de Mademoiselle Du, c'est pour une raison bien précise », dit Sui Zhou à voix basse.
Bien que personne ne soit présent dans l'arrière-salle, Sui Zhou parla suffisamment bas pour que seuls eux deux puissent entendre.
« La famille Du détient le monopole des fournitures médicales de l'armée. Lorsqu'ils transportent ces fournitures, ils n'ont pas besoin de passer par des contrôles supplémentaires. Si quelqu'un veut en profiter pour faire quelque chose de louche, ce serait très facile. Ne sois pas en colère. »
« Je ne suis pas en colère… », répondit Tang Fan, embarrassé.
Sui Zhou le regarda, son expression indiquant clairement qu'il ne croyait pas à ses paroles.
Tang Fan toussa légèrement, se sentant coupable, et sourit maladroitement : « D'accord, Guangchuan, tu n'as pas besoin de m'expliquer autant. Je n'ai jamais pensé que tu me délaisserais pour une femme. »
Sui Zhou eut un regard montrant un peu d'exaspération, mais avant que Tang Fan ne puisse en comprendre la raison, son visage retrouva son expression habituelle de calme.
Peu de temps après, la voix de Mademoiselle Du se fit entendre de l'extérieur : « Grand frère Sui, comment va Maître Tang ? »
Sui Zhou aida Tang Fan à se rhabiller et répondit : « Ça va, rien de grave, tu peux entrer. »
La porte s'ouvrit, Mademoiselle Du souleva le rideau de perles et, en voyant Tang Fan assis là, bien habillé, elle soupira de soulagement : « Maître Tang, voulez-vous que je demande au Docteur Tian de vous prendre le pouls et de vous préparer un remède pour vous rétablir ? »
Tang Fan sourit : « Ce n'est pas nécessaire, ce n'est qu'une petite coupure… »
« Il a peur des médicaments amers », ajouta Sui Zhou.
Tang Fan "..."
Mademoiselle Du réprima un sourire : « Dans ce cas, mangez plus de jujubes pour reconstituer votre sang, et préparez-vous une soupe de carpe aux dattes rouges ces prochains jours. »
Tang Fan, se sentant humilié par les paroles de Sui Zhou, répondit faiblement : « Merci, Mademoiselle Du. »
Avec Tang Fan blessé, Sui Zhou ne pouvait plus rester à la pharmacie. Ils prirent donc congé de Mademoiselle Du et quittèrent l'établissement.
Une fois dehors, Sui Zhou demanda : « Comment t'es-tu blessé ? »
Tang Fan ne répondit pas et dit à la place : « Tu devrais demander à Wang Zhi d'enquêter sur le majordome Wang de la maison de Wang Yue. »
Sui Zhou fronça les sourcils : « Pourquoi ? »
Tang Fan expliqua comment il avait suivi le majordome Wang, mais s'était retrouvé face à un petit voleur qui l'avait blessé en essayant de lui voler son argent. « Ce voleur semblait être là pour l'argent, mais le moment de son apparition me paraît trop opportun », ajouta-t-il.
Sui Zhou demanda : « As-tu vu son visage ? »
Tang Fan hocha la tête : « Je peux le dessiner à mon retour. Nous devrions enquêter des deux côtés. Comme je ne peux pas me rendre ouvertement chez Wang Zhi, je vais devoir compter sur toi. »
Sui Zhou raccompagna Tang Fan à l'auberge officielle, puis se rendit chez Wang Zhi. Il y passa une grande partie de la journée, tandis que Tang Fan, attendant son retour, restait dans sa chambre. Finalement, il s'endormit.
Ce n'est qu'au milieu de la nuit qu'il sentit du mouvement à côté de lui et ouvrit les yeux, encore endormi.
« Tu es de retour ? » demanda Tang Fan, s'appuyant sur son coude pour se redresser. En se redressant, il toucha sa blessure, ressentant une vive douleur qui le réveilla complètement.
« Ne te lève pas », dit Sui Zhou en enlevant son manteau. Il souffla la bougie et s'allongea sur le côté extérieur du lit.
« Alors ? » demanda Tang Fan en se poussant un peu pour laisser plus de place à Sui Zhou.
« Nous avons retrouvé le voleur qui t'a blessé. »
« Ah oui ? »
« Il est mort. »
Cette nouvelle inattendue laissa Tang Fan perplexe, mais voyant la fatigue sur le visage de Sui Zhou, il dit : « On en reparlera demain. »
Sui Zhou acquiesça, ferma les yeux et son souffle devint rapidement régulier et profond.
Tang Fan, l'esprit préoccupé par ce que Sui Zhou venait de lui dire, finit par s'endormir lui aussi, malgré ses pensées tourmentées.
La nuit passa sans incident.
Le lendemain, les deux se levèrent tôt. Après avoir fini de se laver, Tang Fan s'assit à la table, prit un bol de lait de soja et s'apprêtait à boire lorsque Wang Zhi arriva.
Traducteur: Darkia1030
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